Vous le savez déjà probablement mais John Peel est un animateur radio qui a exercé sur la station BBC 1 pendant près de quarante ans entre 1967 et 2004, année de sa disparition. Loin de ces guignols modernes qui se contentent d'introduire des artistes qu'ils n'ont même pas choisi en faisant semblant d'apprécier ce qu'on leur demande de diffuser, John Robert Parker Ravenscroft a toujours eu à cœur d'être là où ne l'attendait pas quitte à se mettre ses dirigeants, les maisons de disques et mêmes les auditeurs à dos. Il faut dire que diffuser du Punk, du Hardcore et du Death Metal à des heures de grandes écoutes était un moyen particulièrement efficace de bousculer l'Establishment anglais jusque-là peu habitué a subir ce genre de déflagrations sans filtres sur les ondes de la plus grande radio du pays. Un travail de diffusion et d'éducation que l'homme avait entamé dès la fin des années 60 en faisant jouer des artistes tels que Pink Floyd, David Bowie, The Soft Machine, Deep Purple, Fleetwood Mac, Jethro Tull, Elthon John et bien d'autres encore...
C'est dans ce contexte de très grande liberté qu'en janvier 1988, John Peel va permettre à un jeune groupe anglais dont personne n'a jamais entendu parler d'enregistrer dans les studios de la BBC quatre titres de son propre répertoire. Quatre titres qui seront diffusés quelques jours plus tard dans toute l'Angleterre. Ce groupe c'est Bolt Thrower qui entre 1988 et 1990 sera ainsi conviés à deux autres reprises pour le même exercice. Des invitations évidemment honorées et que l'on retrouve ici intégralement compilées par Strange Fruit Records (le label de John Peel et Clive Selwood) sous le nom judicieux de
The Peel Sessions - 1988 - 90.
Diffusé le 13 janvier 1988, les quatre premiers morceaux revètent un intérêt tout particulier pour les amateurs du groupe de Coventry et cela pour la simple et bonne raison que ce n'est pas Karl Willetts que l'on retrouve au chant mais un certain Alan West. Premier chanteur de Bolt Thrower, celui-ci possède une voix bien différente de celle de son successeur. On est en effet ici beaucoup plus proche d'un registre Punk/Hardcore/Thrash que Death Metal. Une voix qui colle évidément très à ces morceaux que l'on retrouvera six mois plus tard sur
In Battle There Is No Law, premier album lui aussi hyper Punk que ce soit dans l'esprit, l'interprétation ou bien tout simplement dans son artwork. Du coup, c'est vrai qu'il est assez déroutant d'entendre la voix relativement intelligible d'Alan West sur des morceaux certes connus mais interprétés d'une manière quelque peu différente sur album. L'influence de Sacrilege sur Bolt Thrower n'en est que plus évidente à l'écoute de ces brûlots typique du Punk/Hardcore/Thrash anglais de l'époque. Il est également à noter que cet enregistrement marque également l'arrivée officielle de Jo Bench en tant que bassiste, un rôle qui était jusque-là tenu par son petit ami, le guitariste Gavin Ward.
En novembre 1988, les Anglais reprennent la direction des studios de la BBC pour enregistrer quatre nouveaux morceaux dont trois figureront sur l'album
Realm Of Chaos (Slave To Darkness) qui ne sortira pourtant qu'un an plus tard sur Earache Records. Outre ces trois morceaux ("Drowned In Torment", "Eternal War" et "Realm Of Chaos"), on y trouve également un morceau inédit qui à ce jour ne figure sur aucun album de Bolt Thrower ("Domination"). Quoi qu'il en soit, si rétrospectivement onze mois peuvent sembler bien peu dans la carrière des Anglais, il n'empêche que cette période à vu se contrétiser plusieurs changements à commencer par l'arrivée quelques mois auparavant de Karl Willetts derrière le micro. Un changement qui s'accompagne d'un son nettement moins rachitique que par le passé même s'il conserve les stigmates d'une époque marquée par des productions jugées aujourd'hui obsolètes. Aussi, malgré encore de fortes appétences pour tout ce qui est Punk/Hardcore (ces rythmiques menées pied au plancher, ces riffs simple, ultra nerveux et bien speed...), la musique de Bolt Thrower lorgne quand même davantage du côté du Death Metal. Enfin, même constat que pour les titres de
In Battle There Is No Law enregistrés en début d'année, on remarque quelques petites nuances dans l'interprétation ainsi que dans les arrangements (solos quelque peu différents, riffs qui ne sonnent pas tout à fait pareil, vitesse d'exécution, etc). On leur préférera les morceaux de l'album mais l'essentiel était déjà bel et bien là.
Cette compilation se termine naturellement par le dernier passage de Bolt Thrower sur les ondes de la BBC. Nous sommes en juillet 1990 et le groupe est alors entre plusieurs sorties, d'un côté
Realm Of Chaos (Slave To Darkness) paru en octobre de l'année précédente puis
Cenotaph et
War Master à paraître respectivement en janvier et février 1991. Ainsi, à l'exception de "Lost Souls Domain" tiré de l'album précédent (
Realm Of Chaos (Slave To Darkness) pour ceux qui on du mal à suivre), tous les autres titres joués par les Anglais sont effectivement des titres inédits. On retrouve d'ailleurs le très bon "Destructive Infinity", bonus uniquement présent à l'époque sur la version CD de l'album (oui, c'était définitivement une autre époque). Sans surprise, le constat est identique à la Peel Session de 1988. En effet, difficile de ne pas préférer la production beaucoup plus massive de Colin Richardson. Tout y est naturellement mieux présenté : la finesse de jeu, la qualité générale du son, le growl rugueux et profond de Karl Willets, l'efficacité des riffs et des quelques solos. Bref, il n'y a même pas match.
Mais que ce soit les Peel Sessions de 1988 ou celle de 1990, ces enregistrements possèdent vraiment un charme tout à fait particulier. Celui d'une époque où diffuser ce genre de musique sur les ondes d'une radio nationale était encore possible. Celui d'une époque pleine de choses à explorer. Et puis la simple idée d'imaginer Karl Willets, Jo Bench, Gavin Ward, Barry Thompson, et Andrew Whale avec trente ans de moins, coincés dans un studio de la proprette BBC a quoi esquisser un petit sourire de satisfaction. Bien entendu, vu les prix relativement élevés pratiqués pour cet objet, on préférera s'intéresser aux dit albums mais pour les fans invétérés de la formation de Coventry, cette compilation est évidemment un must-have. Allez, encore un ou deux live et j'aurai décidément fait tout le tour de la discographie des Anglais. Quelle tristesse...
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