Oh, ils sont nombreux ceux qui manquent de respect à
BEHEMOTH. Le groupe est moqué, le groupe est montré du doigt. Et pourtant, les véritables critiques et reproches qui sont formulés sont dans la plupart des cas à destination du leader du groupe plus encore qu’à sa musique. Nergal est un personnage mythique, qui porte la formation polonaise depuis 1991, mais qui eu, a, et aura encore ses polémiques et faits-divers. Il a beaucoup fasciné durant plus de 15 ans et on applaudissait le fait qu’il ait créé l’un des premiers groupes de black polonais, qu’il écrive des chansons sur des thématiques pointues expliquées dans les livrets, qu’il s’oppose farouchement à la religion chrétienne dans sa Pologne si rigide, mais aussi qu’il paraisse érudit avec ses diplômes de conservateur de musée … Mais progressivement, il a pris des décisions et commencé un style de vie qui le rapprochaient de plus en plus de la lumière et d’une vie sociale apparemment bien rangée. Certains amateurs de black metal ont estimé qu’il utilisait son succès pour la popularité, et ont dénoncé sa trahison. C’était un vendu, attiré par l’argent et les lauriers. Cette rebellion de fans correspond plus ou moins à l’époque où Nergal souffrait d’une leucémie. Il n’avait que 33 ans, l’âge du Christ à sa mort. Il en a réchappé grâce à une greffe fin 2010, mais cette expérience a contribué à changer son état d’esprit. Plus que d’aimer le monde des peoples, il ne donne surtout plus d’importance au qu’en-dira-t-on. Il profite de ce qui s’offre à lui, et ne se retient d’aucun plaisir possible. Il a ainsi accepté d’être membre de The Voice of Poland, ou encore de devenir le visage de la boisson « DEMON, Energy Drink » dans son pays, tout en ouvrant plusieurs salons de coiffure en bon business man qu’il est. Et puis surtout il fait l’influenceur très actif et jugé malaisant sur les réseaux sociaux... L’homme suscite donc débat, et se fait souvent traiter de pitres, par des personnes qui oublient toujours de rappeler qu’il mène des combats, qu’il s’investit en faisant des dons pour la recherche contre le cancer et pour aider les patients… Nergal sera toujours scruté, et toujours susceptible d’être encore et encore une cible facile. La lumière est venue sur lui, il ne l’a pas fui, il l’a apprivoisée.
Cette réputation de l’artiste a pris le pas sur celle du groupe, et elle engendre des critiques acerbes sur une musique qui ne démérite pourtant pas. Il faut surtout repenser à tout ce que le Polonais a apporté à la scène. Il a fait des débuts fracassants avec un trve black des forêts qui donne encore des frissons trente ans après (
Sventevith /
Grom). Puis il a monté la puissance d’un bon cran pour asséner des compos percutantes qui servent encore de modèle au genre (
Satanica /
Thelema.6). Il a ensuite été l’un des meilleurs représentants du death teinté de black (
Demigod,
The Apostasy).Et enfin il est revenu à des structures et des ambiances plus propres au black metal, mais toujours avec une marque de fabrique personnelle (
The Satanist /
I Loved You at Your Darkest)… Je comprends parfaitement que l’on puisse regretter telle ou telle période, en tant que fan du groupe ou fan d’une branche de metal en particulier, mais affirmer que les morceaux de
BEHEMOTH sont nazes me paraît toujours exagéré… De mon côté, c’est la période où le death était plus en avant qui me déplaisait, au point où je n’ai acheté
Evangelion que quelques années après sa sortie, juste histoire de compléter la collection. Et sincèrement, mes deux opus préférés sont
Sventevith (1995) et
Satanica (1999), mais j’ai aussi beaucoup apprécié certaines pistes de
The Satanist et
I Loved You at Your Darkest. C’est vrai que le côté spectaculaire arrogant est très affirmé, mais c’est l’identité de
BEHEMOTH, et le résultat était là…
Selon la manière de compter,
Opvs Contra Natvram, ce nouvel album, serait le 12ème album du groupe. Si on y retrouve évidemment Nergal, les autres membres sont aussi des partenaires de très longue date. Inferno est à la batterie depuis 1997 et Orion est à la basse depuis 2003. Le reste ne sont encore que de session, dont l’habituel Seth de
NOMAD qui vient à nouveau poser ses guitares comme il le fait depuis
Demigod en 2004. Un autre habitué est Michal Lapaj, qui apporte son talent au clavier depuis bientôt 10 ans. On le retrouve une nouvelle fois au piano, mais uniquement sur « Versvs Christvs ». Il y a sinon Wawrzyniec Dramowicz aux timbales et à quelques percussions, comme il l’avait fait sur l’album précédent. Et côté nouveaux venus, on constate la participation de Einar Selvik, à l’origine des percussions tribales de l’introduction de l’album. Il ajoute ainsi un autre grand groupe à son palmarès, lui que l’on connaît pour avoir joué entre autres avec
WARDRUNA,
GORGOROTH ou encore
ENSLAVED. Puis Zofia Fras d’
OBSCURE SPHINX se transforme à deux reprises en choriste déchaînée, sur « Thy Becoming Eternal » et sur « Versvs Christvs ».
Et le contenu alors ? Est-ce que
BEHEMOTH poursuit tranquillement sa route ? Revient-il encore en arrière ? Explore-t-il de nouvelles voies ? Eh bien, ce sont les deux premières questions qui voient une réponse positive. Les compositions de
BEHEMOTH ne surprennent pas et elles jouent avec les éléments représentatifs de leur carrière. La voix de Nergal est toujours aussi puissante et elle dirige toujours de main de maître l’ensemble. Elle arrive toujours à faire frémir et c’est un délice de l’entendre tonner sans jamais faiblir. On peut faire le difficile ou le blasé, mais c’est pour moi l’un des points les plus positifs des 43 minutes de jeu. Les 10 compositions se divisent cependant en deux catégories. Quelques-unes peuvent être considérées comme la suite logique de l’album précédent, avec une patte black metal plus mise en avant, et des mélodies plus « évidentes ». Je pense à « The Deathless Sun », « Once Upon a Pale Horse » et « Thy Becoming Eternal » qui sont mes trois pistes favorites. Les riffs conviennent tout simplement à mes goûts personnels, alors que je suis moins réceptif aux autres ambiances, celles qui mettent le death plus à l’honneur et qui misent sur des solos auxquels je suis insensible.
« Insensible »… Le mot est lâché, et le mot est important, car c’est bien celui qui convient et que j’aimerais entendre plutôt que « mauvais » ou « bâclé », car cet album ne l’est vraiment pas. Il est soigné, il est fort. Il est prévisible ?
BEHEMOTH a montré en plus de 30 ans qu’il ne se répétait pas, il a assez prouvé qu’il pouvait se renouveler, évoluer, revenir en arrière. Alors prenons Opvs Contra Natvram ou ne le prenons pas, mais n’oublions pas que c’est le 12ème album du groupe. Quel groupe se dépasse au bout d’autant de sorties ? C’est déjà beau d’avoir un
BEHEMOTH en forme !
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