Bon, j’ai l’impression que nous allons plus parler histoire que musique avec cette chronique. Tout d’abord l’histoire méconnue d’un groupe ancien, et ensuite l’histoire méconnue d’un pays ancien. Allez, c’est parti, on présente
INFERNAL NECROMANCY, formation du Japon...
Ceux qui me connaissent depuis un moment en ont sûrement déjà entendu parler puisque c’est l’un des groupes japonais pour lequel j’ai toujours eu le plus de respect. C’est Psychoblaze qui l’a formé au milieu des années 90, après avoir découvert
DISSECTION,
EMPEROR,
BURZUM et
DARKTHRONE. Il a enchaîné les démos près d’une dizaine d’années avant d’enfin sortir son premier album en 2008. Les fameuses démos ont été réunies sur trois compilations parues en 2011, puis l’activité a été à nouveau très réduite les années suivantes. Quelques nouveaux morceaux sont parus, mais ils n’ont servi qu’à remplir des EP et des splits.
富国強兵 (Fukoku Kyôhei), qui sort en 2023, n’est donc que le deuxième véritable album du Japonais. Psychoblaze y assure la basse et les vocaux mais les guitares reviennent à un revenant, le Sergeant the Ananiel qui appartenait à
INFERNAL NECROMANCY entre 1997 et 2004. La batterie est quant à elle toujours assurée par le fidèle Gigantess, cet ami de longue date rencontré lors d’un job étudiant.
L’album s’appelle donc
富国強兵 (Fukoku Kyôhei), et il renvoie une nouvelle fois à l’histoire du Japon. On se souvient évidemment que le premier album éponyme revenait sur la deuxième guerre mondiale, soulignant les sacrifices que les Japonais avaient dû concéder. J’avais d’ailleurs interrogé le leader du groupe en 2015, et il m’avait expliqué pourquoi ses thématiques tournaient autour de son pays et pouvaient sembler s’apparenter à du nationalisme :
« Les chansons récentes du groupe parlent de l’Armée Impériale japonaise et de la deuxième guerre mondiale dans l’Asie de l’Est. Nous vivons dans un pays en paix, mais il y a eu des temps atroces qui dépassent l’imagination. Nos aînés qui ont vécu la guerre ont connu une vie violente, faite de douleurs, et quand je compose c’est à eux que je pense. Au Japon, on n’apprend pas vraiment l’histoire contemporaine. Et surtout on ne nous donne pas de précisions sur la Guerre... (...) Alors j’ai choisi ces thèmes en espérant que les auditeurs s’intéresseront ne serait-ce qu’un peu à l’Histoire, à cette guerre. Je voudrais qu’ils prennent conscience que si le Japon est en paix maintenant c’est parce qu’il y a eu ces événements et des gens qui se sont battus et que nous nous devons de les remercier. »
Eh bien peu de changements dans cette orientation, car le nouvel album parle à nouveau de cette période où le Japon était impérialiste, qu’il visait la prospérité et l’extension. Le titre de l’album lui-même renvoie à un slogan qui a marqué l’ère Meiji (1868-1912). Il se traduit par « Enrichissement du pays, renforcement de l’armée ». L’objectif était surtout de marquer l’envie du pays d’atteindre un rang et une reconnaissance mondiaux, d’abord en se mettant à jour au niveau industriel, économique et militaire.
Voilà, nous arrivons enfin à l’album et à la musique en elle-même. Et là, les fans du groupe devraient avoir une petite déception en regardant le nom des 8 morceaux. Beaucoup sont déjà connus et cet album compile finalement des compositions qui se trouvaient sur les splits et EP sortis ces 11 dernières années... Vous vous souvenez de
Hikari to Yami, le split avec
KANASHIMI que j’avais chroniqué en 2012 ? Il contenait 4 titres d’
INFERNAL NECROMANCY... 3 sont repris ici ! « 布告 » (Fukoku), « 我、咲に » (Ware, Saki ni) et « 富嶽 » (Fugaku). Vous vous souvenez de l’EP
キスカ de 2015 ? Il avait 2 morceaux. Ils sont là. « キスカ » (Kiska) et « 八甲田 » (Hakkoda). Et en 2022, il y a eu un split avec
YVONXHE,
MASS KONTROL GENOCIDE et
FRA HEDENSK TID.
INFERNAL NECROMANCY y jouait deux morceaux : « 雪風 » (Yukikaze) et « 爾霊山 » (Nireisan)... Eh bien ils sont là aussi. Oups, ça fait déjà 7 morceaux sur 8 qui étaient déjà connus ! Il reste « 旭日 » (Kyokujitsu). Il est inédit ! Bref, un album qui est plutôt une compilation, mais bon, pour celui qui n’a pas suivi l’actualité du groupe depuis longtemps, tout semblera nouveau...
De plus, il faut noter que des petites différences apparaissent dans les morceaux, ils ont été rejoués, sans être nécessairement « améliorés ». Pas dans le sens qu’ils proposent une meilleure production, parce que ce groupe japon a toujours revendiqué un son cracra, un lo-fi volontaire qui nargue les amateurs de beauté, de technique et de pureté.
INFERNAL NECROMANCY aime les mélodies, mais il aime les apporter dans la douleur et la souffrance. Il joue donc un black metal très régressif, insupportable pour tous ceux qui croient qu’il faut jouer « comme en 2023 en 2023. » Là, non, on joue plutôt comme en 1993 en 2023. Le groupe a au moins trente ans de retard et s’en contrefout totalement. Il a la qualité sonore d’un
MOONBLOOD, les vocaux et la folie d’un
THE ARRIVAL OF SATAN, les riffs d’un... générique de dessin animé ?! Non, pas tout le temps, mais il y a vraiment des titres qui tirent vers la même énergie lumineuse... Bien sûr, le résultat est du black metal, mais il suffirait de quelques ajustements pour les transformer en BO de DA...
Quoi qu’il en soit, le groupe fait partie de ma culture profonde, de mes partenaires musicaux depuis de nombreuses années. J’ai une affection particulière pour lui, qui fait que je peux lui pardonner des petits défauts. Il n’est pas du genre à convaincre tous les publics, mais il saura satisfaire ceux qui écoutent plus avec leur coeur qu’avec leurs oreilles ou leur cervelle...
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