Comme vous avez pu le constater au fil des chroniques, sur Thrashocore, la scène black US est extrêmement riche et prolifique avec des formations de qualité telles que Krallice, Bosse-de-Nage, Lascowiec ou encore Alda, sachant contenter tous les amateurs de black metal. Et pourtant, toujours rien concernant
Ash Borer, rien ! Pas une chronique….. Certes leur formation remonte à 2008 mais ils avaient su éveiller l’intérêt du public en 2010 grâce à un fabuleux split partagé avec
Fell Voices qui sera suivi de très près par ce surprenant premier opus qui fera l’unanimité. Les Californiens vont ainsi sortir des méandres de l’underground avec dans la foulée une signature chez Profound Lore, excellentissime label, qui aura la judicieuse idée d’éditer cette année leur album éponyme pour la première fois en CD et version remastérisée.
Donc, oui, si la scène black US actuelle vous débecte et que vous en avez fait une O.D. autant ne pas poursuivre la lecture de cette chronique à moins que vous souhaitiez mourir chez vous en solitaire, dans un squat ou durant une énième fête orgiaque. Pour les autres, reprenez l’adage de Katharsis : « Listen in darkness and at maximum volume only» et préparez-vous à une plongée aussi lente que douloureuse dans les abysses ! Dès les premières notes du titre d’introduction « In the Midst of Life, We Are in Death », l’ambiance est suffocante et malsaine avec des cris inhumains surgissant du néant. La bête
Ash Borer arrive lentement vers vous avec ces riffs lourds, pesants puis petit à petit le rythme s’accélère et vous êtes pris par ce déferlement de violence comme saisis par d’énormes serres. De plus, le côté rugueux de la production qui reste ici inchangé malgré le remastering – et c’est tant mieux ! – renforce le côté primitif de l’ensemble avec des relents un peu punk (je pense notamment à des formations telles qu’
Amebix).
Cependant cet album ne tombe pas dans la facilité mélangeant allègrement des influences aussi diverses que variées. On pense notamment à
Burzum (le côté dépressif et redondant),
Drudkh (les parties black mid-tempo épiques et gorgées d’émotion) voire même
Bathory avec son
Under the Sign of the Black Mark (les passages plus catchy, comme le lead jouissif sur « My Curse Was Raised in the Darkness Against a Doomsday Silence »),… De plus l’absence de bassiste donne un côté plus acéré aux mélodies, tout est à fleur de peau, vous ressentez un sentiment d’urgence au fil de l’écoute et votre attention ne retombe jamais grâce à de nombreux changements de rythme. Vous vous perdez délicieusement dans les méandres de l’univers tortueux et sombre des Californiens qui ne desserrent jamais l’étau, distillant le long de ces 40 minutes des riffs aussi mordants qu’entêtants, entrecoupant ces trois longs titres de nombreux interludes.
Et c’est là qu’
Ash Borer fait clairement la différence, s’extirpant ainsi de la masse grâce à sa folie créatrice et le travail effectué par N. au synthétiseur. Car ces accalmies très éthérées qui semblent être salvatrices, telles une main tendue vous sortant des eaux fangeuses, ne font finalement que vous maintenir la tête dans cet épais liquide vicié. Les sonorités sont certes plus aériennes et plus claires mais vous étouffez et sentez votre corps attiré et trainé pas les courants vers des profondeurs insondables. « Rest, You Are the Lightning »… Ces passages plus lents qui sont très mécaniques, froids, résolument modernes servent aussi d’ossature aux morceaux avec intro/outro ainsi que de nombreux breaks gagnant ainsi en intensité.
Les influences post très présentes (
Neurosis et son
Souls At Zero,…) mais savamment incorporées, donnent un ensemble très homogène et digeste ainsi qu’une emprunte musicale unique, le meilleur exemple étant illustré par le fabuleux titre de cloture « My Curse Was Raised in the Darkness Against a Doomsday Silence », titre fleuve qui mérite à lui seul l’achat de cet opus ! Toutefois, pour « s’amuser » au jeu des comparaisons, les Californiens se rapprocheraient plus de
Fell Voices ou bien
Altar of Plagues.
Cette réédition en format CD du premier album éponyme d’
Ash Borer arrive à point nommé après les sorties consécutives de leur second méfait
Cold of Ages (en 2012) ainsi que de l’EP
Bloodlands (cette année), réjouissant tous les fans qui se replongeront avec joie dans la discographie du groupe. C’est aussi une belle occasion, pour les autres, de découvrir cette formation avec ce premier opus des plus inspiré et des plus addictif qui est en écoute intégrale
ici.
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