Mortem - Deinós Nekrómantis
Chronique
Mortem Deinós Nekrómantis
Normalement, cette chronique du dernier album de Mortem aurait dû figurer en ces pages depuis déjà plusieurs mois. Sauf que les choses ont traînés et qu’il m’a fallu grosso modo un an et demi avant de me décider à enfin vous en parler.
Sorti en octobre 2016 sur le label allemand Iron Pegasus Records (Sadistic Intent, Poison, Ripper, Sabbat...), Deinós Nekrómantis est déjà (ou seulement, c’est selon) le cinquième album de ces Péruviens en activité depuis maintenant plus de trente ans. Il marque d’ailleurs un retour très attendu puisqu’en dehors de quelques split et autre EP, le groupe n’avait pas sorti de nouvel album depuis plus de onze ans. Autant vous dire que tous ceux qui avaient déjà entendu parler de Mortem n’ont pas attendu cette chronique particulièrement tardive pour se jeter sur ce nouvel album auquel nous allons enfin pouvoir faire honneur en ces pages.
Enregistré entre 2013 et 2014, mixé et masterisé en 2015 et finalement dévoilé à nos chastes oreilles fin 2016, il y a en fait bien longtemps que Mortem traînait ce nouvel album dans ses valises. Ne souhaitant probablement pas perdre davantage de temps en confiant l’artwork de ce dernier à un illustrateur déjà débordé, les Péruviens ont choisi une œuvre (enfin plutôt un petit bout) du peintre hollandais Jan Van Eyck intitulée "La Crucifixion et le Jugement dernier" (1426). Une peinture que certains d’entre vous auront probablement déjà croisé (je pense notamment aux amateurs de Cianide qui auront reconnu l’artwork de The Dying Truth sorti en 1992) mais qui a néanmoins pour elle de poser une ambiance diabolique dès le premier coup d’œil.
Pointer le bout de son nez après onze ans d’absence (aller, trois, si on compte la sortie de ce split en compagnie de Pentacle sur lequel ne figure qu’un seul titre de Mortem repris d’ailleurs ici) est toujours un petit peu délicat. Certes, il y a souvent beaucoup d’excitation lorsqu’un groupe annonce enfin son retour après une longue période d’absence mais bien souvent celle-ci se conclue sur un sentiment de frustration voir de déception... La question était donc de savoir si les Péruviens seraient capables de faire aussi bien que sur l’excellent De Natura Daemonum ? Et s’ils ne risquaient pas de tomber dans le piège de ces groupes qui pensent (bien souvent à tort) être toujours aussi pertinent après plus de trente ans de carrière ? Rassurez-vous, Mortem est toujours aussi redoutable et efficace qu’il l’était en 2005, en 2000 ou en 1995, date à laquelle est sorti son premier album.
Dès les premières secondes d’"Angel Of Apostasy" on goûte à nouveau aux délices de ce Death Metal typiquement sud-américain mené le plus souvent le couteau entre les dents et la bave aux lèvres. Un rythme soutenu marqué notamment par une batterie passée experte dans l’art de la mitraille, de nombreux riffs éclairs aux sombres mélodies ainsi que plusieurs leads/soli tous plus démoniaques les uns que les autres ("Angel Of Apostasy" à 0:27, 1:20 et 3:57, "Horror Of The Unliving" à 2:49 ainsi qu’à 4:18, le début de "The Pain Of Being Dead" puis à 1:43 et 2:59, "Liquefied Blood Of The Saints" à 1:51 et 3:19 et ainsi de suite...). Une intensité et une hargne toujours aussi exaltante qui ne semblent pas prêtes de s’étioler et qui en appellent à d’autres grands anciens tels que Slayer, Morbid Angel, Possessed et Sadistic Intent. Celle-ci est néanmoins compensée dans le cas des Péruviens par de nombreux passages plus en retenue qui vont alors apporter pas mal de relief à l’ensemble et ainsi permettre au groupe de nourrir une atmosphère particulièrement occulte et malfaisante ("Angel Of Apostasy" à 2:18, "Horror Of The Unliving" à 2:01, "The Pain Of Being Dead" à 1:29, "Liquefied Blood Of The Saints" à 2:25, "Within The Woods" à 2:23, etc). Quelques moments plus modérés qui ne gâchent en rien cette dynamique insufflée par Mortem et son Metal de la Mort. Deinós Nekrómantis est un album de pur Death Metal où chaque note est l’occasion de sentir ainsi la Mort rôder et de voir la vermine grouiller sur un sol jonché de matières en décomposition... Une formule qui n’a aujourd’hui plus grand chose à prouver, se "contentant" simplement de mettre en avant Le Death Metal sans sa forme originelle et cela en dépit des modes et du temps qui passe.
Servi par une production sans artifice, Deinós Nekrómantis marque un retour en force pour les Péruviens de Mortem. A l’heure où Possessed ne se contente plus que de tourner, où Slayer s’apprête à tirer sa révérence, où Morbid Angel est devenu une vaste blague malgré un semblant de retour effectué cette année et où Sadistic Intent continue de se faire désirer, il est bon de pouvoir compter sur quelques valeurs sûres comme le prouve ici Mortem. Certes, le groupe aura mis le temps pour revenir faire parler de lui mais cela en valait la peine. Et peu importe si le groupe nous ressert un titre d’un split sorti trois ans auparavant, peu importe si l’un de ces huit morceaux est une reprise de Venom car au fond tout est là pour faire de Deinós Nekrómantis un grand disque de Death Metal : des riffs ultra evil, une atmosphère pestilentielle, une passion toujours aussi vivace après toutes ces années et une putain d’intensité tout au long de ces trente-six minutes. Mortem ou l’essence même du véritable Death Metal !
| AxGxB 1 Août 2018 - 1248 lectures |
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