Soulagement : nous allons encore pouvoir délicieusement souffrir ! Voilà ce que l’on se dit à l’écoute de
Matricide in the Temple of Omega, nouvel album d’Ævangelist. C’est que la pente semblait difficile à remonter pour le duo, semblant devenir lentement mais sûrement moins chargé en arômes de synthèse (cf. le pourtant bon
Enthrall to the Void of Bliss), et plus particulièrement pour la tête pensante Matron Thorn et ses multiples projets peu réjouissants (la déception Death Fetishist reste à l’esprit). Des annonces en cascade, comme pour noyer le poisson, ainsi qu’un disque-surprise particulièrement inutile (
Heralds of Nightmare Descending) plus tard, l’impression de voir les Ricains se perdre dans l’excessif pour lui-même devenait tenace, au point de se demander si le projet ne préférait pas se contempler dans le miroir plutôt que le traverser, comme à ses débuts. Et pourtant, ici s’ouvre une nouvelle porte, monumentale.
Une entrée qui vous plongera une nouvelle fois dans le cosmos et l’infini néant, dans lequel se meut – depuis ses débuts – la formation. Les sentiments de claustrophobie et d’intense terreur vous saisissent rapidement avec des voix désincarnées en guise d’accueil (cf. « Intro ») ou encore des boucles hypnotiques répétées jusqu’à épuisement. Un vortex étouffant d’où surgit des voix languissantes et des membres informes cherchant à vous pénétrer. Un appel au vice et à la dépravation. Jamais cette alchimie entre horreurs d’outre-espace et sexualité déviante n’avait été aussi bien retranscrite dans les précédentes réalisations d’Ævangelist. Tout semble se fondre, se distordre pour fusionner à nouveau. Un mouvement continuel dans lequel vous être pris malgré vous, ballotté dans ce vide impénétrable. Les titres fleuves se succèdent dans un rythme relativement soutenu alternant agressions en règle (notamment « Æon Death Knell »), passages atmosphériques – gardant ce côté corrosif et percutant – ainsi que parties aussi lentes que vicieuses (comme sur le magistral « Ascending Into the Pantheon »). L’occulte en ressort d’autant plus par ses variations tout comme l’excellent placement des vocaux d’Ascarsis, les chœurs et les effets bien orchestrés. Un album à double tranchant qui vous pousse à la fois à la contemplation et au plaisir de goûter aux douleurs exquises.
Une évolution qui pourra donc paraître minime au premier abord, mais qui est telle qu’elle rend de nouveau enthousiaste à l’idée de suivre Ascaris ainsi que les nombreux projets de Matron Thorn (à commencer par l’excellent Devil Worshipper, dont il faudra parler bien vite). En déviant sa déviance vers moins de peintures de guerre, moins de mutations décrites dans leur anatomie, Ævangelist en est devenu à la fois plus compréhensible et horrible, faisant vivre de l’intérieur sa lubricité sadomasochiste et infernale, sorte de mise en musique d’une vie de Cénobite dans le monde de « Hellraiser ». Dans ces dédales escherien, tout juste notera-t-on que le duo garde encore pour plus tard des chemins à explorer, spiralant de délires entre Urfaust, Bethlehem, Axis of Perdition ou encore Deathspell Omega sans pour autant chercher à explorer une pièce en particulier. Une quête qui ignore son but, ce qui peut, lors de ces soixante-deux minutes, faire décrocher ici ou là, se demandant où tout cela mène. Cependant, il est important de dire que cet étourdissement n’est pas qu’un défaut, renforçant l’impression de se perdre dans une recherche effrénée et sensuelle !
Matricide in the Temple of Omega fait avancer sans boussole en son sein, les cris jouisseurs de fous écrivant leurs évangiles écarlates comme seuls repères.
Le duo effectue son retour avec éclat, dévoilant une nouvelle facette toute aussi malsaine et viscérale. Un album qui, s’il parait « simpliste » au premier abord par ses répétitions, arrive à vous perdre dans ses méandres. Il vous faudra de la persévérance et peut-être vous faire violence pour vous engouffrer dans ce chaos. Néanmoins c’est le prix à payer pour saisir toutes les subtilités de cette œuvre qui se savoure d’autant plus sur la durée.
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