Je n’ai jamais aimé l’or et ce qu’il représente. Honnêtement, ce que certains voient comme le summum du luxe, de la beauté, de la finesse, me semble grossier, kitsch, une opulence fière de s’afficher elle-même.
Alors quand 16 affuble son nouvel album de sa première pochette dorée – et d’une façon aussi ostentatoire –, je me méfie forcément. Qu’attendais-je de ce groupe cher à mon petit cœur de sludgeux, à part de nouveaux hymnes à la vie de taulard où le concassage des guitares devenait une fois de plus la métaphore de celui subi derrière les barreaux ? Honnêtement pas grand-chose, un disque comme
Lifespan of a Moth m’ayant satisfait dans son classicisme.
Dès sa pochette,
Dream Squasher avertit que les choses ne seront chez lui pas comme d’habitude. Car, après vingt-six années d’activité, quelques variations dans le discours mais grosso modo toujours ce même style entre sludge historique et noisecore des années 90, 16 décide de modifier son propos. Autant dire que cela passe au départ difficilement, et pas qu’un peu : short de sport mis pour l’occasion, les haltères à portée de main, la déconvenue est telle qu’elle oblige à arrêter rapidement les frais, cherchant dans ces quarante-deux minutes sa formation chérie comme on se demande, d’un coup, où on a bien pu mettre ses clés. Jusqu’à, agacé, appuyer sur le bouton stop, devant ce qui semble être alors un étalage de maladresse clinquante de la part des Ricains.
Il m’a fallu donc dépasser un écœurement, écouter l’avis d’autres, retenter sans espoir une musique qui « ose », et en premier lieu ose espérer. Qu’on range directement les pancartes ! 16 reste ce groupe à l’amertume particulière, seulement, son maître-chanteur parti à la retraite pendant l'enregistrement (ce qui ne s’entend pas immédiatement tant Bobby Ferry reprend le micro de façon similaire), il se laisse aller, pris d’une liberté nouvelle. Et, une fois acceptés les nouveautés et détours, me voilà bien obligé de constater que cela marche, et pas qu’un peu ! Les clés retrouvées, c’est l’ivresse de vivre, de se balader de décors en décors avec talent, qui se trouve dans nos pognes surprises. Cet incroyable tube réclamant de faire rugir son moteur intérieur qu’est « Me & the Dog Die Together » ; la grâce tranquille de « Sadlands » et ses relents grunge allant si bien à la bande ; « Screw Unto Others », sa rage au ventre, ses muscles taillés par les années, ses respirations soudaines et altières... Bobby Ferry ne fait pas qu’imiter son prédécesseur : il alimente, plus que ses autres complices attachés à suivre ses ordres, la musique de 16 d’un monde nouveau, entre souvenirs d’autrefois (« Candy in Spanish » ou encore « Summer of ’96 ») et explorations de nouveaux territoires en promeneur dominateur gardant ses pratiques de taulard, veillant à faire sien chaque carré de la cour de prison.
Ce qui fait de
Dream Squasher non pas un disque de rupture, comme un chroniqueur en manque d’inspiration serait tenté de le définir, mais un album où 16 se prolonge et s’épanouit, rendant lisibles certaines parts d’ombre que l’on sentait chez lui. Clairement marqué par les nineties mais aussi hautement personnel et actuel, l’essai finit même par se rapprocher dans mon esprit d’un certain
Hangman’s Chair, dont les dernières œuvres me transmettaient des flashs d’une version nocturne, française et romantique, de ce que ces Ricains au cœur gros comme le poing pouvaient donner à ressentir. 16 en devient ici, plus qu’ailleurs (et notamment l’ensoleillé
Bridges to Burn), un frère d’âme, plus âgé, buriné par le temps, cherchant dans le jour ses euphories et du baume pour ses peines.
Ainsi, le regret de voir 16 évoluer sur
Dream Squasher finit par tomber dans l’excès inverse : face à tant de réussites multiples, les instants où la bande colle de près aux attentes paraissent moins percutants et satisfaisants malgré un savoir-faire indéniable (« Acid Tongue » par exemple). Le reste est un déballage savoureux d’envies diverses se mariant parfaitement aux qualités connues et reconnues de la formation, envahissant l’espace comme un Roi en sa demeure. Une dernière idée laissant penser que l’or va finalement bien à cet album, tant les Ricains y assument et affichent avec un bonheur partagé une majesté retrouvée.
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