Nom de Dieu… Je savais bien que le nom d’
AS THEY BURN ne m’était pas inconnu mais où Diable aurais-je pu être en contact avec du
deathcore ? En fouillant un peu dans ma mémoire et ma boîte (au sens propre) à souvenirs, j’ai fini par retrouver le patient zéro : j’avais vu les Parisiens en 2010 sur la scène de l’Elysée Montmartre lors du
Paris Extreme Fest en compagnie (dans le désordre) d’
ARCH ENEMY, de
SAMAEL, de
DARK FUNERAL, de
GOROD, de
NO RETURN, d’
ENTOMBED A.D., de
L’ESPRIT DU CLAN, de
TREPONEM PAL et de
BETRAYING THE MARTYRS. Je me rappelle parfaitement de cette journée, de la personne avec qui j’étais, des fringues que je portais, du son de merde pour
DARK FUNERAL, des photos prises avec
Benoît Claus après son concert, du regretté
L.G. Petrov se mouchant (« morvant » comme le disait ma douce compagne d’alors) dans ses doigts, de la prestation de
SAMAEL que je voyais alors pour la première fois, bref, ça faisait un peu plus d’un an que je vivais à Paris et je découvrais les joies métalliques de la capitale. Je n’ai en revanche conservé aucune image forte d’
AS THEY BURN. Est-ce anormal ? A l’époque, la formation avait juste sorti un EP («
A New Area for Our Plagues ») et elle devait certainement être en train de préparer «
Aeon’s War », son premier album. Il y eut ensuite une hype autour du groupe, le LP «
Will, Love, Life » en 2013, puis plus rien. Fin de parcours. Du moins jusqu’à aujourd’hui et «
Ego Death », publié en autoproduction et relayé par l’Agence
Singularités. Je l’avoue, je suis intrigué.
Une précision afin qu’il n’y ait pas de malentendus quant à la suite de l’article : je ne suis pas le public cible de cette formation. Je n’ai jamais été client des gimmicks du
deathcore, étant peut-être trop vieux ou trop insensible pour y être réceptif, aussi mon appréciation doit-elle être mise au regard de ma (forte) subjectivité. Je n’ai jamais également pu piffrer les alternances de growls et de voix claires, c’était déjà l’un des tics qui m’avaient fait complètement abandonner le
néo metal, probablement aux alentours de 2004 suite à la sortie de l’horrible «
Vol.3: (The Subliminal Verses) » de
SLIPKNOT, album qui a fini de m’écœurer du genre. En plus, paradoxalement avec ce genre de groupes, moins le chant est saturé plus il semble retouché, avec des superpositions de pistes impressionnantes en studio pour faire péter des harmonies vocales de ouf mais qui ne passent jamais (ou presque) le cap du live.
Concernant ce disque, je vais appliquer la fameuse technique de l’étudiant moyen : thèse, antithèse, synthèse.
Grand un : les points forts de ces six nouvelles compositions.
Que tous les fans d’
AS THEY BURN soient rassurés, le noyau dur reste inchangé :
Kevin Traoré au chant,
Ronald Pastor à la basse,
Milton Bakech à la batterie. C’est ainsi une garantie, une façon d’être sûr de renouer avec tous les éléments qui ont fait le succès du quatuor. Par conséquent, si tu écoutes « Dream Collapse » puis « Unable to Connect » par exemple, tu retrouveras toutes les saveurs du bon plat fumant d’antan : peu ou prou le même style musical, le même son (voire plus gros encore mais sans pour autant dénaturer l’identité), le même look. Il y a juste une dimension
néo metal mélodique qui me semble peut-être plus affirmée que par le passé mais, au global, la formation conserve sa ligne de conduite, son intégrité. Cela ne pourra que ravir les fans de la première heure, je n’entends ici aucune raison pour qu’il en aille autrement.
De plus, ceux qui sont à fond dans la mouvance
émo-néo-deathcore et que le
metal pur et dur rebute ne pourront qu’adorer ces nouvelles compositions. Elles sont remplies jusqu’à la gueule de plans qui groovent à mort, de breakdowns « coup du lapin », de mélodies vocales habilement entremêlées, comme si
LINKIN PARK avait bouffé en entrée un ours en colère et un rappeur gangsta,
DEFTONES (une influence très présente, sur « V.I.T.R.I.O.L » par exemple mais plus globalement sur l’ensemble de l’EP) en plat de résistance puis
KORN en dessert, le titre « Monster » m’évoquant fortement « Get Up! » avec
SKRILLEX en featuring (à 2 minutes 30, le break butte tout, c’est net), tant au niveau des sonorités électroniques que du flow. C’est donc bien chargé, voire parfois même trop en termes d’occupation de l’espace sonore. En effet, les compositions étant principalement construites sur des rythmiques binaires et des breaks, il y a davantage besoin qu’un élément extérieur vienne rompre une certaine monotonie, d’où la prédominance du chant et la rareté de développements purement instrumentaux. Autrement dit, comme les chansons laissent somme toute assez peu de place à des progressions rythmiques (je ne parle même pas d’avoir des solos ou des lignes d’harmoniques), à des ambiances auto suffisantes, un vocaliste versatile est d’autant plus nécessaire pour apporter de la variété, des textures, de la complexité, de l’émotion aussi, tache dont s’acquitte parfaitement
Kevin Traoré. Sa voix réconcilie allègrement le
néo, le
death et le débit du
hip-hop avec en plus une attitude cool qui fait la différence. Là-dessus, je le reconnais, il est vraiment balèze le type.
Ajoute à cela une production comac, des compositions simples en termes de structure mais riches en arrangements et totalement efficaces (ça sent les futurs mosh pit), tu piges vite que les mecs reviennent en patron de la scène
deathcore, déjà au niveau national, avec en plus l’envie de s’ouvrir à d’autres influences plus mélodiques. Ce dernier point est vraiment à leur crédit, on sent qu’il y a eu une évolution ces dix dernières années et que la musique s’est enrichie d’inspirations nouvelles. Donc, pour la faire courte, si tu aimais le groupe avant son split, tu aimeras le groupe dans sa renaissance, et réciproquement. En revanche, si c’était déjà mort pour toi en 2013, tu peux laisser tomber, je n’ai aucun autre argument pour te convaincre.
Grand deux : les limites.
Bon, toute cette partie-là, je vais au final la garder pour moi. J’avais rédigé tout un pavé pour expliquer qu’à la différence du
death ou du
grind, le
deathcore vieillit mal, que les chanteurs ont en général un mal fou à restituer les lignes de chant clair en live (exemple typique :
Chino Moreno) ou encore que les productions dopées aux hormones animales de croissance essaient tant bien que mal de faire paraître énormes des breakdowns que l’on retrouvait déjà dans le
hardcore des années 80, 90 avec zéro surenchère, c’était brut et ça foutait tout le monde à l’amende mais tout cela n’a vraiment pas sa place sur cette chronique du nouveau
AS THEY BURN, tout ce qui compte c’est qu’un fleuron de la scène française revient en force et compte bien porter son projet sur toutes les scènes possibles. Souhaitons-lui un bon retour parmi les vivants !
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