Peut-être que si j’avais été moi-même musicien j’aurai pu me montrer aussi productif et inspiré que l’Italien Gabriele Gramaglia ? Seulement voilà, je ne le suis pas et les quelques tentatives opérées durant mon adolescence n’ont jamais rien donné faute de prédisposition en la matière et peut-être (surtout) de motivation et d’assiduité. Du coup, je me suis naturellement tourné vers le rôle de chroniqueur, refuge pour artistes frustrés et autres énergumènes incapables de gratter trois accords correctement. Ce qui suit est donc un de mes énièmes "papiers" parce que oui, en plus de ne pas être musicien je suis chroniqueur web (que d’échecs)...
Si je vous raconte tout cela c’est surtout pour vous dire qu’il n’aura fallu qu’un tout petit peu plus de deux ans à Gabriele Gramaglia pour donner une suite à l’excellent
Crepuscular Dirge For The Blessed Ones. Parue en octobre dernier chez Profound Lore Records, celle-ci s’intitule
Emerald Fires Atop The Farewell Mountains et renoue avec quelques collaborateurs proches de la formation puisque l’on retrouve effectivement derrière les fûts monsieur Giulio Galati (Nero Di Marte, ex-Ade, ex-Continuum Of Xul, ex-Hideous Divinity, ex-Mass Infection...) qui pour l’occasion a confié une fois de plus l’enregistrement de ses parties de batterie à Alessio Cattaneo. En homme à tout faire définitivement accompli, l’Italien à la tête de Cosmic Putrefaction signe une fois de plus l’enregistrement de tous les autres instruments ainsi que le mixage mais a laissé le mastering à Simón Da Silva (Aversio Humanitatis, Odz Manouk, Pestilength, Velo Misere, Vertebra Atlantis, Wormed...). Enfin, pour en finir avec ces présentations, sachez juste que l’illustration qui orne ce quatrième album est l’oeuvre du Serbe Stefan Todorović aka Khaos Diktator. Un homme appliqué à qui l’on doit tout un tas d’artworks particulièrement réussis (Diabolic Oath, Heresiarch, Of Feather And Bone, Rothadás, Schizophrenia, Vacivus...).
Affiché à quarante-trois minutes et composé de sept nouveaux morceaux,
Emerald Fires Atop The Farewell Mountains est donc à la fois plus court et plus long que son prédécesseur puisqu’il est effectivement plus court d’un titre mais plus long d’une bonne minute. Un détail qui a priori ne signifie pas grand chose mais qui sous-entend tout de même que la durée de chaque composition s’est donc sensiblement allongée et donc par truchement que Cosmic Putrefaction a naturellement cherché à étoffer son propos.
En effet, ce quatrième album se distingue de ses prédécesseurs et du plus récent
Crepuscular Dirge For The Blessed Ones par une approche à la fois plus riche instrumentalement parlant mais aussi plus progressive. À ce titre le morceau "Emerald Fires Atop The Farewell Mountains" qui clôture l’album est probablement le plus parlant avec notamment l’usage d’un chant clair aux intonations variées - d’abord plus sombres puis finalement déclamatoires et lumineuses (un peu à la manière d’un Enslaved) - que nous n’avions encore jamais entendu chez Cosmic Putrefaction (et que l’on doit plus probablement à Giorgio Trombino d’Assumption, Becerus, Bottomless et Shrieking Demons invité ici à pousser la chansonnette), d’un violoncelle aux cordes pincées, de longues séquences atmosphériques menées à grand renfort de nappes synthétiques mais aussi de leads et autres solos plus mélodiques qu’à l’accoutumé (là encore Enslaved n’est pas loin)... Évidemment, ce n’est pas le seul morceau où l’on peut faire ce constat mais que ce soit ce chant mélodique plus lointain ou cet orgue entendu sur "Hallways Engraved In Aether", cette longue séquence instrumentale et aérienne de plus de trois minute en guise de conclusion à "Swirling Madness, Supernal Ordeal" ou bien encore ces quelques notes acoustiques dispensées sur "Swirling Madness, Supernal Ordeal" ainsi que sur l’introduction d’"(Exiting The Vortex Temporum) - The Clearing Path", ces sonorités sont amenées de manières plus diffuses et cela sans jamais prendre l’ascendant sur le Death Metal de la formation italienne. Alors comme souvent, il est probable que ce léger virage ne soit pas du goût de tous mais après avoir parfaitement digéré les influences de groupes tels que Blood Incantation et Demilich sur son prédécesseur, Cosmic Putrefaction poursuit son développement et sa quête d’émancipation de manière extrêmement convaincante. Et puis surtout, on ne peut pas dire que le one-man band italien ait perdu en intensité ni même en brutalité en opérant cette subtile transformation.
En effet, le jeune trentenaire ne fait toujours pas semblant puisque
Emerald Fires Atop The Farewell Mountains est dans l’ensemble un album dense et technique caractérisé par un riffing nerveux qui ne tient pas en place et une section rythmique à l’avenant tout aussi généreuse lorsqu’il s’agit d’enchaîner blasts à la mitraille, cadences syncopées et autres démonstrations de force conquérantes. De fait, si le morceau-titre dispensé en fin de parcours vient effectivement calmer le jeu en dépit de quelques passages encore bien virils, le reste de l’album est ponctué de nombreux coups de boutoirs et autres soufflantes dispensées avec une conviction des plus féroces. De "(Entering the Vortex Temporum) - Pre-Mortem Phosphenes" à "I Should Greet the Inexorable Darkness" en passant par "Eudaemonist Withdrawal", "Swirling Madness, Supernal Ordeal" ou "(Exiting the Vortex Temporum) - The Clearing Path", il vous faudra une fois encore avoir le coeur bien accroché pour espérer suivre tout au long de ces quarante-trois minutes à la fois riches, complexes et variées le père Gramaglia avec ses riffs demilichiens, sa basse vrombissante et ses éructations multiples (growl profond, hurlement douloureux, etc) et son comparse Giulio Galati, brute volontaire toujours aussi tentaculaire.
En constante progression depuis la sortie de son premier album en 2019 (
At The Threshold Of The Greatest Chasm qu’il faudrait que je me décide à chroniquer un jour histoire de boucler la boucle), Gabriele Gramaglia prouve une fois de plus qu’il a su parfaitement digérer ses influences afin que celles-ci ne sautent plus aux yeux ni aux oreilles comme c’était le cas il y a encore quatre ans. Certes, la direction un tantinet plus progressive prise par l’Italien s’inscrit quelque peu dans l’air du temps (on pourrait encore citer le nom de Blood Incantation mais également celui de Tomb Mold, Vile Rites, Universally Estranged ou de VoidCeremony) et pourrait ainsi faire grincer quelques dents mais cela ne change rien au fait que les quarante-trois minutes de ce nouvel album sont un pur moment de plaisir. Une leçon de Death Metal tarabiscoté et cosmique qui brille par son efficacité, sa qualité d’écriture, ses mélodies subtiles et sa variété de propos. Bref, je ne serai pas étonné si
Crepuscular Dirge For The Blessed Ones finissait dans la liste des albums de l’année.
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