Warfuck. Guerre de baise, ou baise de guerre ? Peu importe, le nom est fleuri, et les intentions claires.
J'ai commencé, recommencé ce papier un sacré paquet de fois - d'où sa parution un poil tardive. Soit parce qu'il tirait un peu trop en longueur, soit parce que j'avais la désagréable impression de ne pas en dire assez, de ne pas rendre suffisamment justice à ce
"Diptyque", quatrième
full-length du duo Lyonnais, paru fin Avril chez Lixiviat Records. Toujours difficile d'écrire sur un disque de Grindcore, finalement, d'aller au-delà du
"ça gueule, ça blaste, c'est cool" -
mantra simplet qui reste ce que nous recherchons tous dans le genre. Allez, cette fois, c'est la bonne. Ouvrons les hostilités avec trois phrases bien péremptoires, qui s'imposent naturellement une fois les vingt-trois minutes digérées.
Oui,
"Diptyque" est, de loin, la meilleure sortie de
Warfuck.
Non, absolument rien n'est à jeter dans ces dix-neuf nouvelles compositions.
Oui, il me semble quasi-impossible de faire plus abouti en matière de Grindcore cette année.
Chronique terminée ? Naaaaaan. On va quand même faire l'effort d'aller un peu plus loin. Surtout vu le chemin parcouru, et les points pris par Nico et Mak depuis
"The Weak and the Wicked" (2012) et
"Neantification" (2013). Et pour une fois que le contenant est au moins aussi solide que le contenu, on va pas se gêner ! C'est Hugo Charpentier
*, déjà coupable de la pochette de l'album précédent de
Warfuck,
"This was supposed to be fun" (2018), qui rempile derrière les pinceaux pour habiller
"Diptyque" d'un superbe salmigondis. Deux visages pour deux membres, labyrinthe dégoulinant, confus, tout de noir et de bleu - les couleurs d'un beau coquard qui enfle.
Déjà cinq ans depuis la dernière sortie, et il s'en est passé, des choses ! Un belle et longue interview du groupe, donnée dans les colonnes du canard Good Guys Go Grind
*, nous en apprend un peu plus tant sur la genèse que le "concept" de cette nouvelle fournée. Majoritairement composé début 2020, durant la première vague de COVID, guitare, basse et batterie de
"Diptyque" furent mises en boîte en trois jours d'Août 2021, dans le
home studio de Mak - et la voix ? Cinq mois plus tard, en Janvier 2022. Un mix confié à William Blackmon (Overlook Studio) et un
master signé de l'omniprésent Brad Boatright (Audiosiege) plus tard, voilà l'objet, l'obus, la tête nucléaire prête à s'abattre sur une foule bouche béante, prête à savourer à la raclée.
"La vitesse moyenne sur ce disque est d'environ 250/260 bpm."
Et putain, quel pied. Je ne vois pas quoi dire d'autre pour résumer ces nouveaux titres.
Warfuck fait honneur tant à son nom qu'au genre tout entier. C'est que
"Diptyque" concentre absolument
tout ce que connaisseur et curieux peuvent rechercher dans le genre : du blast-beat au kilomètre, un étalage de riffs qui font relever la narine et froncer les sourcils, des compositions qui, "Fimencer" mis de côté, ne dépassent pas les deux minutes... Et des bonnes idées à la pelle ! C'est là que nos deux compères font fort. La concision de leurs frappes ne les empêchent jamais d'incorporer des tournures particulières, des breaks tonitruants, et des
samples de morveux et autres gens pas forcément très éveillés qui sont autant de respirations bienvenues au milieu d'un déluge de coups. Grand galop suivi de
mid-tempo tentaculaire, avec un Nico qui régale de son chant délicieux, entre glapissements hystériques et raclements de gorge forcés, terrifiants : "Marvers", qui ouvre le disque, a le mérite de plonger directement dans le bain d'acide.
"Diptyque" oscille entre agressions purement frontales (les monstrueux "Pansemental", "Lavaune", "Sament" ou "Malopre" en sont de bons exemples) et
tracks taillées pour faire remuer le fondement : d'un groove irrésistible ouvrant "Embêtard" jusqu'au
"La vie est si belle, les yeux fermés les oreilles bouchées" qu'on reprendra tous en cœur comme des ânes lorsque le groupe défendra "Ignolve" sur les planches, passant par les
D-beats obèses d'un "Piur",
Warfuck a su varier son jeu. Pédaler tête dans le guidon ? Oui, mais avec style, Monsieur.
Parlant de style, de classe, on mentionnera d'abord les quelques
featurings parsemant son nouvel opus, entre Ugo Wuul et Commissaire (
Lovgun) sur "Ignolve", Giny (
LØVVE) sur "Trego", un solo de Math (
Obnoxious) habillant "Sament"... Et surtout, Pibe (
Buffet Froid, mais surtout
Whoresnation) sur l'excellent titre de clôture, "Grichélisé", gourmand mélange de Hip-Hop de schlag sur fond sonore écrasant, dispensant quelques punchlines tant débiles (
"Ordre et sécurité, mais au Lidl vous resquillez") que bien senties (
J'ai pas l'esprit manichéen / mais mate les gens c'est tous des chiens / tu jettes la balle ils ramènent rien"). Parlant des paroles, on ne pourra que chaudement recommander d'acheter l'album en dur pour pouvoir se pencher sur ces dernières, cadavres exquis tantôt revendicatifs, tantôt amers, cerise sur le gâteau d'un disque qui reste solide de la première à la dernière seconde.
Puisqu'on commence à dangereusement tirer en longueur... Faisons simple, en guise de conclusion à la copie double.
Si tu écoutes
"Diptyque", et que tu n'aimes pas
"Diptyque", c'est que tu n'aimes pas le Grindcore.
Et si tu n'écoutes pas
"Diptyque", tu risques de passer à-côté de ce qui va naturellement s'imposer comme
la sortie Grindcore de l'année.
Ni plus, ni moins.
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