1996 – 2008.
Il aura fallu 12 ans pour qu'enfin que la légende At The Gates satisfasse ses cohortes de fans, par le biais d'une reformation, certes éphémère, mais bien plus réelle que toutes les rumeurs qui circulaient ici et là depuis la création de l'Internet.
Et il aura fallu 2 années de plus pour que sorte LE testament de cette reformation, que je tiens enfin dans mes petites mains fébriles.
Disséquons ensemble la bête :
I / La forme :
C'est dans un luxueux digipak 3 volets que « The Flames of the End » vous est proposé. A ma gauche, un livret d'une quarantaine de pages rempli de photos d'archives, des débuts du groupe jusqu'à la tournée d'adieu. Un joli bonus, que je n'attendais même plus, et qui comble de joie mon petit cœur de fan. A droite, classiquement les 3 DVDs du coffret (ouf ils y sont tous). Passons au fond.
II / Le fond :
a)
« Under a Serpent Sun : The Story of At The Gates »
Avec plus de 2h au compteur, ce 1er DVD prétend faire le tour de l'histoire du groupe, de ses débuts dans la banlieue de Göteborg à la tournée d'adieu finissant en apothéose au Wacken 2008. Il prétend également être intéressant, passionnant même, très bien documenté, parsemé, que dis-je, inondé de photos d'archives rares, d'interviews passionnantes et d'anecdotes tordantes d'acteurs et d'amis du mythique combo Suédois.
Et bien il peut assumer ses prétentions du début à la fin ce petit DVD.
J'ai été tout simplement scotché pendant 2h à mon écran, à dévorer ce documentaire qui réussit le tour de force d'être exhaustif (on passe autant de temps à nous narrer la rencontre entre les membres de Grotesque et futur At The Gates, qu'à évoquer la tournée pour
« Slaughter of the Soul ») sans ennuyer une seule seconde. Majoritairement basé sur des interviews de Tompa et Jonas pour la partie membre du groupe (je suppose que c'est Anders qui tient la caméra 90% du temps), les 2 zicos reviennent en détail sur toute l'histoire du groupe, aidés en cela par de prestigieux guests de chez Napalm Death (Shane Embury), My Dying Bride (Aaron Stainthorpe), Dark Tranquillity (Mikael Stanne), qui y vont de leur anecdote sur le groupe ou des sentiments éprouvés à l'époque de la sortie de « Gardens of Grief ».
Les anciens membres ne sont pas oubliés, loin s'en faut : on retrouve avec grand plaisir Alf Svensson, qui explique en détail les raisons de son départ du groupe (avec un regret certain d'ailleurs, lorsqu'il évoque sa découverte de ce que le groupe a réussi avec
« Slaughter of the Soul ») et le violoncelliste de
« The Red in the Sky is Ours », qui d'ailleurs a un temps de parole inversement proportionnel à ce qu'il a apporté au groupe, c'est vous dire si l'on s'attache aux détails ici…
Tompa nous promène aussi pas mal dans la ville ou tout est arrivé, nous présentant ici et là leur disquaire de prédilection, les salles où ils firent leur premier concert, les premières beuveries…
Le tout est émaillé d'innombrables photos d'archives, qui illustrent les discussions, et permettent de rester intéressant visuellement quand l'audio part quelques fois dans l'inintéressant (chose assez rare).
Sans déflorer trop le sujet, on apprend énormément de choses sur les conditions d'enregistrement des différents albums, les choix des pochettes (qui n'a jamais été intrigué par celle de
« The Red in the Sky is Ours » ?), les tournées…ainsi que quelques anecdotes racontées de façon pince sans rire, dont deux dont je ne peux m'empêcher de vous évoquer rapidement :
- la pédale d'effet d'Anders qui disparaît de la scène en plein concert, et qu'une amie de Tompa avouera une semaine plus tard avoir subtilisé, croyant avoir récupéré un walkman flambant neuf ( ?!)
- cette tournée mémorable avec My Dying Bride dans 2 vans sans fenêtre avec matelas à même le sol, et cette collision au bout de quelques kms entre les 2 vans qui entraînera la fureur des musiciens, non pas à cause des dégâts physiques et de la peur éprouvée, mais à cause de la destruction complète et totale du stock de bières commun aux 2 groupes.
Vous l'aurez compris : autant j'avais été déçu par le docu du dernier DVD de Dark Tranquillity, autant ici on retrouve enfin le document indispensable à tout fan de la scène melodeath, pour bien comprendre la genèse du genre et de l'un de ses acteurs les plus renommés.
Cerise sur le gâteau, on retrouvera avec plaisir en bonus les 4 clips enregistrés par At The Gates, avec une qualité qui va évidemment crescendo au fil des années.
b)
« Purgatory Unleashed: Live at Wacken 2008 » :
On a tous au moins un DVD enregistré au Wacken: on en connait donc le gigantisme, cette scène immense et éloignée du public, ce son propre et quasi parfait qui manque de sensations “live”, cette foule anonyme et bigarrée qui ne se fait entendre qu'entre les morceaux... C'est ça qu'est le second DVD d'At The Gates, un témoignage live sur la scène d'un des plus grands festivals européens, avec toutes les caractéristiques bonnes ou pas que cela suppose.
Au niveau de l'image, rien à redire, le montage est cohérent, on ne change pas de plan toutes les 5 secondes et chaque musicien a de façon égale son temps d'apparition à l'écran. Le son est comme je l'écrivais plus haut réputé sans overdubs certes, mais malgré tout très propre, issu probablement de la soundboard. Parfait pour en discerner toutes les subtilités du jeu, mais manquant singulièrement de puissance à mon sens. On s'en contentera cependant, car ce qui rattrape l'ensemble c'est la set-list, sensiblement la même qui fut joué au Hellfest, à savoir LE best-of idéal du groupe.
Voyez plutôt : excepté les deux instrumentaux acoustiques, c'est l'intégrale de
« Slaughter of the Soul » et de
« Terminal Spirit Disease » qui est ici exécutée à vitesse grand V ; on y rajoute les titres emblématiques que sont « Raped by the Light of Christ », « Kingdom Gone » et « The Burning Darkness », et deux vieilleries avec « All Life Ends » et « Windows », et le compte est bon : 18 titres, pour le best of le plus complet qui soit.
At The Gates n'est pas, surtout après tant d'années, le groupe le plus vivace du monde : très statique, à part Tompa, les zicos ne sont pas là pour faire le show. C'est cependant une telle joie que de réentendre tous ces classiques du genre qu'on en oubliera les saltos arrières qu'Anders ne nous fera plus (ou n'a jamais fait) pendant un solo. Joli testament musical pour le groupe, et pour une fois absolument complet, même pour le fan le plus intransigeant (ok il manque « Neverwhere » mais il est sur le 3e DVD).
c)
« Only The Dead Are Smiling » :
Pas radin pour un sou, Earache et At The Gates nous ont mis en guise de bonus un 3e DVD, rempli de lives de toutes les époques et de tous les lieux. On retrouve comme souvent des titres déjà vus sur le DVD du Wacken, mais parfois dans des conditions particulières, comme ce
« Slaughter of the Soul » joué à New York au Irving Plaza en 2008, et qui est juste culte car le public y hurle les paroles du titre plus fort que Tompa du début à la fin. A voir absolument. On a droit à quelques gros festivals pour la tournée de reformation, et aussi et c'est plus intéressant des prestations en club, ou le son est plus puissant, moins propre qu'au Wacken. Il y a même une rareté avec un concert de 1991 ou sont joués 3 titres de « Gardens of Grief », ainsi qu'en 2008 en Grèce un « Neverwhere » de toute beauté.
Note technique : sur ce 3e DVD, certaines plages ne passent pas sur certains types de lecteur DVD (environ 6 sur 10 quand même). Mon VLC Player, pas plus que Windows Media Player, n'ont été capable de lire certaines plages live, idem pour mon lecteur de DVD de la télé. Seule ma Xbox semble à même de lire sans souci ce DVD dans son intégralité, et d'après Anders sur le forum d'At The Gates, ils ne s'expliquent pas d'où vient ce souci technique car visiblement ce n'est pas une erreur de production. Testez donc sur plusieurs supports votre DVD si d'aventure vous rencontriez les mêmes soucis.
III / La conclusion :
Un adieu à un groupe, dans un monde de passionnés comme le notre, est toujours quelque chose de délicat à réussir. Je me souviendrai toujours de ma déception en finissant le DVD de The Crown, rempli de défauts, et qui me fait encore espérer une reformation sous un nom ou un autre pour pouvoir clore le sujet de façon correcte. Ici le pari est réussi : At The Gates, autrement dit Anders qui s'est occupé de pratiquement tout avec Tompa, a réussi à nous faire le plus beau testament qui soit, avec un documentaire solide et des lives qu'on se reverra en boucle avec un plaisir toujours inégale. Indispensable pour le fan qui ne pourra s'assumer sans, indispensable pour l'amateur de melodeath qui ne pourra comprendre les bases de son style de prédilection sans, et dispensable pour les autres. La magie opère toujours, même 14 ans après son dernier album, et on ne peut que saluer la crédibilité du groupe qui a fait taire toutes les rumeurs d'un nouvel album ou d'une reformation plus longue : At The Gates est mort et enterré en 2010, et atteint à ce titre sans difficulté le statut de groupe culte en gardant intact son intégrité musicale et artistique. Chapeau bas messieurs.
2 COMMENTAIRE(S)
06/04/2010 17:16
D'ailleurs je pensais pas qu'AT THE GATES était autant à l'arrache pendant longtemps. Pareil quand on entend les anecdotes de Fredman sur les débuts du studio dans son nouvel emplacement.
Et le concert est vraiment très très bon ! (surtout qu'il n'y a pas d'overdubs)
05/04/2010 14:34