Canid - Saint Serpentine
Chronique
Canid Saint Serpentine
"Vous qui entrez ici, abandonnez toute espérance."
La citation tirée de La Divine Comédie a tellement été mise à toutes les sauces qu'elle en parait presque intégralement démonétisée. Elle a néanmoins toute sa place ici, même si l'on se rendra vite compte que le désespoir n'est pas précisément le créneau de Canid. Ça serait plutôt "rien, ou l'art de s'y abandonner". En l'occurrence, un nihilisme vaguement ésotérique et citadin, inamical, et quelque peu cacochyme. Canid ne montre pas les dents, il ne lui en reste pas des masses d'ailleurs; il grogne bien un peu, mais au fond il ne semble pas en avoir grand chose à carrer. Il en a marre. Non, il est même bien au-delà de ça. Nihiliste, je vous dis.
Répétitive, sans toutefois l'être réellement, la musique parvient nonchalamment à vous plonger dans un état autre. Quelque peu anesthésié, vous pénétrez ainsi le brouillard, la neige d'un vieux récepteur TV analogique. Seuls des petits bruits chroniques et inquiétants font mine de maintenir votre esprit en alerte, mais en vérité, ils accroissent le malaise, et la sensation d'un glissement se fait lentement, inexorablement, plus prégnante. C'est relativement sale ici, mais il se dégage une sorte d'étrange élégance surannée, austère, Jazz, pour ainsi dire. Pas franchement terrifiant de prime abord, mais pour qui a déjà vu le Stalker de Tarkovski, on se sentirait presque avoir pénétré la Zone. La décrépitude est partout. Ils avaient pourtant l'air inoffensifs, ces petits crissements erratiques... Désabusé, dégingandé, distant, le morne Doom / Black Metal de Canid est tout ça. Lui qui n'est rien, c'est déjà énorme ! Surtout que le charme contre-nature fonctionne. Si bien que l'on pourrait ne pas voir venir le coup bas, serpentant dans l'obscurité, l'humeur maussade. Peut-être même qu'on ne le ressentira pas sur l'instant, mais j'ai bien peur que le poison de cette noirceur neurasthénique coule d'ores et déjà dans nos veines. Les bruits parasites reprennent... avaient-ils vraiment cessé ? Saurait-on encore le dire, alors que tout semble désormais si loin.
À peine trente-cinq minutes viennent de s'écouler à l'écoute de Saint Serpentine. L'impression persistante que c'était plus que ça, et simultanément, aucune sensation d'avoir trouvé le temps long. Un paradoxe, mais sûrement pas un hasard. Il faut bien le reconnaitre, le duo à l’œuvre, dont un certain Vvaake que l'on connait déjà pour son travail au sein de Vual, fait preuve d'un savoir faire indéniable dans l'artisanat d'un riffing "noir c'est noir", et également d'une inventivité, discrète mais certaine, dans la "construction" de ces morceaux, même si le terme déjà utilisé plus haut de glissement me semble plus à propos. Tout coule de source, de sobre manière, fort habilement.
Le groupe se revendique comme un rejeton -forcément bâtard- de Beherit, Winter, et Amebix, pour n'en citer que quelques-uns, et je m'en voudrais de le contredire. Mais Canid offre tout de même largement plus qu'un bête hommage, aucun doute là-dessus.
"Donny: Are these the Nazis, Walter ?
Walter Sobchak: No Donny, these men are nihilists. There's nothing to be afraid of."
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