Pour moi,
DARK FORTRESS est une véritable énigme. Ou plutôt un cas particulièrement complexe. Bien que je n’aie jamais été fan du black metal de ces Allemands, esquissant même plus de grimaces que de sourires face à leur musique, j’ai toujours eu la curiosité d’écouter ce qu’ils avaient à proposer, du premier album de 2001 au sixième paru en 2010. Pourquoi suis-je toujours là, à leur donner une chance ? Parce que beaucoup de chroniques élogieuses se trouvent sur le Net et que cela ne cesse de me titiller. Ne serait-ce que sur
Metal Archives ou
Rateyourmusic, les bonnes notes sont majoritaires et je ne peux que rester dubitatif lorsque certains en parlent comme d’un groupe majeur quasiment indispensable. J’écoute et réécoute, espérant un jour comprendre ce qui m’échappe depuis tant de temps et être convaincu qu’il ne s’agit pas d’un groupe de seconde zone... Cependant, si les chroniques sont bonnes sur les sites, comme sur Thrashocore d’ailleurs, qui a donné de beaux 8.5/10 à
Ylem et
Seance et un correct 7/10 à
Eidolon, le public ne semble pas nécessairement suivre et il est bien rare de lire des commentaires sur les forums. Ce qui me ferait dire que sur le papier
DARK FORTRESS est groupe méritant, mais que finalement le succès n’a pas suivi, et ça il y a toujours une raison !
La sortie du septième album est donc l’occasion de creuser un peu. D’abord, petit rappel sur le style de musique du groupe, il a suffisamment évolué depuis ses débuts pour qu’il soit nécessaire de faire une présentation. On nous parle de black mélodique, mais les titres sont plus proches du black brutal, du black orthodoxe et du black moderne, avec certes des ajouts de mélodie... Rien que ça... En fait, les couplets du groupe sont presque toujours très directs, soit à la
DARK FUNERAL soit à la
WATAIN, avec un goût certain pour une fausse complexité et une technique bien supérieure à la moyenne. C’est déjà un vrai reproche, mais ces couplets n’ont aucun charisme. Ils se suivent, se ressemblent et ne donnent pas envie d’en savoir plus. Et ils durent souvent bien longtemps, suffisamment pour inciter à passer à autre chose... Les vocaux ne rattrapent rien, hurlant dans le vide sans être convaincants et ne transmettant que peu d’émotions. Lassant...
Premier constat donc, les défauts de
DARK FORTRESS rappellent ceux du nouveau
SETH : les compositions ont beau être très carrées et fournies en détails, elles ne donnent pas envie d’être réécoutées, manquant de charisme et de réelle accroche (« Luciform » et « Odem » en tête...). Mais je le précise ce n’est le cas avec
DARK FORTRESS que sur les couplets à rallonge. Il faut essayer de se concentrer sur le reste, en faible quantité mais plus intéressant : les refrains, les breaks, des petits ajouts par-ci par-là... Ce n’est pas innovant, mais intéressant. Pas personnel, mais intéressant. Pas inoubliable, mais intéressant. Je pense aux chœurs rafraichissants sur des mélodies à la
SECRETS OF THE MOON (« Lloigor »), un léger clavier (« Chrysalis »), des incursions plus death (« I Am the Jigsaw of a Mad God »), une guitare acoustique (« The Deep »)... qui apportent de micros plaisirs malheureusement perdus dans le reste. L’autre défaut de ces apports est d’être si variés qu’ils empêchent aussi toute unité à la musique du groupe... Finalement, c’est quoi
DARK FORTRESS ? Un groupe de black qui pioche à gauche à droite...
Et puis il y a l’énigme « On Fever’s Wings », qui prend une grosse inspiration du côté de
SHINING. Ce n’est pas la première fois que
DARK FORTRESS montre son intérêt pour les Suédois, on se souvient de « As The World Keels Over » et « Hirudineans » sur l’album
Ylem, mais cette fois-ci c’est encore plus flagrant, et le morceau est encore plus en décalage avec le reste. Notes de piano au début, longue partie instrumentale, vocaux plus déchirés, voix féminine délicieuse qui chante en arabe et est suivie d’un chant masculin à la Ics Vortex... Une petite odeur d’
ARCTURUS se dégage de ce morceau qui tire véritablement son épingle du jeu malgré, à nouveau, trois premières minutes qui trainent en longueur.
Alors comme d’habitude le constat est le même. J’entends bien le travail derrière tout cela, les efforts de composition, la production irréprochable, l’envie de respecter un concept : l’univers de Stephen R. Donaldson et ses « Chroniques de Thomas Covenant ». Mais l’aura n’est pas assez forte et j’ai du mal à y revenir pour toutes les raisons citées... Encore une fois certains sites sont enchantés, persuadés de tenir là l’un des meilleurs albums de l’année comme ils l’avaient annoncés la semaine précédente avec un autre groupe, et ils me font à nouveau douter de mes goûts. Mais zut, pourquoi je n’arrive pas à tomber sous le charme !
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