La dernière fois que j'avais eu le malheur d'être exposé à The Monolith Deathcult c'était au Chaulnes Metal Fest 2009, où les Bataves avaient délivré une prestation si indigne que malgré leurs grandes gueules et leur volonté de croire que leur talent n'avait pas disparu avec leur troisième album, ils avaient eux-mêmes reconnu s'être plantés ce soir là. Pas surprenant venant de la part du groupe qui après les très bons
The Apotheosis et
The White Crematorium avait commis un
Triumvirate qui avait déjà fait l'unanimité contre lui au sein de la rédaction de Thrasho – à l'exception de Chris mais lui on s'en tape, il est là pour payer le loyer. Encensé par la critique et une partie du public – auxquels il suffit d'un accord de quinte plaqué sur un blast sur fond d'electro clubing spécial soirée Jacky Tuning pour crier à la plus grande révolution de l'histoire du metal extrême, oubliant au passage que The Berzerker, Iperyt et Disiplin avaient expérimenté la chose avant eux, et de manière bien moins ridicule – ce troisième album de The Monolith Deathcult n'était pourtant pas totalement indigent, se rappelant, certes trop rarement, que le cœur théorique du propos demeurait le brutal death. Il arrivait, au détour de « Demigod » et « Den Ensomme Nordens Dronning » notamment, qu'un riff qu'on pourrait même qualifier de plutôt bon, et pas trop pollué par leurs nouvelles sonorités electrocrétinocore, vienne rappeler qu'il y a de cela déjà dix ans, TMDC était un groupe qu'on qualifiait de plus grand espoir du brutal européen grâce à un riffing en béton, des accélérations fulgurantes et une lourdeur à faire pâlir d'envie le Nile des meilleurs jours. Et puis ils ont mis des claviers qui font « wub wub » (bien avant la dub-step hein, des visionnaires ces gars là) et des bass drops, remplacé le death metal par du néo metal, et mis un ou deux riffs au dessus de 240 bpm issus de leurs deux premiers albums en suivant toujours les mêmes schémas. Bam, l'electro-néo-death était né. Du génie, on vous dit.
Fort heureusement pour nos zygomatiques,
Tetragrammaton persévère dans la voie ouverte par
Triumvirate, en gomme les rares qualités et accentue toutes ces petites choses qui mises bout à bout en faisaient un album insupportable. Oubliez le brutal death, il y a en tout et pour tout six riffs, pour autant de minutes, qui se donnent la peine d'enclencher la double et de jouer la carte de la rapidité, sur plus d'une heure de musique qu'on qualifiera docilement de « autre ». Une goutte déjà un peu croupie, tant ces rares riffs sont interchangeables et sans le moindre once d'impact, dans un océan d'eau bien saumâtre qui relèguerait presque le troisième album de TMDC au rang de bon moment. S'il compte bien moins de passages vindicatifs que son prédécesseur, ce nouveau ratage a au moins la décence de s'inscrire dans sa lignée en supprimant toute trace d'originalité dans son aspect metal, en proposant le riffing le plus générique et paresseux que l'on puisse imaginer, et en n'oubliant pas d'ôter tout dynamisme à ses compositions en coupant dans leur élan toutes les montées dans les tours, heureusement exécutées à des vitesses ridicules. Que les fans de
Triumvirate se rassurent, ce qui reste de metal extrême chez TMDC est au moins aussi mauvais sur
Tetragrammaton que sur leur étron antérieur, faisant du même coup passer le dernier Hour Of Penance pour un monument du death metal (insérez ici les rires enregistrés).
Le death metal n'est de toute façon plus qu'une anecdote ici, puisque si les influences néo-metal qui ont fait leur succès auprès des Kévins de 15 ans étaient déjà très présentes sur son prédécesseur,
Tetragrammaton enfonce le clou en mettant des breaks à la Slipknot au milieu de deux riffs brutal death – il ne manque que « jump mothafucka » à 7:15 sur « Drugs, Thugs & Machetes » pour en faire le cadeau idéal à votre cousin débile fan de l'album de Korn et de Skrillex – voire tout simplement en faisant des morceaux entiers d'elctro-indus mâtinés de néo metal. Cet album tout en entier est tourné vers l'amateur non éclairé de musiques pour ados, on notera d'ailleurs avec malice l'apparition furtive des vocaux hurlés au milieu de « S.A.D.M » et « Qasar-Al-Niyah », pour faire plaisir à ceux qui pensent que du poil vont leur pousser sur le torse en passant du néo metal à TMDC. M'est avis que « Todesnacht Von Stammhein » restera dans l'histoire comme l'un des plus grands foutages de gueule de la part d'un groupe de metal extrême, le genre de plaisanterie à bien faire rire nos amis d'outre-Belgique en lisant les avis de ceux qui prennent tout cela au sérieux. Car non, le groupe n'a rien perdu de son second degré, et arriver à faire, avec ce titre, l'ultime mélange entre Rammstein, Slipknot et les chœurs de l'armée maoïste relève du plus grand exploit qui soit car, même avec la meilleure volonté du monde, peu de gens sont capables de réaliser avec un sens de l'à-propos et du détail pareil une merde aussi fabuleuse. Rien n'est laissé au hasard sur ce
Tetragrammaton et tout, du son exagérément grave façon appeau à boutonneux, à la production artificielle qui sied à merveille à l'ambiance, en passant par les paroles débiles et ostensiblement provocatrices ne sert qu'un seul propos : l'humour. Et là je vous le dis sans détour, si vous prenez cet album pour ce qu'il est, à savoir une vaste blague destinée à berner les cons en leur faisant raquer leur fric en un minimum d'efforts, alors vous tenez là le paroxysme de l'humour provocateur dans l'histoire du metal extrême. Loin, très loin, devant les jeux crétins des groupes de grindgore qui ne sont destinés qu'à une jeunesse désœuvrée à l'humour qui s'est figé en dessous de la ceinture. Un pied de nez pareil à tout un public qui se contente d'une musique éculée, pré-digérée et auto-labellisée comme géniale, et qui de toute façon se ruera dessus comme le fan d'Apple moyen, voilà l'ultime provocation de The Monolith Deathcult, bien digne de leur nouveau statut de troupe comique la plus extrême de l'histoire.
