« Funeral Grind ». Simple, basique, efficace – évocateur en Diable. Finalement, en relisant mon papier, je me dis que c’est au groupe lui-même que l’on doit la meilleure description de
« As Spoken ». Quel intérêt de développer quand deux mots résument à merveille un disque ?
En plus, mes confrères anglophones se sont déjà largement chargés de chanter les louanges de ce troisième album de
Knoll, à peine trois ans après le premier,
« Interstice », et un peu moins de deux ans après
« Metempiric ». Rythme effréné, que ce soit en termes de parutions et de tournée, les jeunes Tennesséens (oui, c’est le gentilé en vigueur) passant plus de temps sur les routes d’Amérique et d’Europe qu’auprès de leurs compagnes. Il faut bien ça, lorsque l’on fait le choix d’être complètement indépendant, de gérer le
booking, le pressage, le merch, sans intermédiaire, et pouvoir en (sur)vivre. Jamie Eubanks, frontman de la troupe, semble en tout cas savourer cette vie passée au cul du van, ces semaines sans sommeil, ces journées en studio sans voir la lumière du jour :
« dropped out of college to play Grindcore, no regrets », comme il le dit si bien.
Sans surprises vu la note qui le sanctionne, je vais me joindre à l’atelier
« tressage de lauriers » :
« As Spoken » est une dinguerie, un sacré palier franchi, un aboutissement, et l’album de la consécration - Même si cette formule toute faite est abominable, elle a le mérite d’être claire. Après deux albums déjà hautement recommandables, mais pas des plus personnels,
Knoll trouve sa patte, sa production, son univers, quitte enfin son statut de sosie officiel/clone officieux de
Full Of Hell - même si la formule me convenait plutôt pas mal, la bande de Dylan Walker peinant de plus en plus à me convaincre. Et il le fait de la plus belle des manières : nous étions (très) nombreux à attendre ce nouvel opus de la formation, et autant à être persuadés qu’il ne pourrait qu’être bon, suivant
a minima le sillon creusé par ses grands frères. Le quintet surpasse absolument toutes mes (nos ?) espérances en produisant un disque à la fois ambitieux (40 minutes, tout de même) et
cohérent, musicalement… Comme visuellement.
Sérieusement, le disque serait presque à prendre comme une œuvre multimédia : la pochette sibylline (réalisée par le groupe) les clips (réalisés par Jamie) accompagnant « Unto Viewing », « Portrait », « Mereward » et le morceau-titre, tout concourt à plonger l’auditeur dans cette ambiance Victorienne, entre figures exsangues qui rotent la poussière et vision d’horreur surréaliste à la
« Begotten ».
Knoll s’est donné les moyens de ses ambitions, et c’est réussi, indéniablement.
« As Spoken » s’impose d’ores et déjà comme l'un des albums de l’année, et, naturellement, comme le point culminant d'une discographie assez irréprochable.
« Funeral Grind » : on y revient, comme une évidence. Dix petites secondes d’un souffle menaçant avant d’être plongé, sans ménagement, dans un tesseract scabreux. Ce titre d’ouverture est d’ailleurs un excellent résumé de ce que les onze titres de l’opus dissimulent – du Grindcore complètement dément, empruntant tant au Death Metal qu’à la Noise, fruit d’une union bâtarde entre un
Full of Hell en forme olympique et un
Portal, moins abstrait, mais plus licencieux que jamais (flagrant sur l’excellent « Wept Fountain »).
Knoll devient
vicieusement intelligent : tout ce qui pouvait sembler avoir été glissé au forceps sur les sorties précédentes coule ici de source, (contre-)naturellement. La trompette, jouée par Ryan Cook, apporte une touche surréaliste qui participe à l’atmosphère fiévreuse (« Revile of Light ») ; les nappes bruitistes empruntent moins à la Noise qu’au Dark Ambient (la fin glaçante de « Unto Viewing »), poursuite du cauchemar éveillé plutôt que respirations bienvenues – ou agressions sonores gratuites. Aux titres qui cavalent tête baissée succèdent des compositions lourdes, lentes processions aux riffs chancelants, qui en viendraient même à être plus convaincantes que les grands-galops pour lesquels nous avions signé – la doublette « Offering » (et son double charleston vaporeux) / « Mereward » (et ses
bends de cordes déments) est proprement sidérante, de la même manière que "Shall It Be", qui clôt les hostilités. Si les brèves explosions sur lit de
blast beats sont toujours les bienvenues (« Fettered Oath » est une sacrée leçon en la matière), c’est lorsque
Knoll prend le temps de développer son propos qu’il est le plus convaincant. « Portrait », titre le plus long de ce nouvel opus, est ainsi le meilleur. Lente procession de flagellants capuchés (bah tiens, le groupe tournait ce début d’année avec
Thantifaxath…), pesant comme une veillée funèbre, menaçant comme jamais.
J'en parlais déjà dans mes papiers précédents, si
Knoll est une somme d'individus extrêmement talentueux, appliqués dans l'horreur (mention spéciale au jeu de batterie de Jack Anderson, qui gagne en finesse comme en assurance), le combo ne serait rien sans l'incroyable intervention de son frontman. Les reptations vocales de Jamie Eubanks se font, sur
"As Spoken", plus inhumaines que jamais - le voir sur scène doit être une sacrée expérience. Vociférations étranglées, grondements sourds, chuchotements fiévreux, hurlements hystériques... Strepsils en sueur, clairement.
« Funeral Grind », une fois de plus, pour conclure cette bafouille. Ou plutôt,
"Endless toil / Inhuman goal", les deux derniers versets du disque. Parce qu'ils le résument à la perfection : à force de tournées, d'expérimentations, de travail et surtout de passion (au propre comme au figuré),
Knoll signe ce qui s'impose comme une sortie majeure de cette année - et comme son meilleur disque, mais ça, tu l'auras deviné. Gageons que cet
"As Spoken" finisse d'affirmer le groupe en tant que tête d'affiche, et non plus comme un simple
opener.
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