Mightiest - SinisTerra
Chronique
Mightiest SinisTerra
Mightiest, vous connaissez ? Je doute. Pourtant formé en 1994, ce groupe allemand (aux membres obscurs) n’aura jamais sorti un seul album jusqu’à que ce mois de février 2016, enchaînant sporadiquement démos, splits et autres EP’s. « Pionnier du black metal allemand underground » selon Cyclone Empire. Soit. Le groupe interpellera plutôt bon nombre par son artwork à la patte de suite reconnaissable de Paolo Girardi (Inquisition, Diocletian, Chaos Inception, Brutally Deceased…). Outre le débat sur le recyclage des peintures du bonhomme, ce dernier n’est pas forcément gage de qualité (le retour en carton d’Armageddon par exemple)… Reste que Cyclone Empire est souvent synonyme de brûlots délectables voire de belles surprises, laissons-nous tenter par ce SinisTerra.
Et la première écoute sera des plus plaisantes ! Bonne pioche. Difficile de classer le style de Mightiest, une sorte de black metal hybride au socle mélodique qui pourra dévier d’un coup au brutal black, death, heavy, folk ou doom. En plus des influences citées par le label à fortes consonances teutonnes (Lunar Aurora, Secrets Of The Moon, The Ruins Of Beverast), je rajouterais leurs voisins (défunts) de Dies Ater et même la scène grecque pour les passages bigarrés « mystiques » (Nightfall et Rotting Christ). Voilà pour le rapprochement possible (Norvège forcément inclus), tout cela évidemment couvert d’une bonne dose de testostérones, Allemagne oblige. Une production massive du Iguana-Studios (Necrophagist, Fragments Of Unbecoming, Deadborn, Unlight…), des frappes de sourd et intenses (blast beats et double pédale en continu) du batteur ou un chant typé death « grosse paire ». A écouter très fort torse nu donc. Si SinisTerra demeure à la première approche direct de par sa violence, il l’est aussi par ses mélodies. Ses leads lumineux accrocheurs parsemés dont ceux imparables de l’ouverture « ubër » épique « Devour The Sun » et « Soular Eclipse » sauront capter rapidement toute notre attention.
Pourtant cet aspect « primaire » n’est qu’une face de Mightiest. Comme cité plus haut, les Allemands aiment jouer sur différents tableaux et changer de facto radicalement d’ambiance pour leur thématique de fin du monde. Etalées sur des morceaux relativement longs pour le style pratiqué (jusqu’à 11 minutes), les expérimentations se dévoileront sur des passages « aérés » parfois presque « farfelus » (les saccades modernes de « Animalevolence » à 5:06) ou à l’atmosphérique théâtrale transitant vers le mystique aux nappes froides et inquiétantes (« Oceanic Empires »). Entre deux virées gutturales, on retrouvera un chant clair doomy aux teintes Primordial (titre éponyme et « The Purifire ») voire viking (« Oceanic Empires »). Mightiest n’a clairement pas peur d’oser mais s’y perd parfois, chargeant à mon sens trop ses compositions et handicapant le travail d’ambiance généré. Certains titres auraient pu facilement être amputés de moitié de ces passages bouclés (Dawn comme référence) et éviter un léger essoufflement. Le mixage n’aidera pas non plus, mettant trop en valeur le batteur brutasse et masquant les subtils arrangements (que je découvre en ce moment même au casque).
Malgré quelques rallonges redondantes et dispensables ainsi qu’une atmosphère qui gagnerait certainement en saveur, le plaisir d’écoute et la surprise demeurent. SinisTerra transpire un black metal sans réelle étiquette à la fois riche et accrocheur. Six morceaux nuancés pour un voyage sur une Terre au décor désolé. Un coup de fraîcheur en ce début 2016 qui fait indubitablement du bien pour un genre parfois trop formaté et prévisible. Espérons ne pas attendre vingt années de plus pour découvrir la suite.
| Mitch 17 Février 2016 - 896 lectures |
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