Après un
Omens certes sympathique mais qui en dépit de qualités évidentes s’était tout de même avéré un poil moins concluant que ses prédécesseurs, j’appréhendais un petit peu de retrouver Elder sur ce sixième album. Son intérêt de plus en plus marqué pour les musiques progressives et autres digressions psychédéliques à la sauce 70’s (on pense notamment au EP
The Gold & Silver Sessions ou bien encore à cette très chouette collaboration avec les Suédois de Kadavar parue l’année dernière) me faisaient en effet craindre une nouvelle "déception" de la part de ces Américains qui malgré un grand amour pour ces deux genres qui ne date pas d’hier avaient jusque-là toujours réussi à pimenter leur recette grâce à un savant mélange de moments forts au groove particulièrement redoutable et d’instants plus aériens et progressifs (le tout généralement restitué à l’aide de productions abrasives héritées de ces débuts davantage tournés vers le Stoner Rock).
S’il fallait le voir comme le signe d’un retour en grâce, l’artwork signé par l’indéboulonnable cinquième homme d’Elder, j’ai nommé Adrian Dexter, se révèle cette fois-ci bien plus engageant que celui de son prédécesseur qui, pour je ne sais quelles raisons, ne m’a jamais vraiment emballé outre mesure. Alors non, cette seule illustration n’a pas suffit à pleinement me rassurer, par contre cette première écoute, bien que distraite, elle, n’a pas manqué de taper dans le mille. Ne restait alors plus qu’à enchaîner les écoutes avec un petit peu plus d’attention pour voir si cette première bonne impression était effectivement la bonne...
Enregistré et mixé en Allemagne par Linda Dag, jeune ingénieure du son ayant notamment travaillé pour des artistes tels que Pete Doherty, Albert Hammond Jr., The Libertines, Teenage Fanclub, At The Drive In, The Beach Boys ou bien encore Omar Rodriguez Lopez,
Innate Passage est également passé entre les mains expertes de Carl Saff qui pour la septième fois consécutive s’est ici chargé du mastering. Sans grande surprise, le résultat reste fidèle aux derniers standards du groupe en la matière, c’est à dire une production ultra propre et parfaitement équilibrée avec tout de même ce qu’il faut de grain et de rugosité pour apporter un soupçon de caractère et de relief à l’ensemble. Un travail particulièrement soigné qui offre ainsi une évidente compréhension de chaque instrument ainsi qu’une impression de grands espaces sonores pour une immersion complète et réussie.
Malgré un enthousiasme retrouvé, il faut bien se rendre à l’évidence que rien n’a vraiment changé du côté des Américains d’Elder qui poursuivent avec
Innate Passage et ce depuis quelques albums maintenant leur route en terres Stoner Rock / Psychedelic / Progressive Rock. Du coup, si je me montre aujourd’hui bien plus enthousiaste à l’écoute de ce sixième album que de son prédécesseur ce n’est absolument pas parce que je retrouve ici des qualités qui faisaient défaut à
Omens mais parce que la recette semble tout simplement mieux fonctionner avec, notamment, quelques vrais moments forts qui malheureusement avaient quelque peu désertés l’album précédent...
Comme à son habitude (ou presque), Elder nous revient en cette fin d’année 2022 avec cinq nouvelles compositions pour une durée avoisinant toujours l’heure de jeu (durée affichée ici à cinquante-quatre minutes). Et le moins que l’on puisse dire c’est que le groupe a effectivement retrouvé un petit peu de sa superbe grâce à des titres toujours aussi variés dont l’une des particularité est de ne pas répondre à des schémas de compositions trop simples et réducteurs. Une fois de plus le groupe semble en effet s’exprimer sans contrainte, allant où bon lui semble, étirant certaines séquences à sa guise, accélérant le rythme ou corsant le ton lorsque l’envie s’en fait sentir et cela sans donner le sentiment de forcer. C’est là l’une des principales qualités des Américains, donner à leur musique et à leurs compositions cette espèce d’aisance insolente qui la rend parfaitement séduisante lorsqu’elle est, comme c’est le cas ici, couplée à un jeu doté d’un groove particulièrement entrainant duquel découle une efficacité non pas redoutable mais plus sournoise car s’installant avec le temps, au fur et à mesure.
