Alaska puis
Colors... Le schéma aurait dû placer en toute logique le cinquième album (sans compter l'album de reprises
The Anatomy Of et le DVD/CD live
Colors Live) de Between The Buried And Me (BTBAM) parmi les chefs d'œuvres du siècle. La tâche était titanesque : comment surpasser le divin
Colors ? Sceptique pour ma part et encore sous le charme de leur dernier effort, je n'exigeais pas un tel résultat. Pourtant la bande tête à claques de la Caroline du Nord, au line-up et au producteur (Jamie King ou le sixième membre du groupe) identiques, avait bien toutes les billes pour sortir une nouvelle bombe metal/rock. Les éloges du frontman Tommy (« some of the best material we've ever created ») et le temps de composition (un an et demi de peaufinage) auraient pu laisser penser à une autre claque. Je tiens d'ailleurs par avance à m'en excuser, mais impossible pour cette chronique de ne pas comparer à outrance
The Great Misdirect avec son aîné
Colors, certainement l'un des meilleurs albums de cette décennie pour ma part (mon premier 9.5 du nouveau millénaire).
Si la transition entre
Alaska et
Colors en aura bluffé plus d'un,
The Great Misdirect reposera sur les fondations de son prédécesseur. Aucune surprise donc à première écoute sur ce metal fourre tout associé au rock progressif 70's (King Crimson en tête). Et déjà le travail herculéen de composition se fera sentir. Ceux qui avaient du mal à digérer les « pavés titres » de
Colors devraient suer face à l'heure de ce
The Great Misdirect (6 titres uniquement au compteur dont les 17 minutes du titre final). BTBAM met effectivement la barre extrêmement haute. Les structures sont bien plus complexes et la technicité époustouflante monte d'un cran. Sorte de retour vers les bordéliques, techniques et violents
Alaska et
The Silent Circus mais dans l'esprit rock de
Colors en résumé. Comme d'habitude il vous faudra un nombre d'écoute incalculable avant de pouvoir appréhender les structures et une bonne partie des arrangements proposés par chaque musicien. Et je dis bien « chaque musicien », que ce soit les effets au clavier de Tommy, le jeu de batterie richissime de Blake (une vraie bouffé de fraîcheur), les lignes de basses groovy (et mises en avant) du surdoué Dan ou les riffs des deux guitaristes aux doigtés surnaturels. Le produit final sent bon la sueur du dur labeur d'un groupe perfectionniste.
L'émotion est quant à elle bien palpable et cela dès l'introduction enivrante de« Mirrors » (rappelant un « Foam Born (a) » tourné le vers post-rock), le chant clair angélique de Tommy s'améliorant sans cesse et les breaks planants toujours aussi poignants. Mais je ne sais pas, même après m'être forcé, la sauce ne prend pas… Il manque cette petite chose indéfinissable qui jadis vous tirait les poils, la larme à l'œil. Les vaines tentatives sur chaque titre n'arriveront pas à me toucher de la même manière qu'un
Colors. La balade « Desert Of Song » et pour la première fois le chant clair du guitariste Paul Waggoner (pas transcendant) accompagnant Tommy, reste fortement dispensable. Fort bien fichu (et le mot est faible) mais imperméable sur sa globalité (hormis le hit « Swim To The Moon »). On aurait aussi apprécié plus d'interludes instrumentaux afin de solidifier le travail d'ambiance, laissant d'avantage la part belle aux délires de BTBAM. A trop vouloir en faire il y même parfois quelques fautes de goûts selon la perception de l'auditeur, point négatif suivant le groupe depuis son premier album éponyme. La balade RFM « Desert Of Song » (citée plus haut) ou le clavier « Etienne Daho » du final de « Fossil Genera - A Feed From Cloud Mountain » sont des exemples parmi tant d'autres.
Lorsque
Colors sentait bon le naturel de bout en bout et cela même sans domptage draconien du bestiaux, ici les oreilles grinceront par à coups. Il manque cette fluidité entre les différentes parties, le titre teaser « Obfuscation » (titre le plus faible de
The Great Misdirect) étant l'hymne à cet handicap. BTBAM semble moins inspiré. Un exemple du manque d'inspiration étant certainement les références à Patton afin de soutenir le côté « barré » de leur musique. On avait déjà pu avoir un avant goût sur
Colors, cette fois elles sont flagrantes (la transition « Disease, Injury, Madness » et « Fossil Genera – A Feed From Cloud Mountain »). Sauf que cela demeure bien fade. Les adorateurs des bizarreries « cglaumiennes » apprécieront peut-être, de mon côté je préfère mettre en platine un bon Fantomas. Du côté de la force mélodique de BTBAM, autre pilier de la musique du groupe,
The Great Misdirect possède son lot de leads et soli inhumains à vous hisser vers les cieux. L'impact reste tout de même bien moindre que les albums précédents mais un titre comme « Swim To The Moon » (à placer dans le panthéon de BTBAM) me contredira sans hésitation (je radote ?). La présence sur ce titre du chant hardcore de Chuck Johnson, guitariste du récent side-project (Orbs) du bassiste Dan Briggs, aurait pu cela dit être évitée.
The Great Misdirect au titre malheureusement énonciateur, n'aura pas eu le même effet de grâce et de surprise que son aîné
Colors ou que l'efficacité d'un
Alaska. Trop ambitieux et moins inspiré qu'à l'accoutumé, le chef d'œuvre n'est pas au rendez-vous. Reste qu'il largue encore loin derrière toute une tripotée de groupes extrêmes à tendance progressives, le niveau des compositions étant tout simplement hallucinant.
The Great Misdirect marquera par ailleurs la fin de l'ère Victory Records (à moins que le groupe rempile, ce que je doute). Un label plus imposant devrait certainement aider à BTBAM à toucher plus d'auditeurs (en particuliers outre atlantique). En attendant un prochain album culte, je m'en retourne à mon vénéré
Colors.
Par gulo gulo
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Raziel
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo