Paru en mai dernier à travers différents formats proposés respectivement par Blood Harvest Records (vinyle), Black Hole Productions (CD), Rotted Life Records (vinyle) et Sewer Rot Records (cassette),
Four Dimensions Of Auditory Terror n’est ni plus ni moins que la réunion de quatre groupes particulièrement prometteurs dont on a d’ailleurs déjà parlé ici. Enfin pour trois d’entre eux puisqu’il manque tout de même à l’appel Blood Spore qui malgré un sympathique EP paru il y a deux ans sur le label de Rodrigo Alfaro (
Fungal Warfare upon All Life) n’a pas su trouver une place dans nos colonnes. Tant pis pour cet oubli davantage lié à un emploi du temps chargé plutôt qu’à un manque quelconque d’atouts à faire valoir, je pourrais toujours décider de m’y atteler un de ces quatre...
En attendant que ce jour arrive, revenons à l’objet de cette chronique, ce split à quatre têtes sur lequel en plus de Blood Spore on va également retrouver leurs petits copains de Coagulate, Gutvoid et Soul Devourment. Un line-up de choix pour un programme tout aussi alléchant avec un morceau inédit par groupe pour une durée totale affichée à un petit peu plus de trente minutes. Côté artwork et coups de crayons, ces derniers sont l’œuvre d’Adam Michael Nevler aka Nev aka Gruesome Graphx (Burial Invocation, Cardiac Arrest, Vrenth...) et Kyle Messick (Civerous, Cryptum, Mortuary Spawn...). Le premier signe cette illustration plutôt sympathique que vous pouvez voir sur votre droite alors que le second s’est quant à lui vu confier l’intérieur du livret.
C’est justement Blood Spore qui ouvre les festivités avec "Olfactory Cordycipitaceae Ingress", une pièce imposante de plus de neuf minutes lors de laquelle le groupe de Philadelphie va dérouler un Death Metal sombre et pesant mené pour l’essentiel à coup de séquences plombées particulièrement vicieuses et suffocantes. S’il n’y a bien évidemment rien de sorcier dans cette formule quelque part entre Death et Doom, le groupe maitrise néanmoins l’art subtile de la mise en tension, délivrant ainsi avec une parcimonie habilement calculée quelques coups de boutoirs bien sentis (à partir de 6:56) histoire de quand même relâcher la pression durant les minutes précédentes. Aussi, à la manière d’un Ossuary chez qui le chant joue un rôle très important dans la construction de ces atmosphères sournoises, le rôle de Christopher Emerson n’est ici pas à sous-estimer. Sa voix abrasive, arrachée et vicelarde porte en elle des vices immondes et une espèce de folie malaisante que ces riffs plombés vont prendre plaisir à accompagner. Bref, une entrée en matière pour le moins réussie.
C’est Coagulate qui va ensuite prendre le relai avec "Up From The Vats (Coalescence Of Metamorphic Human Flesh Within A Gelatinous Fetal Stew)", un morceau aussi long que son intitulé puisque celui-ci s’affiche également à près de neuf minutes. Faisant suite à une première démo particulièrement prometteuse (
The Art Of Cryptosis), le groupe originaire de Minneapolis reprend ici le chemin de ce Death Metal relativement alambiqué dont les tournures et certaines sonorités évoquent tout à la fois Demilich, Morpheus Descends, Phlebotomized ou Undergang. On va ainsi retrouver avec le même plaisir qu’il y a bientôt deux ans ce fameux riffing tarabiscoté qui, entre coups de sang nerveux et passages plus lourds et pesants, prend satisfaction à bousculer l’auditeur dans tous les sens, ces variations de rythmes plus ou moins soutenues qui vont ainsi entretenir une certaine dynamique tout au long de ces longues minutes, cette basse métallique aux rondeurs indécentes et bien évidemment ce chant profond évoquant un certain Antti Boman plus lointain et en même temps plus intelligible. Là encore, la sauce prend sans difficulté et on a une fois de plus aucun mal à se laisser séduire par le Death Metal des Américains.
Changement de ton avec les Californiens de Soul Devourment et leur Death Metal HM2 qui vont venir la jouer ici de manière beaucoup plus frontale. Servi par une production à l’ancienne, naturelle et un brin cradingue et un son de guitare qui effectivement doit beaucoup à Tomas Skogsberg et aux Sunlight Studios, le groupe de Los Angeles ne va pas y aller par quatre chemins, s’imposant ici par la force à coups d’accélérations haletantes menées pied au plancher sur fond de tchouka-tchouka ultra entrainants (et même quelques blasts lancés avec conviction à partir de 3:06) et de riffs abrasifs simples mais néanmoins particulièrement efficaces. Avec "Veneration Of The Ascended", les Californiens font donc une fois de plus très bonne impression malgré le caractère peu original que revêt leur modeste contribution.
Ce sont les Canadiens de Gutvoid qui ont la tâche ingrate de clôturer en beauté cette collaboration. Dans la continuité de ce Death Metal aux dissonances et aux constructions modernes prenant pourtant racine du côté de quelques grands anciens (Demilich et Timeghoul en tête de lice) proposé sur
Astral Bestiary, le groupe de Toronto offre avec "Murmurations From Twilight Bodies" un titre tout aussi savoureux, attestant notamment des très bonnes dispositions dont le groupe faisaient déjà preuve il y a de cela un peu plus de deux ans. Outre cette production bien de notre époque alliant puissance, densité et lisibilité, le groupe va ici mettre l’accent sur sa capacité à varier les plaisirs et sur ses aptitudes mélodiques tout à fait évidentes. Pour la première, cela se traduit par de nombreux changements de rythmes et autres variations dynamiques (accélérations soutenues, ralentissements pesants, séquences plus aériennes ou tarabiscotés...) qui vont permettre d’amener énormément de relief à ce titre de plus de sept minutes. Pour la seconde, on le constate aisément à travers ces nombreux leads et autres solos dispensés ici généreusement à 0:43, 1:16, 1:36, 2:23, 4:29 et 6:16 et qui à leur manière vont permettre d’amener une dimension plus profonde et spatiale à leur Death Metal. Dans les deux cas, il s’agit d’atouts précieux qui une fois de plus participent grandement à la qualité de ce titre et par la même occasion permettent à Gutvoid de clôturer comme il se doit cette fructueuse collaboration.
Si le split est un format que les gens n’affectionnent pas particulièrement ou ont tendance à ignorer pour x ou y raisons,
Four Dimensions Of Auditory Terror n’en reste pas moins une sortie de grande qualité. Dans des registres différents les uns des autres, Blood Spore, Coagulate, Soul Devourment et Gutvoid proposent ici quatre morceaux particulièrement savoureux qui ne devraient pas manquer d’interpeller l’amateur de Death Metal en quête de bonnes choses à se passer dans les oreilles. C’est en tout cas le moyen idéal pour découvrir ces quatre formations prometteuses dont on attend maintenant les premiers albums avec beaucoup d’impatience.
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