Ils ont continué et ils ont bien fait. On aurait pu croire que Tar Pond allait rejoindre le cimetière de ceux partis trop tôt, auteurs d’un album marquant mais au destin funeste déjà présent à sa sortie. Petit rappel : Martin E. Ain, moitié de Celtic Frost, décède après avoir enregistré la basse pour
Protocol of Constant Sadness alors qu’il en est un membre fondateur avec Thomas Ott, Stefano Mauriello, AC Kupper et Marquis Marky (ex-Coroner). Difficile d’imaginer le projet survivre après un coup dur comme celui-là.
Les Suisses ont donc décidé de poursuivre, recrutant Monika Schori puis Christopher Perez à la basse et Daniele Merico à la seconde guitare en remplacement de AC Kupper. Heureusement, tant
Protocol of Constant Sadness relevait de la note d’intention, courte mais déjà pleine d’une identité soufflant un air frais sur le doom metal, entre canonique école Saint Vitus et emprunts au post-metal ainsi qu’au grunge. Des éléments qui sont encore plus développés et maîtrisés sur
Petrol et ce, dès le départ. Impossible de résister à « Bomb », qui marque d’emblée à la manière de « Damn » sur le premier disque de la formation. Riff maousse ; ambiance vénéneuse et ambiguë ; envie de relancer le morceau une fois celui-ci terminé : on pourra certes de nouveau tiquer sur la durée de l’ensemble (trente-huit minutes), Tar Pond joue resserré mais possède une profondeur qui happe directement, une cohérence où la qualité est de taper juste à chaque coup.
Il y a chez ce groupe un naturel et une classe rares, mélangeant les genres sans paraître y toucher (« Dirt » et ses airs d’Alice In Chains doom, hommage évident jusqu’à son titre). Entre bizarreries peignant un psychédélisme doux et glauque à la fois (les baisses de volume parsemant « Slave » et « Something »), lourdeur impitoyable et ambiance flottant au ras-du-sol,
Petrol englue et entête, son feeling sensuel tapissant tout d’une noirceur enivrante. Une élégance que je n’avais pas retrouvée depuis la disparition de The Wounded Kings, Tar Pond me rappelant le défunt groupe de George Birch et Steve Mills dans son raffinement à pratiquer la lame sur ses victimes. Coupe-chou et ère victorienne contre couteau de cuisine et veste en jean : la différence de forme ne fait pas oublier une certaine fraternité, les Suisses ayant ce même pouvoir de séduction, ce même goût pour l’aplat de notes éveillant directement l’imagination, que les Anglais.
Une impression qui vaut aussi pour le plafond de verre que ne parvient pas à briser Tar Pond. Passées la révélation « Bomb » et la nerveuse « Blind »,
Petrol pratique davantage l’art de la suggestion, une tension sur le fil qui retient l’attention à chaque instant – peu de fausses notes sur ces cinq titres, dont on pourra juste pointer du doigt un « Something » moins réussi – tout en laissant un brin frustré. Oui, la démarche d’offrir un album court mais sans gras inutile se comprend ; on n’en reste pas moins avec l’envie d’en avoir plus. C’est le seul véritable défaut qui empêche encore Tar Pond d’être véritablement un grand nom du doom metal actuel. Par chance, il semble prêt à ne pas nous laisser affamés :
Petrol montre un groupe à la créativité évidente et dont il me tarde d’entendre les prochaines œuvres.
Par gulo gulo
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Raziel
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo