Allez les amis, aujourd'hui on va tout se dire. Je dois l'avouer j'avais avant même d'écouter ce nouvel album un gros a priori. Moi qui ne suis pourtant pas du genre à crier avant d'avoir mal, j'avoue: j'étais persuadé d'être déçu par « Et Le Diable Rit Avec Nous ». La tournure déjà amorcée par
« No Surrender » et les extraits peu engageants en guise de prémédication m'avaient poussé à la méfiance. Mon lecteur CD allait malheureusement me le confirmer: « Et Le Diable Rit Avec Nous » abaisse encore d'un cran la force de frappe de l'ex-groupe de hardcore français jadis le plus vindicatif.
Il y a trois ans Kickback avait déjà entamé avec
« No Surrender » un virage musical sensible et avait tout autant soigné le contenant (artwork, ambiance générale...) que le contenu. S'il est vrai que les Parisiens ont toujours accordé beaucoup d'importance à l'aspect graphique, et ce depuis
« Cornered » et son artwork
comic de Tim Vigil, le travail sur les ambiances semblait presque prendre le pas sur l'aspect purement musical, leur hardcore sévèrement burné se muant en un bourbier où la noirceur des riffs semblaient le disputer à la férocité d'antan (l'arrivée de Damien à la six cordes n'y étant évidemment pas étrangère). « Et Le Diable Rit Avec Nous » franchit une nouvelle marche (une de trop en ce qui me concerne) et se place dans une posture où la forme finit par primer sur le fond. L'ambiance, la haine, la noirceur c'est bien, mais quand j'écoute Kickback je m'attends à avoir envie de donner des coups de poings dans les murs jusqu'à m'en casser tous les métacarpiens, pas à bailler aux corneilles en attendant vainement que ma paupière droite convainque la gauche de se lever. Ici, la recherche de l'ambiance à tout prix se fait au travers d'un délitement de la musique, le groupe se sentant obligé d'empiler les couches de guitares comme cache-misère de l'inconsistance de riffs prétendument torturés (tout comme l'artwork, simple repompe de la photo présente dans le livret de son prédécesseur).
Même si l'album réserve de rares moments dignes d'intérêt (les quelques patterns de batterie sympas sur « Sorption » ou les roulements de double de « Cavalcar La Tigre », les légers relents hardcore de cette dernière passé les deux minutes, l'accélération esseulée de dix secondes à 2'10 sur « Le Chant Du Diable » ou les quelques sursauts d'une « We Prowl, They Crawl » offrant bien peu de branches auxquelles se raccrocher), globalement on passe son temps à attendre qu'il se passe véritablement quelque chose à l'image d'une « Stained II » bien terne, si toutefois l'on a survécu à l'inutilité de « Weltanschauung » et à la vacuité de « Stained I ». Seul Stephen offre une prestation digne de ce nom, égal à lui même, tel un roquet malheureusement muselé par une musique ayant perdu toute férocité. Là où
« No Surrender » savait rester beaucoup plus abrasif, agressif, plus hardcore dans l'esprit (« The Low Of The Self », « Unholy Triumph »), ce côté hardcore est réduit à peau de chagrin sur « Et Le Diable Rit Avec Nous », pour ne pas dire inexistant, au dépends d'ambiances certes noires, malsaines (pas non plus de quoi crier à une incommensurable turpitude), travaillées (je ne nie pas un certain travail de en ce sens), mais qui n'auront jamais pour moi l'impact de la violence gratuite et on ne peut plus haineuse d'une « Heaven and Hell » sur
« Forever War » ou « Ruining The Show » sur « Les 150 Passions Meutrières » tellement plus dérangeantes et ô combien plus efficaces.
C'est amusant de voir que les titres qui ont le plus retenu mon attention lors des premières écoutes sont les deux reprises qui clôturent cet album: la reprise survitaminée du « Mind Of A Lunatic » des excellents Geto Boys et « It's A Burning Hell » du groupe noise rock sorti de je-ne-sais-où Brainbombs. Amusant ou triste...
Si son titre est une référence aux paras, mieux vaut se préparer à la chute libre et à un atterrissage raté qui aura plus du moustique sur le pare-brise que du papillon sur la pâquerette. « Et Le Diable Rit Avec Nous » est bel et bien une déception, certes un peu moins sévère que ne le laissaient présager mes toutes premières écoutes mais quand même une déception. Moi je m'en vais ressortir mon
« Cornered » pour l'attitude, mon
« Forever War » pour la hargne et mon « Les 150 Passions Meurtrières » pour la haine. Fuck!
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