C'était avec une forme d'appréhension que j'attendais ce The Liberation. Car DISILLUSION, c'était un groupe qui m'avait fait l'effet d'une baffe... Disons plutôt deux baffes ! La première, lorsqu'en 2011 je le prends sans trop savoir à quoi m'attendre, et que, au hasard du baladeur mp3, le titre
Back to Times of Splendor se lance. Repeat, repeat... Une boucle incroyable dans laquelle je décrypte tout. La deuxième baffe, lorsque je l'avais redécouvert un dimanche après-midi, au cœur de l'ennui et de la solitude. C'était un coup de cœur renouvelé, qui m'accompagnait de plus belle, jour après jour, et distillait une mélancolie automnale.
Disillusion, c'est pour moi un groupe de la nostalgie et du temps révolu. Un
Back to Times of Splendor sorti en 2004, dans un style de MeloDeath bien ancré dans son époque, le tout sous une forme Prog audacieuse et orchestrale qui en a laissé plus d'un sur le carreau.
C'est pour moi un deuxième album aux bonnes intentions, mais difficile à digérer. Je n'aime simplement pas la tournure du deuxième disque, où le groupe allemand tente de nouvelles expériences, mais qui délaisse ce qui m'avait plu chez eux : la grandeur, voire la grandiloquence, le côté « over the top » de leur musique.
C'est donc avec plein de doutes que j'ai lancé The Liberation pour la première fois. Treize ans après
Gloria, et avec un line-up totalement différent. Époque différente, groupe différent, mais une volonté de renouer avec leurs anciennes amours après plusieurs années de hiatus... Qu'en est-il, à l'arrivée ?
Il faut avant tout saluer la production. Car si
Back to Times of Splendor a divisé, c'est notamment pour un son parfois confus et compressé, rendant assez mal les moments intenses à grands renforts de pistes orchestrales et de guitares Melodic Death. Ici, rien de tout ça. Car si tu lances « The Great Unknown », tu comprends qu'on est dans du sacré niveau. À la manière d'un « Fall », ce titre se veut rentre dedans, MeloDeath dans l'âme avec ce riffing très marqué années 2000. Pourtant, sans que l'on y prenne garde, ça s'envole, et se dirige vers des horizons plus vastes que ce dont on avait pas l'habitude. Ce traitement des arrangements et l'utilisation d'un espace sonore très vaste se retrouve dans « Wintertide », pièce d'ouverture qui prend son temps sur douze minutes, et ramène aux grandes heures de
Back to Times of Splendor en terme de Prog élégant qui sait reposer son auditeur. C'est une invitation à l'introspection, au voyage : donc exit la prod agressive du premier album, on est là sur un son plus léché, plus net, plus poli. En résulte une musique forte et sans bavure, mais qui dévoile des nuances bien agréables au cœur d'une tempête maîtrisée, nous conduisant à ne faire qu'un avec nous même.
Dans le même ordre d'idée, le deuxième grand axe du disque, à savoir le titre éponyme « The Liberation », joue des coudes en terme de signatures rythmiques, et plaira énormément à ceux qui ont apprécié le premier méfait des allemands – ainsi qu'à ceux qui ne connaissent pas le groupe, car on retrouve un peu du PERSEFONE là-dedans ! L'orchestration ainsi que les chœurs ajoutent à la grandeur et, avec cette batterie aux multiples rythmes, on se retrouve à embarquer entièrement dans cette composition riche et bien amenée. Mention spéciale au chanteur qui, sans surprise, livre une interprétation qui vise juste.
Mais si la musique a gagné en finesse, niveau compositions, je ne serais pas aussi élogieux. Le son étant impeccable, est-ce que l'écriture est également un sans-faute ?
Sachez que, pour moi,
Back to Times of Splendor souffrait de moments bien « ventre mou », surtout sur le titre final que je trouvais trop long. Hélas, The Liberation m'a également ennuyé à plusieurs instants.
D'abord, il y a « Time to Let go », un morceau assez standard, ni bon ni mauvais, mais qui laisse un sentiment de déjà entendu ailleurs. Ça, c'est le moins gênant, parce que je le laisse tourner, je reste dedans. Là où j'ai du mal à résister à l'envie de passer le morceau ou de changer de disque, c'est quand des phases atmosphériques ou d'ambiance sont beaucoup trop longues et nuisent soit à la structure du morceau, soit à la structure complète du disque.
Ce cas de morceau qui fait buter le disque, c'est « A Shimmer in the Darkest Sea ». Tempo assez lent, peu de mouvement : ça se joue comme moment de transition sur sept minutes, qui tente le registre solennel. J'ai toujours du mal avec ce genre de morceaux, car ils peuvent souvent plomber le rythme. « The Great Unknown », le titre précédent, nous a justement conduits du MeloDeath vers l'accalmie, et retomber derrière sur un morceau aussi grave misant sur l'atmosphère et les arrangements, pour moi on perd en efficacité, et c'est dommage. Ça me fait l'effet d'un flottement automatique, là où j'aurais bien apprécié que, après la monté amorcée à la quatrième minute du titre, le groupe en vienne aux mains, en mode parpaing dans le bide... Hélas, ça ne vient pas.
Mais quand l'énergie vient enfin, ce n'est pas forcément pour un résultat décoiffant. Et là, je vais devoir évoquer le dernier acte, l'ultime moment pour le groupe de montrer tout ce qu'il a et de nous en mettre plein les oreilles : « The Mountain ».
Eh bien ça peine à monter, je trouve que l'intro prend trop de temps, et qu'on replonge dans les travers de « A Shimmer in the Darkest Sea » : ça ne décolle jamais véritablement, ça reste assez statique. J'oserais dire que ça m'évoque là le OPETH qui me fait lâcher prise, quand justement on est sur des éléments moins audacieux, quand la créativité a laissé place à des moments où tout passe par les arrangements et les ambiances. Autrement dit, je ne me sens pas investi, et je lâche prise assez rapidement. Surtout à partir de la quatrième minute, on part sur quasiment deux minutes de langueur, puis ça grimpe très, très mollement jusqu'à un solo à 10:06 qui est bon seulement car je l'ai péniblement attendu. Six minutes d'errance pour qu'enfin je me sente m'envoler... Oui, c'est réussi, mais est-ce que je vais relancer ce morceau pour m'imposer ce laps de temps très long pour un solo qui fait le taff sans être exceptionnel ?
Et c'est sur ça que me laisse The Liberation, cette question en suspens, cette amertume finale : vais-je relancer le disque fréquemment ? On touche là à quelque chose de personnel et, bien sûr, je pense que des personnes appréciant le Prog très orienté ambient vont trouver là un disque aux grandes qualités. Et c'est indéniable : Disillusion propose ici un travail soigné, avec un son quasi-parfait. Aucune fausse note dans les arrangements, le mix est impeccable. Objectivement, ce disque tient la dragée haute. Pour ce qui est des compositions, tout dépendra de vous.
De mon côté, la faible teneur en riffs marquants, la présence majoritaire du tempo calme et des nappes voluptueuses, le fait que le MeloDeath soit aussi rare et le manque de moments d'audaces turbulentes, tout ceci me fait lâcher prise, et me dire que Disillusion s'est drastiquement calmé.
Un disque mature pour des compositions mesurées, posées.
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