Il était une fois une jeune roturière, qui composait des sérénades sur sa Fender Stratocaster. Perchée sur un arbre mort, elle s'exerçait sur un vieil hymne viking, "Thus Spake the Nightspirit", quand sa matrone vint la trouver, un panier garni sous le bras. La jeune fille, qui cachait son visage blafard sous un épais chaperon noir, savait que l'heure était venue d'aller trouver grand père. Le vieil homme, qu'on avait chassé du village pour une sombre histoire d'église incendiée, vivait au plus profond de la forêt, là où personne ne s'aventurait de peur d'être violé par la bête.
LA MATRONE
(déposant la corbeille au pied de l'arbre)
"Rend toi utile gueuse, va apporter ce petit pot de beurre de cacahuète au sac d'os. Et si par St Vitus il avait cassé sa pipe, ramène moi son écran plasma. J'ai toujours rêvé de voir Thierry la Fronde en HD.
LE PETIT CHAPERON NOIR
Six packs de Kro qu'il est encore en vie.
LA MATRONE
Tenu ! et n'oublie pas ton semi automatique, on raconte que le loup a encore mangé quelques malheureux saltimbanques."
La jeune fille avait eu vent de cette histoire, de ces pauvres boys bardes perdus dans la forêt qui trouvèrent la délivrance entre les crocs acérés du croquemitaine local, un redoutable prédateur à poils longs qui agressait la population depuis une bonne décade. Quittant son perchoir, le petit chaperon noir emprunta un sentier qui serpentait jusqu'à la lisière des arbres. Ce sombre domaine était un havre de tranquillité pour la jeune fille, qui pouvait y fredonner des airs de BRODEQUIN sans risquer le bûcher et la chaux vive. Tout en grognant les paroles de "Spinning in agony", le petit chaperon noir guettait en vain l'apparition de grandes oreilles derrière les fourrés. Bientôt, le petit chaperon aperçu l'antre du grand père, un vieux local de répétition, abandonné depuis la chute de l'empire thrash à l'aube des années 90. La jeune fille frappa 666 coups à la porte d'entrée.
LE GRAND PERE
"Qui est là ?
LE PETIT CHAPERON NOIR
C'est dark chaperon. Je t'amène de la 1664.
LE GRAND PERE
Ah ! et mon beurre de cacahuète ?
LE PETIT CHAPERON NOIR
Nan, j'ai tout donné aux corbeaux. Mais il reste de la sauce tex-mex et des tapas. Pourquoi tu portes une minerve ?
LE GRAND PERE
C'est à force de headbanger mon enfant.
LE PETIT CHAPERON NOIR
Je vois. Et le jean troué, les converses sans lacets, c'est pour faire jeune ?
LE GRAND PERE
Mais c'est pour mieux thrasher mon enfant !"
Depuis des années que sa petite fille venait lui apporter de la bière et des revues friponnes, jamais le vieil homme n'avait réussi à la convaincre que ce qu'il y avait de mieux en ce bas monde, c'était le thrash. La jeune fille, qui ne jurait que par le black et le TXDM, moquait les berceuses de l'ancêtre, qu'elle trouvait trop mélodiques et commerciales. Fatigué d'argumenter dans le vide (et pressé d'attaquer les tapas), grand père sortit de sa manche une carte maîtresse, un vinyle poussiéreux aux allures de Saint Graal : "Pleasure to kill", deuxième album des légendaires KREATOR.
LE PETIT CHAPERON NOIR
"Ah ah ah ! ce démon à cornes, comme c'est kitch ! en plus, il est même pas en images de synthèse.
LE GRAND PERE
C'est toujours mieux que le visuel de Dance of Death petit chaperon ! écoute un peu ça."
Tandis que résonnèrent les premières mesures de Pleasure to kill et que la jeune fille moquait la mollesse de l'introduction, son grand père lui rappela qu'en ces temps reculés, il était de bon ton d'amadouer l'auditeur avec un peu de mélodie avant de laisser libre cours aux débordements métalliques, comme METALLICA l'avait si bien fait sur "Fight fire with fire" et "Battery". Après avoir encaissé de plein fouet les terribles "Rippin corpse" et "Death is your saviour", dark chaperon cessa de railler le groupe germain. Le bombardement en règle de Ventor, bien décidé à abattre le mur de Berlin avant l'heure, les riffs assassins et les solos en dérapage contrôlé de Mille conféraient à la chose un attrait certain, malgré une production peu portée sur les basses signée Harris Johns (CORONER, TANKARD). De même, l'excellent "Riot of violence" mettait un terme momentané au pilonnage incessant du batteur pour décocher des rythmiques en crochets du droit à mettre K.O. une armée de non initiés.
