Allez savoir pourquoi, l’Autriche n’a jamais été un pays particulièrement versé dans les musiques dites extrêmes et cela quel que soit le genre. Alors évidemment, si l’on parle de Death Metal il y a bien quelques exceptions que l’on se doit de connaitre telles que Pungent Stench, Miasma, Disastrous Murmur ou Belphegor mais la vérité est qu’elles se comptent sur les doigts d’une seule main ou presque (j’en oublie certainement mais probablement pas tant que ça). Naturellement, il convient d’y ajouter les illuminés de Disharmonic Orchestra qui sont assurément l’un des meilleurs représentants (encore en activité) de la scène autrichienne.
Formé en 1987 par Patrick Klopf (chant, guitare, basse) et Martin Messner (batterie), le duo est rapidement rejoint par Harald Bezdek (guitare, basse). Ensemble, le groupe va enchainer les sorties avec pas moins de quatre démos parues en 1988. Se faisant, Disharmonic Orchestra va attirer l’attention du label américain Nuclear Blast Records qui signera les Autrichiens dès l’année suivante pour la sortie d’un split en compagnie de leurs compatriotes de Pungent Stench ainsi que d’un EP intitulé
Successive Substitution. Un début de carrière particulièrement chargé et extrêmement encourageant qui donnera lieu en avril 1990 à la sortie du premier album de Disharmonic Orchestra.
Intitulé
Expositionsprophylaxe, celui-ci donne déjà l’impression de vouloir sortir des sentiers battus et surtout de s’affranchir des codes déjà bien établis dans le milieu. Loin des artworks démoniaques, fantastiques, sanguinolents et explicites auxquels n’importe quel amateur de Death Metal et de Grindcore était à l’époque déjà largement confronté, les Autrichiens ont préféré opter pour quelque chose de profondément plus anodin. Cette photo d’un bâtiment défraichit et à l’abandon n’a évidemment rien de très excitant puisqu’elle nous ramène à une réalité que chacun est en mesure d’expérimenter là où à l’inverse les oeuvres de Dan Seagrave (par exemple) étaient (et sont toujours) une porte ouverte sur l’imaginaire. Pourtant, avec la présence de ce parapluie ouvert dans un endroit où celui-ci n’a pas spécialement lieu d’être, Disharmonic Orchestra semble déjà nous dire qu’il ne faudra pas compter sur lui pour respecter à la lettre ce cahier des charges auquel reste très attaché bon nombre de formations estampillées Death Metal. Une posture qu’il confirmera bien plus franchement avec son deuxième album intitulé
Not To Be Undimensional Conscious dont l’illustration peut probablement expliquer en grande partie pourquoi le succès n’a jamais vraiment été au rendez-vous malgré toutes les qualités dont font preuve les Autrichiens sur ses deux premiers albums (la suite étant moins évidente à aborder).
Car en effet Disharmonic Orchestra n’a pas grand chose à envier aux plus grands noms de l’époque. À la manière d’un Carbonized, période
For The Security (qui oui, je sais, ne sortira que l’année d’après), les Autrichiens proposent sur ce premier album un Death Metal aux fortes résonances Grindcore. Si la formule s’avère déjà relativement convenue pour l’époque (Repulsion, Terrorizer et Napalm Death sont déjà passés par là quelques années auparavant), elle n’en reste pas moins habilement exécutée avec son lot de riffs simples mais ultra efficaces ("Life Disintegrating", "Sick Dishonourableness", "Psychoanalysis", "The Unequalled Visual Response Mechanism"...), de fulgurances explosives et intenses ("Life Disintegrating" à 0:36, "Successive Substitution" à 1:05, "Quintessentially Unnecessary Institution" à 0:48, "Disappeared With Hermaphrodite Choirs"...) mais aussi de séquences au groove plus subtil mais toujours aussi délicieux (les premières mesures d’"Inexorable Logic", "Life Disintegrating" à 1:32, "Sick Dishonourableness" à 1:29, "Disharmonisation" à 1:15...).
Cependant, là où les Autrichiens réussissent à se démarquer de manière significative, c’est grâce en grande partie au jeu chaloupé de leur batteur. Celui-ci s’exprime par le biais d’une approche libre et ultra-dynamique qui en appelle beaucoup au Jazz. Aussi, ce groove évoqué plus haut doit beaucoup à ce côté syncopé et rythmiquement très marqué de Martin Messner. Des parties de batterie originales et inventives qui apportent, malgré une approche encore un poil classique en comparaison de ce qui suivra, une saveur toute particulière au Death / Grind de la formation. Naturellement, les riffs de Patrick Klopf se plaisent eux aussi à s’aventurer en ces territoires tarabiscotés. Un riffing dont la complexité et l’étrangeté d’un point de vue rythmique rappelle d’une certaine manière ce que l’on retrouvera quelques mois plus tard chez les Finlandais de Demilich (si cela ne m’a pas forcément sauté aux oreilles de prime abord, c’est tout de même assez flagrant sur des titres tels que "Inexorable Logic", "Life Disintegrating", "Sick Dishonourableness", "Psychoanalysis", "Hypophysis", "Disharmonisation" et j’en passe...). Enfin, de manière plus sporadique, Disharmonic Orchestra s’adonne également à quelques expérimentations intéressantes ("Introphylaxe" et son côté Mad Max sous LSD) et autres sonorités qui sortent quelque peu de l’ordinaire (ces notes de basses solitaires exagérément mises en avant sur "Accelerated Evolution" à partir de 2:09).
Abordé de manière désinvolte,
Expositionsprophylaxe s’apparente à un bon mélange entre le Carbonized de
For The Security et le Napalm Death de
From Enclavement To Obliteration. On va en effet y retrouver tout ce qui fait le charme de ces deux groupes : ce growl aux intonations très proches de celles d’un Barney Greenway, ces accélérations radicales et intenses, ces riffs lourds et sinistres, cette énergie Punk déglinguée évidente... Bref, rien de bien nouveau en apparence. Seulement si l’on décide d’y jeter une oreille attentive, on remarquera rapidement que Disharmonic Orchestra à plus à offrir qu’une simple relecture Death / Grind à la manière des précurseurs du genre. On va en effet trouver chez les Autrichiens quelque chose de bien à eux, une dynamique atypique, un sens du rythme et de la cadence qui sort de l’ordinaire et qui suggère en effet (avec l’aide de cet artwork qui probablement en aura laissé plus d’un circonspect) que le groupe aspire à autre chose qu’être une simple copie, aussi efficace et pertinente soit-elle.
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