Mr. Bungle - California
Chronique
Mr. Bungle California
« … dans un camp situé dans la proche banlieue de Kandahar que les troupes … <ZAP!>
Euh, Sa-mmy : je crois qu'il y a une momie derrière toi … Scou-bidou-bidouuu <ZAP!>
… un bond de 4,3% des actions Pechinet qui …<ZAP!>
… vois Paméla, pour moi c'est ça Hawaï: un tour en décapotable, au petit matin, le long de la côte …
- C'est magique mon amour !
- Nous deux, la mer, les embruns, <SCROUIICH!>les vieilles dames écrasées dans le caniveau, les chausse-pieds qui font Meuh, <SCROUIICH!>, les mouettes, les palmiers …
- J'ai l'impression de vivre un rêve, chéri … <SCROUIICH!> malgré tes pets qui fleurent le salsifis <SCROUIICH!>.
- De retour à l'hôtel, je te propose un petit câlin dans le hamac, un cocktail exotique, <SCROUIICH!> puis je te viderai une boîte de cassoulet dans l'anus, on fera une compêt' de Super Mario Bros 3, <SCROUIICH!> et on finira par un bon sauna pour finir de se détendre
- Mon amour, c'est … <ZAP!>
… super cagnotte de 25 milions d'… <ZAP!> »
Mouais, c'est caricatural, mais c'est un peu l'équivalent télévisuel de ce que Mr Bungle propose sur « California »: des pêtages de plombs réguliers, parfois inquiétants, disséminés tout le long d'un patchwork musical impressionnant qui se donne par moments des airs de normalité, mais dont la façade conventionnelle s'effrite vite sous la poussée d'une folie furieuse bouillonnante.
Sous le couvert du sobriquet de Mr Bungle, Mike Patton et ses acolytes ont décidé de tout se permettre. Partant d'une trame parfois classique (variétoche estivale planante sur « Sweet Charity », rock soul sur « Vanity Fair », slow suave sur « Pink cigarette »), nos terroristes musicaux font éclater le cadre traditionnel des genres (Viens là que je t'éclate le cadre !), délirent, ou tout au moins – les rares fois où ils gardent à peu près le contrôle - saupoudrent les morceaux de touches décalées, déviantes, voire inquiétantes. Lors de leurs délires les plus extrêmes, les éléments les plus improbables se retrouvent mariés les uns aux autres: saxo jazz, rock swinguant, bruitages de dessins animés et chants en latin pour « None of them knew … », grosses grattes metal, accordéon, fanfare échappée d'un film de Kusturica, breaks techno et gros délires sur « Ars Moriendi » …
Si l'ensemble des membres de Mr Bungle impressionne par leur maîtrise instrumentale et leur sens de l'orientation musical, celui qui brille tout particulièrement au milieu de ce kaléidoscope sonore, c'est l'homme aux mille voix, Mike Patton, qui susurre, croone, assure des chœurs, des voix féminines, fait le robot, se la joue human beat box (écoutez bien, en trame de fond, sur « Retrovertigo »: on n'y prête à peine attention) … Il est partout, et sous toutes les formes: le gugusse est vraiment impressionnant !
Faisant mentir les pronostiques et contre toute attente, tout cela est hyper cohérent (c'est d'ailleurs de loin le plus accessible et le plus cohérent des 3 albums de Mr Bungle), souvent très entraînant, et s'écoute presque aussi facilement qu'un album de M ou des Red Hot (Quoi ? Je compare pas les ziques, mais leur niveau d'accessibilité). Je ne vois pas comment faire plus groovy, attractif et cohérent tout en mélangeant autant de trucs dans tous les sens … A noter que, si tous les titres de cet album sont excellents, le swinguant « None of them … », le puzzle audio « The Air-conditioned Nightmare », le super folklo « Ars Moriendi » et le complètement barré « Goodbye Sober Day » (TCHAK !!!) sont incontournables, inimitables et géniallissimes.
Comme tous les albums de Mr Bungle, « California » est un monstre d'extrémisme expérimental, avec la particularité cette fois qu'il se laisse aborder très facilement, les 50 premières écoutes permettant d'y dénicher toutes les richesses et pas uniquement de commencer à y voir un peu clair, comme c'est trop souvent le cas sur les albums hyper techniques ou trop barrés. Mr Bungle, c'est Mr Bean au pays du rock burné, c'est un coup de pied dans les couilles des groupes progs sérieux, c'est un classique qui ne vieillira pas … bref Mr Bungle c'est bon, mangez-en !
| cglaume 10 Septembre 2007 - 5480 lectures |
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