Allochiria - Throes
Chronique
Allochiria Throes
Sous ce mot curieux se cache un trouble de la sensibilité qui consiste à rapporter un ressenti reçu dans un endroit du corps à un autre endroit, symétrique à celui-ci. Un problème neurologique curieux et méconnu à l’instar de la formation venue de Grèce qui s’en est servi pour son nom. Car depuis ses débuts à Athènes en 2008 elle a déjà sorti un EP et un premier opus qui sont passés quasiment inaperçus par chez nous, mais bien décidé à faire parler d’elle plus largement elle persévère et récidive avec un nouveau bébé qui continue dans leur style à cheval entre Post-Metal, Sludge et Hardcore. Cependant ici nulle trace de brutalité exacerbée ou de production façon mur du son, car elle privilégie énormément les ambiances éthérées et spatiales (qui ne sont pas sans rappeler celles des DEFTONES) où la musique prend le pas sur le chant qui sait se faire oublier, le tout avec une production très naturelle où le mixage rend grâce à chaque instrument. Ce point va avoir son importance tant durant l’avancée de l’écoute on va s’apercevoir de l’importance de chacun d’entre eux dans le rendu final, et surtout du boulot fourni par ses membres qui offrent une très belle surprise, inattendue et surprenante.
Avec une durée de chacun des morceaux qui oscille entre six et dix minutes autant dire que les Grecs poussent l’expérience à son paroxysme, sans jamais proposer de longueurs et tout en réussissant à conserver une cohésion totale, on s’en rend compte dès le départ avec « Thrust » car après un début où se font entendre des riffs découpés et le chant écorché très convaincant d’Irène, l’intérêt grandit avec l’arrivée des breaks. En effet c’est ici qu’intervient le côté plus progressif de leur musique avec les notes douces de guitare qui se superposent à la basse (qui sera bien mise en avant dans le mix) et à la batterie fine et lente, d’ailleurs nulle raison de cherche de passages rapides ou d’accélérations furieuse il n’y en a pas là (et il n’y en aura aucunement par la suite). Mais cela n’empêche pas leur son d’être à la fois lourd et aérien, en y intégrant des cassures mais toujours judicieuses car elles ne tombent pas comme un cheveu sur la soupe, et permettent aux parties plus électriques de faire leur retour sans se faire trop désirer, comme c’est le cas ici qui se termine un peu plus pêchu qu’auparavant et dont le résultat final est vraiment de qualité. « Tiny Defeats, Little Victories » commence de manière très planante et zen via un sentiment de chaleur (donné notamment par le côté groovy et technique du batteur) qui ne cessera de perdurer par la suite, tout en faisant durer les orchestrations au maximum, ce qui fait que la chanteuse est en retrait et ça n’est peut-être pas plus mal. Le quintet a bien compris que les parties instrumentales sont sa plus-value et ce qui lui permet de se différencier de la concurrence, comme avec le surprenant et élégant « Cracking Fractals » plus travaillé encore, et aux relents de Doom ici et là, ou encore avec le magnifique et prenant « Lifespotting » qui nous emmène encore plus loin dans les galaxies de l’espace et de l’esprit du cerveau humain, les deux mélangeant avec brio les différents éléments utilisés par ses créateurs. On a droit aussi à un sursaut d’énergie de température avec « Counting Five » un peu plus énervé, mais qui conserve sa spécificité, tout en étant relativement classique avant que n’arrive le bijou et la pièce-maîtresse de cette galette, à savoir « Denouement ». Outre son titre parfait et bien trouvé (vu qu’il sert de titre de clôture) il se montre à la fois silencieux et apaisant, tout en offrant des cris et différents effets surprenants mais qui s’intègrent à merveille au reste, pour obtenir un espèce de melting-pot et de condensé de ce qu’on a entendu auparavant, tout en poussant l’expérience à son paroxysme, offrant un mélange envoûtant et légèrement triste qui nous font grimper très haut sans redescendre de suite.
Car il va falloir du temps pour redescendre des hauteurs et des contrées où l’auditeur va être emmené tant chacun des membres s’est surpassé, notamment le nouveau frappeur dont le jeu très léché et fin ajoute un vrai supplément d’âme. Sans en faire trop les mecs font preuve d’une vraie intelligence de composition, tant l’ensemble s’intègre facilement et agréablement, sans oublier la voix de la vocaliste qui sait se faire oublier pour mieux revenir ensuite. Bref une vraie découverte qui mérite d’être (re)connue tant son originalité et sa fraîcheur font plaisir à voir et à entendre, surtout dans un style où il n’est pas évident de se démarquer, au risque de tomber dans la redite ou la linéarité, ce que les hellènes évitent judicieusement et avec talent.
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