Et là vous me direz, j'ai occulté tout un pan du nouveau visage des Hollandais : l'ambiance, l'electro, le wub-wub qui vibre sous les stroboscopes destinés à éclairer une bande de camés sous LSD. Si
Triumvirate voyait le peu de bons riffs qui lui restait irrémédiablement souillés par un beat assisté par ordinateur,
Tetragrammaton a l'honnêteté de ne plus proposer quoique ce soit de qualité à défigurer, c'est donc sans doute cet aspect là qui plaira aux nouveaux fans de The Monolith Deathcult. Bon, pour ce qui est de l'ambiance sur le death metal quand il est présent, les beaux claviers pompeux de « Gods Among Insects » me serviront d'exemple, puisqu'ils sonnent exactement comme Nile avait pu le faire à ses débuts. Tous les bruitages et les samples d'ambiance n'apportent de toute façon rien de nouveau, et les effets de distorsion ou tout ce qui se rapprochent de l'electro ne viennent que souligner la vacuité de titres où les musiciens se contentent de jouer le pire riff imaginable 90% du temps. Soyons clairs : ceux qui aimaient le mélange electro et death metal du précédent album n'auront que peu de ces passages à se mettre sous la dent, et ils sonneront exactement comme ceux d'il y a cinq ans. Enfin bon, je conçois tout à fait que le renouvellement soit le dernier critère qu'appréciera le fan d'electro moyen, le changement c'est mal quand on cherche à partir en trip la bave aux lèvres. Pour tous les autres, qui auraient apprécié l'aspect grandiloquent de riffs death metal pauvres, mais blastés et soutenus par des claviers, vous avez l'embarras du choix ailleurs : Behemoth, Fleshgod Apocalypse, Hour Of Penance et même le dernier Nile le font avec infiniment plus de réussite (même si tout est relatif), car eux le font sérieusement.
C'est en définitive ce final où l'on peut entendre « The Monolith Deathcult presents Tetragrammaton » en se reprenant à six fois pour bien en prononcer le titre, que je retiendrai de ces quelques écoutes. Car cet album en est la parfaite image : il est drôle. Il a passé le stade du désespérant dès les premières secondes, et le dépit a fait place à une franche rigolade devant l'empilage de poncifs, de plans éculés et d'atmosphères sans intérêt qui font tout son charme. Ce quatrième essai des Bataves est un chef d’œuvre de ratage, un négatif de l'intérêt, un cas d'école absolu à faire écouter à n'importe quel groupe débutant pour lui faire comprendre ce qu'il faudrait à tout prix éviter de faire pour pouvoir un jour espérer composer quelque chose de bien. Il n'est pas loin de représenter le néant de tout ce qui est intéressant dans le metal extrême et décroche sans doute le titre de plus mauvais album que j'ai pu entendre depuis maintenant quinze ans que j'écoute du metal extrême, mais même dans sa quête de la nullité absolue il arrive à se planter. Je lui mets en effet un demi point pour son dernier titre (et ses vingt premières secondes pas trop mal, exploit !), qui rappelle, certes en beaucoup moins bien, ce que les groupes sus-cités ont pu faire sur leurs médiocres derniers albums, travestissant comme son prédécesseur l'esprit d'un
The White Crematorium que je suis en train d'écouter en ce moment même pour me laver les oreilles. Et puis il reste ce placement vocal qui lui, est désespérément bien pensé. Non franchement, c'est pas sérieux ça les mecs, il fallait vraiment pousser le vice jusqu'au bout, je suis obligé de sévir en augmentant la note.
Très honnêtement, ce
Tetragrammaton ne peut être autre chose qu'une vaste plaisanterie parfaitement maîtrisée de la part des provocateurs bien connus de The Monolith Deathcult, et il me rappelle la démarche d'Alphonse Allais qui, aux prémices des tableaux monochromes, avait peint, entre autres,
Récolte de la tomate par des cardinaux apoplectiques au bord de la mer Rouge pour démontrer toute la bêtise de cette mode, qui relève autant de l'art que les travaux de peinture au rouleau qu'on fait l'été chez sa grand-mère. Voilà, avec ce quatrième album TMDC se fout ouvertement de la gueule du monde, du metal extrême sans talent qui pullule, mais surtout de son public de fanboys écervelés qui verra l'art dans la matière fécale là où l'auditeur avec l'expérience de la vie reculera devant l'odeur nauséabonde qui en émane. Si
Triumvirate était un essai imparfait, trop timide pour s'affranchir totalement de ses racines death metal, et qui a su séduire ceux qui cristallisent leur intérêt dans la vacuité la plus profonde d'un metal extrême recouvert d'une couche de vernis electro pour lui donner l'apparence de l'audace, ce nouvel album devrait à nouveau diviser cette communauté de gens sans goût, sans doute sans talent, et assurément sans domicile, si j'en crois les statistiques sur les consommateurs de crack. Les amateurs de brutal death de qualité, eux, en seront restés au deuxième album du groupe depuis fort longtemps déjà.
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