Earth and Pillars - Pillars I
Chronique
Earth and Pillars Pillars I
J’adore Earth and Pillars. Son premier album, Earth I, avait tout juste, de la pochette somptueuse au contenu aérien. Et même si la ressemblance avec les non moins majestueux Wolves in the Throne Rom est patente (il y a pire comme référence dans le style), Earth and Pillars m’avait paru s’en détacher par des atmosphères nettement plus sylvestres, plus sombres, moins aristocratiques. Comme si Earth and Pillars délaissait la cime des arbres pour préférer se mouvoir dans l’humus.
Après un tel premier effort, le passage à la confirmation fait souvent figure de chausse-trappe. Pillars I, à mon sens, n’échappe qu’en partie au piège et assume une légère déception même si, tu l’auras compris, ce terme reste tout relatif pour un groupe de cette qualité. Car, par certains côtés – qui ne sont pas pour me déplaire, tu vas comprendre – Earth and Pillars a beaucoup changé. Son modèle n’est plus WITTR. C’est désormais Darkspace voire Paysage d’Hiver. Mais quand on a bon goût, après tout…
Pillars, le premier titre (sur quatre, pour plus d’une heure de musique quand même), ouvre sous des auspices proches du premier album. L’air semble se charger de menaces diverses, les guitares sont prêtes à bondir, à dessiner autant d’arabesques aériennes. C’est un classique du groupe – comme chez WITTR – que d’assumer une intro très atmosphérique / mélancolique avant que la rythmique et les guitares ne déchainent leur mur de son. Rien de neuf ici donc. Cette intro – longue – plante néanmoins parfaitement le décor (également le départ de Solemnity) car, comme sur Earth I, le temps est laissé à Pillars I pour développer ses atmosphères. Mais les développements suivants tranchent considérablement avec l’album précédent. Exit les longues mélopées mélancoliques. Exit la promenade en forêt. Les guitares grésillent méchamment, l’air est surchargé d’électricité, la rythmique s’emballe violemment. La comparaison avec Darkspace (voire son homologue Paysage d’Hiver… bon goût, quand tu nous tiens) saute aux oreilles. Sitôt passée l’intro donc, c’est un mur de son opaque, distordu, grésillant, noir de chez noir qui s’installe. Et de tout cela émerge, de ci de là, des mélodies, plus proches d’ailleurs, d’une certaine façon de Paysage d’Hiver que de Darkspace. Des mélodies fondues dans la masse, mouvantes comme un serpent pris au piège, soit tantôt hésitantes, craintives (Solemnity, où la mélodie porte le morceau), tantôt extatiques, survoltées (les mélodies enlevées sur Penn, dès 1’40). Le pont et sa reprise à compter de la 10ème minute est juste directement tiré de Die Festung ou de Shattengang. Durant près de 4 minutes, la sensation d’être enfermé dans une tempête de neige est juste impressionnante (le départ de Solemnity encore). Copie, il y a. Mais remarquable.
Earth and Pillars a perdu son ambiance sylvestre. Il a quitté sa peau. Earth and Pillars a adopté l’hiver et le désespoir spatial (le pont à 7’ sur Myth). Il s’est couvert d’étoiles et a changé de galaxie. Myth, le second titre, ouvre exactement comme le ferait Darkspace, par une sur saturation des grattes qui dressent aussitôt un tableau de l’immensité du vide interstellaire. Là encore, le travail de composition est évident tant les mélodies, tout à la fois noyées dans la structure et clairement audibles, émergent en vagues majestueuses (le pont sur Myth à 8’). Les cassures sont peu nombreuses, qui offrent quelques respirations dans cette masse ultra compacte et opaque. Elles existent néanmoins (vers les 3’ puis à 7’ sur Myth par exemple, où la batterie ralentit le rythme et aère le morceau, idem sur Solemnity où la mélodie prend le dessus dès le début du titre). Mais l’air se fait rare et pour Earth and Pillars, cette façon d’envisager les compos est nouvelle. Elle pourra décourager les amateurs du premier album, d’autant que cette densité se retrouve durant les 1h06 de l’album.
Si Earth and Pillars me semble avoir changé – d’où la petite déception noté en ouverture – cet album reste néanmoins de toute beauté en raison, d’une part, de ses références nouvelles hautement qualitatives, d’autre part, d’une science de la composition et de la mélodie restée totalement intacte et, enfin, d’une faculté d’attirer l’auditeur dans d’autres sphères à nulle autre pareil.
L’amateur de Darkspace, de Paysage d’Hiver et de … groupes à fort potentiel immersif ne doit pas passer au travers de ce nouvel effort du groupe. Ce serait pêché.
| Raziel 3 Décembre 2016 - 1598 lectures |
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