Né des cendres encore brûlantes de PROFANE SOLITUDE en 1999, le projet solo du multi-instrumentiste Pavel "Lutomysl" Shishkovskiy s'est rapidement fait un nom dans la scène Black Metal, avec des albums à la qualité reconnue quasi unanimement.
Вызов (
The Challenge), sorti dès 2002 chez Ancient Nation, annonçait la naissance douloureuse d'un futur grand de la scène ukrainienne, tenant fermement le fer aux côté des HATE FOREST, DRUDKH, LUCIFUGUM et autres ASTROFAES pour parachever l'effervescence des bons groupes de cette scène de l'Est, n'en déplaise au satané von_yaourt (que sa plume pleine de fiel soit damnée jusqu'à ce qu'il reconnaisse que cette scène comporte pléthore de talents !).
Et LUTOMYSL existe au milieu de cette pépinière de groupes car il brille en chacune de ses créations une étincelle qui le distingue des autres : des deux albums
Decadence (2005) et
Catharsis (2006) qui précédèrent ce
De Profundis, on retient la mélancolie intense et abondante dans la musique du slave, qui parvient à ne jamais tomber une seule fois dans la facilité. LUTOMYSL donne l'impression d'élever en permanence son art vers des sommets plus exigeants encore, pour offrir à l'auditeur quelque-chose de toujours plus parfait, plus pur et plus profond. Sa musique en forme d'introspection cauchemardesque est à chaque opus plus savoureuse, intense et émouvante… en bref, en 2008, on était en droit d'attendre une grande oeuvre avec ce
De Profundis à la pochette inspirée par les créations de Gustave Doré. Doté d'un visuel sobre –habituel pour ce one man band, mais terriblement efficace- LUTOMYSL arrivait sur la pointe des pieds pour déverser sa puissance émotionnelle dans nos enceintes paumées devant un tel déploiement de génie.
Suivant le sillon tracée à la lame de rasoir par les précédents, ce
De Profundis s'impose comme un album tout bonnement monumental, une consécration artistique pour l'ukrainien. Les compositions suintent une souffrance diffusée avec une grande conviction par Lutomysl, aidé par un son étouffé pour les guitares, son qui n'obstrue en aucun la puissance d'une batterie monolithique démolissante et d'une basse saturée à mort, une basse pesante comme je les vénère... Cette basse d'ailleurs, qu'elle est efficace lors du pont de « The Break Of Fatality », fatale montée en puissance dans l'émotion ! Ou encore sur l'introduction de « Proclamation », où elle attaque l'auditeur au cœur en créant un rythme oppressant. Parsemé de petits breaks salvateurs, de petits passages plus intimistes (« Angel With The Sign Of Damnation On His Brow », le début de « Autumn Etude In Crimson Tones »), cette œuvre trouve également son essence dans la variation : parfois la déferlante s'arrête pour laisser place à quelques arpèges très justes, pour le meilleur des effets. Peu de groupes sont capables de ça sans tomber dans la niaiserie puante, et à l'évidence LUTOMYSL fait partie de cette élite : pas de bons sentiments, juste une sincérité on ne peut plus touchante : le « Jet Black Metal Art » de l'ukrainien est à son apogée.
On note que l'homme élève, outre la force de sa musique, la qualité de son jeu de guitare : la progression technique, d'albums en albums, est bien visible. De plus, il s'aide sur cet album, en la personne de Yuriy Sinitsky (présent sur les BLOOD OF KINGU notamment), d'un batteur hors pair qui tape pile là ou ça fait mal, avec ce jeu tout en finesse, que ce soit dans ses passages techniques à la charleyston (« Peace Is Not Found! (Ode To Lucifer) »), dans ses petits coups de splash ravageurs pour marquer les temps, ou dans son tabassage en règle à la grosse caisse. Dans la vie, y a deux catégories de personnes, y a les batteurs qui blastent à tout va pour amener une brutalité illusoire, et y a les batteurs qui blastent juste, pile comme il faut, pour servir au maximum la musique qu'ils sont tenus de rythmer et ainsi apporter un réel bonus à celle-ci. L'excellent titre « The Night » est là pour témoigner de la qualité de ce batteur, qui bonifie les riffs ultra prenants de LUTOMYSL pour enfoncer encore plus l'auditeur dans les méandres de ce manifeste maladif. La réussite intégrale de ce
De Profundis repose en grande partie sur l'effort du batteur session. La communion entre les deux musiciens atteint la perfection avec le morceau « My Way », qui se fend de passages où la batterie est esseulée, de moments excellents où le batteur répond aux assauts du guitariste… D'ailleurs, de manière générale, les albums du one man band les plus réussis sont ceux réalisés avec un batteur, à l'image de
Decadence où le jeu de Amorth (ASTROFAES) sublime les terribles riffs de notre homme torturé.
Tout semble être de l'or sur ce
De Profundis : le panache maladif qui ressort de ces compositions très travaillées sur lesquelles se pose cette voix arrachée, hantée par cet héritage à l'accent prononcé. Un point qui m'est très cher, l'homme chante dans sa langue maternelle pour un rendu optimal. Impossible de ne pas sentir trembler la gorge du transcendant Lutomysl, être frêle doté d'une voix pleine de fragilités, une voix à fleur de peau que vous ne retrouverez nulle part ailleurs. Sensiblerie ? Oh non mes aïeux, pur dégoût, pure haine, deux éléments parfaitement agencés permettant à LUTOMYSL de livrer l'alliage parfait de mélancolie ravageuse et poignante et de violence sortie avec les tripes, une violence rendue encore plus efficace grâce au concept luciférien très recherché. La puissance monolithique de cet album, pourtant très varié dans ses structures, révèle une pureté qui m'absorbe littéralement et me fait l'effet d'un groupe de la trempe de HATE FOREST, juste parfait. Non, bande de chafouins, je ne m'emballe pas, je suis conquis, ravagé, démoli, retourné à l'écoute de ce diamant à la fois brut et brisé par le glacis spontané de l'homme qui se cache derrière... Putain d'assassin...
Lutomysl : 10 – Geisterber : 0.
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