The Chariot - Long Live
Chronique
The Chariot Long Live
Pardon ? Thrashocore, ce panel rutilant d’hommes et de femmes dévoués et passionnés a fait l’impasse sur The Chariot ? Ces beaux diables avides de metal noir et sombre auraient-ils été aveuglés par la lumière ? Il m’incombe alors de venir remettre l’église sur la place du village. Déjà parce qu’il est bien un prophète en ces lieux, c’est Josh Scogin. Ensuite parce que parmi tous ses évangiles (que ce soit sous les noms Luti-Kriss, Norma Jean, The Chariot ou encore ’68), Long Live est celui qui me semble être le plus convaincant, le plus habité pour ne pas dire le plus possédé. Une chronique tout en neutralité, donc.
2010. Trois ans après, ils prenaient leur sac et leur flambeau et faisaient leurs adieux (temporaires) à cette scène qu’ils affectionnent tant. « Temporaires » car si les chemins des apôtres géorgiens se sont séparés, il serait abusif de dire que la flamme est éteinte. Pour certains, elle brûle chez The Threats, chez d’autres c’est du côté de Fever 333, sans oublier bien sûr ’68. « Cette scène qu’ils affectionnent tant » car The Chariot était et restera dans les annales comme un groupe de scène. Jusqu’à son paroxysme puisque leurs premiers albums étaient enregistrés en une prise, question de pouvoir rejoindre plus vite les planches, qu’ils détruisaient allègrement. Car oui, avant même de m’intéresser au contenu gravé sur Long Live, je me dois de rendre hommage à ce qu’était The Chariot sur scène. Une fureur inégalée, une catharsis collective, une hystérie incontrôlable et impossible à maîtriser. A l’instar de ce que vous voyez sur la pochette ou encore des performances de feu-The Dillinger Escape Plan, l’expérience se vivait intensément, dangereusement, à fond. Pour ceux qui, comme moi, n’ont eu la chance inouïe de les vivre, je vous invite à vous rendre sur le tube afin d’y glaner des bribes, des restes, des reliques. En ces temps mornes, distants et méfiants, je mets une pièce que ces enregistrements peuvent vous tirer une larmichette.
Mais alors, qu’est-ce qu’un enregistrement face à la décharge émotionnelle d’un live comme ceux-ci ? Et bien ce qui aura fait rentrer ce groupe dans la légende, c’est justement qu’ils ne négligeaient pas leurs offrandes gravées. Je ne vais pas répéter incessamment que le son est abrasif et explosif, prenez ça pour acquis et gardez-le dans un coin de votre tête. Ceci étant dit, les morceaux pourraient ici être rangés en deux catégories, certes perméables mais relativement marquées : d’un côté, des titres chaotiques au possible, toujours à la frontière du noisy, grinçants et couverts de larsens, dont les rythmiques ne sont pas toujours claires et marquées. L’ouverture « Evan Perks » en est un exemple flagrant, « Andy Sundwall » un cas d’école. De l’autre côté, on trouve des chansons comme « David De La Hoz » ou encore « Calvin Makenzie », radicalement punk, avec une composition qui va constamment de l’avant, même si elle est interrompue par un break par-ci, un spoken word par-là (le guest Dan Smith, ici, impérial dans son spoken-word). Entre deux, à la frontière, « The Audience », « The King » ou encore « The City », qui rayonne dans un sing-along dignes des chants d’église les plus vibrants, lumineux et unificateurs.
Une demi-heure plus tard, la messe est dite. Le chaos s’estompe dans un decrescendo lent, bruitiste, le temps que chacun reprenne ses esprits et que la vie reprenne son cours normal. Essuyez vos larmes, faites redescendre la rage, vos pulsions les plus animales ont été exorcisées et il ne vous reste plus qu’à être reconnaissant, béat. Aura-t-on la chance, de notre vivant, de revivre l’expérience d’un tel groupe ? Rien n’est moins sûr.
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