Ontogeny - Pillars Of Perversion
Chronique
Ontogeny Pillars Of Perversion
Ce qu'il y a de bien avec Thrashocore, c'est que l'on peut rapprocher un album que l'on va chroniquer de groupes totalement underground, mais dont ici, tout le monde a entendu parler.
Prenons par exemple ce premier album des américains d'Ontogeny. Si je disais sur un webzine plus généraliste que ce Pillars of Perversion sonne comme un album d'Element, je pourrais m'attendre à ce que la majorité de mes lecteurs lèvent un sourcil d'étonnement.
Et avec Thrashocore, je sais que ce ne sera pas le cas. Merci Thrashocore.
Si toutefois, le doute vous habitait encore, sachez qu'Ontogeny pratique au même titre que Element, Odious Mortem, Spawn Of Possession et quelques autres un brutal death technique efficace et accrocheur, avec un chant très profond, parfois un peu plus criard, et qui ne tombe jamais dans la facilité du gruik de bas étage. Mais bien loin d'un simple clone de ces quelques confrères, Ontogeny a su apposer sa patte sur un style pourtant relativement étriqué.
Aussi étonnant que cela puisse paraître, les trois musiciens du groupe jouent tous dans un autre projet de death metal. Le chanteur ainsi que le guitariste/bassiste jouent dans un obscur groupe de death mélodique nommé Sol Asunder, et le second guitariste officie dans l'un peu plus reconnu Anomalous, groupe de brutal deathcore technique barré (oh la belle étiquette à rallonge).
Mais je vous entends d'ici : mais où est passé le batteur ? Et bien il n'y en a pas ma bonne dame, ce qui dans la majorité des cas signifie malheureusement qu'une boîte à rythmes mal programmée et totalement inorganique va venir gâcher ce qui aurait pu être un bon album de death metal. Et bien je vous rassure tout de suite, si il y a effectivement une boîte à rythmes, elle est programmée d'une manière absolument exemplaire, à tel point que l'on oublie vite qu'il n'y a pas d'homme aux baguettes tant le mimétisme est saisissant.
Et il faut bien l'avouer, si cette réussite est possible, c'est bien grâce au style de composition du groupe. Et si j'ai cité au début de cette chronique Element, Odious Mortem et Spawn Of Possession comme groupes assimilables à Ontogeny, il faut bien reconnaître que nos californiens jouent beaucoup moins la carte de la technicité.
En effet, si parmi les groupes susnommés on n'est pas avare de leads toutes les trois mesures, de changements de tempo et de blasts à la vitesse d'un TGV Paris-Strasbourg, force est de constater que c'est beaucoup moins le cas pour Ontogeny. Oh, n'allez pas pour autant croire que vous pourrez reprendre les neuf morceaux qui composent l'album en trois mois de guitare – ou alors entre nous, vous êtes très fort – mais l'on y trouve beaucoup moins de variations de tempo, et la débauche de notes est ici délaissée au profit d'une grande efficacité.
On retrouve bien entendu tout au long de l'album de nombreuses lignes de tapping et de sweeping à dix-huit doigts, mais l'essentiel des morceaux est basé sur des riffs simples et accrocheurs tout droit hérités des classiques du death metal. A noter tout particulièrement les magnifiques lignes de sweep sur la fin de « Divine Deviation » et le superbe refrain dans le plus pur style Neuraxis sur le très long « Congregating Coffins ».
Tout cela permet que la programmation de la boîte à rythmes soit à la fois simple et efficace : de longues parties de double grosse-caisse sur les passages rapides et soutenus, des roulements sur les breaks, et des matraquages de cymbales en règle pendant les parties saccadées. Simple, efficace, accrocheuse, la recette fait nécessairement mouche, et Ontogeny, en répétant jusqu'à l'usure certains couplets, n'aura pas grand peine à conquérir même l'auditeur le plus réfractaire à la technicité – ce qui vous l'admettrez, est proprement scandaleux de la part d'un de mes lecteurs.
Malheureusement cette relative simplicité d'orchestration est aussi le principal point faible de l'album, car si l'efficacité est au rendez-vous, elle se fait parfois au détriment de la sacro-sainte mélodie et laissent placent à des saccades bien trop longues, qui ne manqueront pas d'irriter l'auditeur réfractaire à ce penchant pour le moins simpliste du death metal. Un travers qui rapproche un peu trop à mon goût Ontogeny d'un Anomalous.
Heureusement, ces passages minoritaires ne sont assez longs pour agacer que sur les morceaux « Embrace Atrophy », « Pillars Of Perversion » et « Processed Madness ».
Mais ce qui personnellement a le plus retenu mon attention dans cet album, c'est l'impression d'entendre une œuvre musicale extrêmement cohérente (tous les morceaux ont la même base de brutal death technique) dans le désordre le plus total, un peu comme si vous écoutiez les Quatre Saisons en appuyant sur la touche shuffle….
En effet, « Exterminate The Merciful », qui est le morceau d'ouverture de Pillars Of Perversion, est, tout comme les deux morceaux qui le suivent, très brutal et rapide. Mais le quatrième morceau « Embrace Atrophy » est quant à lui beaucoup plus mélodique, tout comme les morceaux six et huit, respectivement « Divine Deviation » et « Congregating Coffins ». Le septième morceau, « Pillars of Perversion » et le dernier « Processed Madness », plutôt brutaux et saccadés se rapprochent eux des premiers morceaux. Vous n'y comprenez rien ? Et bien vous n'êtes pas le seul.
Oh, bien sûr, tout cela peut sembler bien futile, mais cette impression d'incohérence est totalement renforcée par le quasi-instrumental Wake, en cinquième position, c'est-à-dire en plein milieu de l'album… Et, je vous le mets dans le mille, cet instrumental - se terminant par un fade-out alors que le morceau suivant départ à toute berzingue - n'est composé que de deux guitares qui se contentent d'une longue et très belle ligne d'arpèges, ultra mélancolique et qui vous fera assurément pleurer si votre tatie Danièle vient de mourir dans un tragique accident impliquant un chat et trois tonnes de bibelots suspendus au dessus du tiroir à punaises. C'est d'autant plus dommage que ce morceau vienne donner un coup de frein à l'album car il lui aurait fait une superbe conclusion, tout comme l'est celle du premier Element…
Heureusement, l'unité du tout fait que le plaisir d'écoute demeure parfaitement intact, et ce défaut mineur ne saurait entâcher un album de très haute qualité. Je passerai donc rapidement sur la production quasi-exemplaire pour une autoprod, où seul un important flux constant de graves fait que la basse n'est pas audible. Une production death metal en somme.
Donc pour résumer, si vous aimez les nombreux groupes cités dans cette chronique, Element, Odious Mortem et Spawn Of Possession en tête, sachez que ce Pillars of Perversion ne fait honte au génie – il fallait bien que je la fasse – de ses illustres aînés.
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