Ævangelist - De Masticatione Mortuorum in Tumulis
Chronique
Ævangelist De Masticatione Mortuorum in Tumulis
Enfants de la nouvelle chair, si votre morphologie vous le permet, à genoux ! Ævangelist est votre nouveau dieu de ces lieux où l'espace, le temps et la matière sont des notions abjectes. Ho, le death en a vu passer des prétendants au trône de l'amorphe, repoussant à qui-mieux-mieux les lois physiques dans leurs derniers retranchements. Pourtant la formation, tout en paraissant s'inscrire parfaitement dans cette mouvance où le death se fait abstrait pour mieux écraser, tape juste comme aucune autre. Car elle n'est comme aucune autre.
Et dès la longue introduction du tentaculaire « Anno Mortii : Gnostic Transcendental Heresy » Ævangelist ouvre grand la porte sur l'infini et ses innombrables terreurs cosmiques avec des ambiances aussi astrales que chaotiques. La symbiose entre Ascaris (Shavasana) et le très prolifique Matron Thorn (Benighted in Sodom, Midwinter Storm) semble parfaite chacun apportant ses influences marquées allant du death au black sans oublier le doom mais dont le résultat surclasse leurs formations respectives – certaines mauvaises langues diront que cela n'était pas bien difficile. En effet, le duo délivre une musique beaucoup plus personnelle aussi riche que cauchemardesque avec un chant guttural très caverneux renvoyant par son côté à la fois lourd et horrifique à la scène finlandaise.
On est tout de suite désarçonné par pareille musique. Ævangelist mélange, modifie, corrompt sans jamais véritablement évoquer d'autres formations (tout juste pense-t-on à Evoken lors de la sépulcrale « Crematorium Angelicum »). Aussi, les formules type « du death metal qui aurait pu sortir chez Cold Meat Industry » (cf. ces nappes ambiantes semblant issues des plus belles morgues du défunt label) s'abandonnent vite au profit d'une succession d'adjectifs : là, la bestialité d'une animalité génétiquement modifiée (« Death Illumination » et ses hurlements sortant de toutes parts), ici, le désespoir total qui séduit pour mieux engouffrer (l'industrielle « Hierophant Disposal Facility »), le tout, une abîme nous cerclant de tous côtés, au point de rapidement subir sans mot dire les virages autoritaires du duo. C'est que, comme diSEMBOWELMENT en son temps, le groupe des États-Unis étourdit mais ne nous perd jamais, une sensation étrangement homogène et satisfaisante, presqu'agréable malgré la noirceur environnante, nous obligeant à aller plus loin avec lui.
Un long voyage durant lequel cette ténébreuse entité vous malmène avec son death illuminé et monolithique déversant une violence tant inhumaine que parfaitement maîtrisée de « Anno Mortii : Gnostic Transcendental Heresy » à « Funeral Monolith ». Une atmosphère malsaine et étouffante qui est surlignée par des nappes sonores des plus menaçantes, de nombreux breaks ainsi que les alternances entre passages violents et mid tempo. L'auditorat ploie sous les riffs aussi incisifs que répétitifs emporté par une force surnaturelle vers un univers parallèle frôlant sur son passage d'innombrables masses hideuses et informes. Mais ce chaos cosmique ne dure qu'un temps, « Hierophant Disposal Facility » prenant un tournant plus éthéré et onirique se délestant des effluves miasmatiques. Une sensation à la fois merveilleuse et effrayante due notamment au déferlement continu d'ambiances qui se poursuit jusqu'au titre de clôture « Crematorium Angelicum ».
« What you see is what you get » : à la manière de sa fantastique pochette,
De Masticatione Mortuorum in Tumulis est une entité peu humaine – suffisamment pour qu'on s'y plonge et s'y reconnaisse, fasciné – nous contemplant d'un regard fixe, agressif, entourée d'un monde de douleur. Ævangelist y est déjà unique, même si l'impression globale est étrangement celle d'une certaine retenue l'encombrant encore. C'est bien le seul défaut qu'on pourra trouver ici, défaut qui tient lui-même sa part de menaces. Qu'un tel monstre ne soit qu'une « entrée en matière » – expression inappropriée, on l'aura compris ! – donne quelques sueurs lorsque se lance le longue-durée qui lui succède,
Omen Ex Simulacra… à suivre !
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