Considéré par beaucoup comme l’élément le plus faible chez Elder, Nick DiSalvo limite une fois encore ses interventions vocales au strict minimum. Si à titre personnel, son chant ne m’a jamais posé aucun souci, je peux comprendre que le caractère un petit peu trop lisse et passe-partout de ses vocalises en fasse l’élément le moins remarquable de la musique des Américains. Dans le cas d’
Innate Passage, le souci vient surtout d’un problème de mixage ne lui permettant pas de prendre l’ascendant lors des quelques instants où celui-ci intervient. En effet, son chant mélodique et aérien placé à peu près au même niveau que les autres instruments (si ce n’est même un poil en retrait par moment) a malheureusement bien du mal à briller et donc à contribuer significativement à l’ensemble. Attention, il n’y a là à mon avis rien de rédhibitoire et cela se ressent surtout si l’on décide d’y prêter attention.
Pour le reste, et comme dit plus haut, on retrouve ici un Elder inspiré, heureux de jouer et de nouveau soucieux d’embarquer avec lui l’auditeur qui ne manquera pas de tomber sous le charme de ses longues séquences instrumentales, quelles soient placées sous le signe d’un Rock Psychédélique et Progressif évoquant toujours autant Pink Floyd ("Catastasis" à 2:24 et 5:39, "Endless Return" à 4:06 et surtout 5:50, "Coalescence" à 2:03, les deux premières minutes de "Merged In Dreams - Ne Plus Ultra" puis ensuite à 5:30, "The Purpose") que sous le signe d’un Stoner Rock plus direct et abrasif comme c’était davantage le cas sur ses premiers albums ("Catastasis" à 0:54, 3:36 et 8:54, "Endless Return" à 2:12, la première partie de "Coalescence" puis de nouveau à compter de 6:06, "Merged In Dreams - Ne Plus Ultra" dans ses instants les plus vifs). Dans les deux cas, on se régalera de ce groove retrouvé qui, s’il n’avait bien évidemment pas disparu, ne m’avait pas autant séduit chez son prédécesseur, de ces arrangements mélodiques soignés et jamais trop prononcés (les synthétiseurs, toujours aussi subtiles et utilisés à bon escient), de cette basse ultra dynamique qui sans prendre trop de place ne peine jamais à s’exprimer et à nous faire ainsi profiter de ses délicieuses rondeurs saturées et bien entendu de ces guitares impeccables qui tricotent, tissent et déroulent leurs riffs plus ou moins alambiquée avec une facilité et un feeling tout à fait délectable. À cela s’ajoutent également quelques solos forts sympathiques comme ceux présents sur "Catastasis" à 8:54, "Endless Return" à 2:12 et 7:41, ou "The Purpose" à 5:54 qui à leur manière apportent une dimension encore un petit peu plus dynamique à ces compositions qui pourtant par ce groove et cette alternance de registres ne manquent pas d’allant.
Bref, je vais éviter de m’étendre trop longtemps sur le sujet au risque probable de me répéter mais vous l’aurez compris,
Innate Passage s’avère en ce qui me concerne bien plus concluant que son prédécesseur certes sympathique mais finalement assez peu marquant dans l’ensemble. Sur ce sixième album, les moments mémorables ne manquent pas et on retrouve tout ce qui fait le charme d’Elder depuis maintenant quelques années maintenant à commencer par des riffs aux petits oignons, un groove toujours aussi efficace et irrésistible, des compositions variées qui évoluent et progressent au fil des minutes et cette impression d’avoir face à nous un groupe dont la formule pourtant complexe et élaborée semble couler de source. Bref, après un petit coup de mou heureusement passager, les Américains ont ici retrouvé les clefs du succès et ce n’est certainement pas moi qui vais m’en plaindre.
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