Mastodon - Blood Mountain
Chronique
Mastodon Blood Mountain
Le métal c'est comme le football (oui je sais, j'aime les métaphores audacieuses) : de même qu'un joueur qui brille dans une petite équipe pendant 3 saisons, est transféré dans une grosse équipe où il fait de la merde mais où il gagne plein de pognon, un groupe qui explose sur un label indépendant se fait signer chez une major, fait de la merde, et gagne plein de pognon. Eh bien Dieu, Allah, Yahvé, Bouddha, Rael merci (putain le religieusement correct, ça commence à doucement me courir sur le salsifis – j'aime pas les haricots), ce n'est heureusement pas le cas de Mastodon pour leur troisième album : Blood Mountain.
Effectivement, lors du passage de Relapse à Warner, on pouvait s'attendre au pire : Mastodon allait-il se mettre au punk académique style Green Day, ou se faire mettre au gothique anémié façon Evanescence ? Les 4 larrons, pour se prémunir d'un tel danger, inhérent à toute signature chez le grand méchant major, n'ont couru aucun risque. Ils n'ont pas engagé le producteur d'Avril Lavigne, ils n'ont pas travaillé avec Helmut Newton pour faire les photos de groupe, et ils n'ont pas demandé à Jean-Jacques Goldman de leur écrire une chanson (de toute façon, il aurait procédé comme d'habitude avec les autres "artistes" pour qui il écrit : soit il leur refile une vieille chanson qui traînait et dont il ne voulait pas pour lui-même, soit il fait un plagiat d'une de ses chansons en espérant que l'autre ne rende pas compte). Non au lieu de faire ça, qui leur aurait assuré de sortir un bon album bien à chier, ils ont décidé sottement de travailler avec leur producteur habituel (Matt Bayles), d'écrire leurs chansons eux-mêmes en jouant eux-mêmes de leurs instruments en studio (on a vraiment pas idée...) et de laisser Paul Romano s'occuper de leur artwork (exactement comme d'habitude).
Résultat : l'album est excellent, mais on est pas près de les voir à Hit Machine. (en même temps si vous vous souvenez de la tête de Charly et Lulu – les 2 idiots du village – quand Marilyn Manson était venu à l'émission, j'imagine avec un certain amusement Mastodon jouer avec les pouffes du public qui se demandent c'est quoi les gros morceaux de bois avec des cordes que les gars ils grattent). Comme pour le très bon Leviathan (leur précédent opus), cet album est également basé sur un concept : ici la quête pour le Crystal Skull (un crâne sculpté en quartz dont on n'explique pas l'origine, attribuée à une civilisation pré-colombienne, et qui ferait un bon sujet de base pour un épisode de milieu de saison d'X-files) à travers les sentiers tortueux d'une montagne (d'où Blood Mountain – Montagne sanglante - pour ceux pour qui l'anglais est une notion aussi vague que la subtilité l'est pour Cauet). Au départ, je croyais que les concept-albums, il y avait plus que des groupes de heavy qui en produisaient en faisant une mauvaise repompe de Tolkien, ou des groupes de métal progressif technico-chiant. Pourtant, Mastodon a fait de cette histoire plus une base de travail que réellement une trame très écrite avec des chapitres et tout et tout. Ce qui donne autant de liberté aux paroles et à la musique.
Surtout qu'on a affaire à un groupe probablement au sommet de sa forme. L'alternance vocale Troy Sanders – Voix éraillé / Brett Hinds – Voix claire, est bien mieux exploitée, je trouve que sur les précédents albums, et ce d'autant plus que les deux chanteurs ont une voix bien meilleure, plus mise en valeur par la production, et sans doute par les compositions qu'auparavant (ou qu'au parapluie). Brann Dailor (batteur toujours aussi pachydermique et octopodesque) a épuré son jeu, limitant les breaks et autres roulements de caisse claire à une portion qui permet un développement plus dynamique des chansons. Enfin, que dire du travail des guitares de Bill Kelliher et de Brett Hinds qui ont su justement associer mélodies et arpèges ("Capillarian Crest") et gros riffs stoner bien gras du bide ("Colony of birchman", "The Wolf is loose"). "Capillarian crest" pourrait, à cet égard, servir de standard interne aux compositions de Mastodon, tant celle-ci contient tous les éléments spécifiques de la musique du groupe, avec une mention spéciale à l'accélération de tempo sur les arpèges au milieu du morceau et le passage posé qui suit, sombre et sublime. Des riffs décalés, oscillant entre le gros tabassage d'un Queen of The Stone Age des grands jours et harmonies subtiles, sans donner dans la surenchère symphonico-cacaphonique. Mastodon a su gagner en maturité sur cet album, et est très loin de se calmer ("Hands of stone" est là pour pallier le relatif calme de "This mortal son" par exemple). "Siberian divide" est la chanson qui m'a foutu une claque dans cet album ; elle est sans doute la plus sombre, et une des plus contrastées, du grand travail de composition d'orfèvre et d'arrangements lancinants, tranchant avec des parties lourdes et plus fiévreuses qu'une nuit à Bangkok quand on est une fille de 16 ans. Le disque se conclut avec un très bluesy et mélancolique "Pendulous skin".
Une seule faute de goût, la ghost track où un des membres lit une lettre d'un fan qui a téléchargé leurs démos et chanté dessus apparemment. Bon, ça doit sans doute vouloir dire quelque chose pour eux, mais pour nous, c'est aussi abscons qu'un discours de Michel Rocard traduit en moldave et prononcé par Alain de Greef. C'est faible, comme faute de goût, mais j'ai essayé de cherche la petite bête, et j'en ai trouvé 2 : celle-ci et un morpion qui avait pris mes poils pubiens pour un terrain de camping.
Bref, Blood Mountain, un album qui l'est bien à avoir pour l'écouter avec ses oreilles de sa tête à soi.
| $am 22 Novembre 2006 - 6057 lectures |
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