Dream Theater - When Dream and Day Unite
Chronique
Dream Theater When Dream and Day Unite
Comment naissent les légendes ? Sur un malentendu, bien souvent. John Petrucci et John Myung, amis d'enfance originaires de New York sont devenus extrêmement potes avec Mike Portnoy à la Berklee School of Music de Boston. Ces trois là, outre une passion quasi obsessionnelle pour leurs instruments respectifs, se saignent constamment les albums de Rush dans leurs platines vinyles respectives. Lorsqu'un beau jour de l'année 1985 où ils campent devant les portes de la salle de concert qui doit accueillir leurs idoles, leur batteur déclare que la fin du morceau « Bastille Day » est absolument « majestueuse », nos trois frères d'armes décident alors, unanimes, de s’appeler Majesty, avant de se rendre compte quelques démos plus tard que ce nom de groupe était déjà pris. Que reste-t-il de l'autre « Majesty » de l'époque ? L'histoire ne nous le dira pas, mais c'est sous le nom Dream Theater que nos trois lascars produisent leur premier full-length en 1989, accompagnés d'un claviériste rencontré à Berklee, Kevin Moore et d'un nouveau chanteur, Charlie Dominici, engagé pour remplacer au pied levé Chris Collins, parti faire son service militaire.
Si ma découverte de ce groupe dans les années 2000 a été un choc absolu pour moi, je n'ai régularisé qu'assez tardivement ce premier opus. Il est, encore aujourd'hui, assez mal connu car totalement écrasé par son petit frère qui lancera à son heure le groupe dans une nouvelle dimension. Les membres historiques du fan club français Your Majesty hurleraient au scandale s'ils lisaient ces lignes, eux qui s'échangeaient – et s'échangent encore – avec une ferveur exemplaire les démos et autres bootlegs du groupe avant même que ne paraissent When Dream and Day Unite. Je dois bien leur rendre justice : même s'il me paraît indéniable que le groupe se cherche encore, il se trouve dans plusieurs tubes qui touchent du doigt le futur génie du groupe : « Only A Matter of Time », par exemple, demeure un hymne absolu comme en témoigne la version live captée lors du légendaire Live at Budokan (2004). Des années auparavant, ces coups de crash de Mike Portnoy encouragés par le son poussiéreux issu des années 80, ces riffs bigarrés et ces lignes de chants emblématiques donnaient déjà envie de hurler le point en l'air :
« A suited man smiled said :
'It's just a matter of time
You can have the world at your feet by tomorrow!
Just sign on this line!' »
Pour le moins prémonitoire... si la production marquée par son époque reste très authentique, elle permet aussi de dévoiler l'éclatante technique de John Myung, qui se distingue par des soli déjà extraordinaires. J'ai toujours été absolument ébaubi par la discrétion et l'efficacité de ce bassiste tentaculaire, ses envolées très surprenantes ne cesseront jamais de me fasciner, comme dans « The Ytse Jam », morceau instrumental totalement épique qui installe un duel dantesque avec son comparse John Petrucci et sa technique de shred déjà bien affirmée et un Kevin Moore qui regarde ses deux camarades dans les yeux lorsqu'il participe, armé d'un son de clavier délicieusement marqué par son temps, à la bataille mélodique. Quand il s'endort dessus en envoyant des atmosphères délicieusement 70's (« Light Fuse and Get Away »), il illumine Dream Theater avec un son qui effraiera certainement les esthètes d'aujourd'hui et aura l'occasion de sublimer le combo avec ses compositions marquantes par la suite.
Charlie Dominici, tout en tremolos fort maniérés (« The Killing Hand ») qui fleurent bon les années 80 aura marqué l'esprit des fans les plus anciens puisque certains m'ont confié le regretter encore, malgré les très nombreuses années pendant lesquelles son successeur amateur de crevettes incarnera – et incarne encore – la voix du groupe. Si sa tessiture envoie des oeillades appuyées à Geddy Lee de Rush, il se dégage de ses lignes de chant un feeling clairement heavy metal, comme le montre le génial morceau « Afterlife », que même Keyser ou encore les amateurs d'Iron Maiden pourront se surprendre à apprécier. Mais disons-le tout de go, le vocaliste en fait des caisses. Sans doute est-ce pour répondre au génie de ses camarades qui écrasent cette galette de tout leur talent, John Petrucci, serial riffeur inspiré et compositeur accompli, en tête.
Ce talent n'en était pourtant qu'à ses balbutiements en 1989, encore assez loin des éclairs que lancera le groupe dans la suite de sa carrière. Si les fans de la première heure de Dream Theater y restent si irrémédiablement attachés, c'est probablement plus pour la divine nostalgie que leur procurent les quelques morceaux cultes issus de ce premier opus que pour leur qualité intrinsèque. Il n'y a qu'à voir comment sont accueillis les « Afterlife » (sur Score en 2006) et autres « Only A Matter of Time » lorsqu'ils sont ressortis des placards et joués en live... pourtant, et même si j'ai grande peine à en dire du mal, When Dream and Day Unite reste parsemé de longueurs et d'erreurs de jeunesse, à l'image de l'interminable introduction de « The Ones Who Help to Set the Sun », encore loin des pièces progressives fleuves qu'offrira le groupe dans le futur. Si ce valeureux effort peut tout de même s'asseoir à la table de bon nombre d'albums du même genre, à l'échelle de la discographie des New-Yorkais, c'est un brouillon qui leur permettra d'accoucher sans douleur de futures pièces maîtresses.
| Voay 13 Décembre 2020 - 1120 lectures |
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