La jeune fille fut également séduite par le soin apporté aux riffs, tous très inspirés, et passa outre les solos bordéliques pour ne retenir que le caractère primitif et violemment incisif de la chose. L'alternance de voix entre frontman et batteur était ici brillamment reconduite, et l'évolution entre "Pleasure to kill" et
"Endless Pain" était saisissante ; beaucoup plus carré, extrêmement rapide, l'album gommait une bonne partie des défauts qui entachaient leur sortie précédente. Pour sa seconde tentative, KREATOR livrait un album jusqu'au boutiste qui resterait dans l'histoire comme un de leurs plus haut faits d'armes. Alors que les quatre larrons (le groupe ayant recruté un guitariste supplémentaire, Tritze) remettaient les bouchées de double pédale sur leur dernière tuerie, "Under the guillotine", le petit chaperon noir pria son grand père de lui prêter ses prothèses auditives. Album d'usure, ce deuxième méfait discographique tenait effectivement autant du défouloir que du pugilat, à la façon d'un "Utopia banished" (NAPALM DEATH). Mais grand père, que l'absorption abusive de tacos avait déchaîné, s'était rompu le cou à force de headbanging sauvage sur "Command of the Blade".
Un peu déçu d'avoir perdu son pari et six packs de kros, dark chaperon s'en retourna au village, "Pleasure to kill" sous le bras. Au détour d'un sentier enlacé par l'ombre grandissante d'arbres complices, le loup se jeta sur elle. La jeune fille, dopée aux deathamphétamines par l'écoute d'un chef d'œuvre intemporel du thrash, esquiva l'attaque de la bête et recula de trois pas, pointant sur le loup son semi automatique.
LE PETIT CHAPERON NOIR
"Arrière créature ! un pas de plus et je te change en OGM !
LE LOUP
Ah ah ah ! remballe ton jouet petite, seul l'argent peut me tuer !
LE PETIT CHAPERON NOIR
Un loup garou ! cette fois c'est la fin ! jamais je n'assisterai à la reformation de CARCASS !"
Se pourléchant les babines, le loup garou saisit le petit chaperon par le col de sa veste. Alors que tout semblait perdu pour la jeune fille, un mystérieux sauveur fit irruption dans le dos du loup. C'était ce bon vieux Kevin Costner, 213 fois nomminé aux Oscars.
KEVIN COSTNER
"Alors Chaussette, encore en train de faire chier ton monde ? laisse la demoiselle tranquille ou tu seras privé de steack !
CHAUSSETTE
Ouah ! ouah !"
Chaussette délaissa le petit chaperon et s'en retourna vers son maître, qui fit danser le loup en agitant une entrecôte saignante au dessus de sa gueule. La jeune fille, serrant son vinyle de KREATOR dans ses bras tremblants, ne quittait pas Kevin Costner des yeux, lequel entraînait Chaussette à distance raisonnable.
KEVIN COSTNER
(se retournant vers le petit chaperon)
"Un excellent disque ! si tu n'avais pas porté cet album sous le bras, j'aurais peut être laissé Chaussette te bouffer ! personnellement je préfère
"Terrible Certainty", qui est bien plus technique tout en restant très agressif ! keep on thrashing !"
Le petit chaperon noir, qui devait son salut au thrash vintage de grand père, partit sans demander son rust in peace, jurant devant Satan d'investir dans une veste à patches. Chaussette, bien en peine d'avoir laissé échapper la jeune fille, se consola en dévorant toute entière la caravane itinérante de l'académie des étoiles.
10 COMMENTAIRE(S)
27/08/2016 02:27
04/06/2012 20:49
09/02/2009 16:41
The best fuckin album de Kreator quoi. L'album qui m'a définitivement converti au Thrash.
13/04/2008 05:31
24/03/2007 20:20
18/03/2007 00:12
C'est vrai qu'il déchire bien Coma of Souls, il a pas pris une ride. Mon préféré reste Renewal, le 1er Kreator que j'ai écouté à l'époque.
17/03/2007 23:27
17/03/2007 19:55
Fait ! Ca sera pour le deux à paraitre bientôt
Sinon, excellente kro
17/03/2007 16:09
17/03/2007 15:45