Histoire de ne pas rallonger une chronique qui est déjà conséquente, je n'évoque pas le fait que IrréméDIABLE est un concept album autour de Baudelaire, pour plus de précisions à ce sujet, lisez donc cette interview préparée avec amour par votre serviteur.
Pour couper court à toute polémique je vous le dis : oui, depuis aussi longtemps que j'écoute Misanthrope (ce qui remonte à la sortie de
Libertine Humiliations), j'aime ce groupe. Oui je m'entends bien avec Philippe, oui je pense que Jean Jacques Moréac est le meilleur bassiste metal d'Europe, oui je pense que Misanthrope est de loin le groupe le plus original de France, voire le meilleur de France tout court. Et décidément non, ce n'est pas ce nouvel album qui me fera changer d'avis.
Et ce qu'il y a de bien avec Misanthrope, c'est quoiqu'il arrive on sait que le groupe ne suivra pas les modes mais plutôt ses envies sans jamais mouiller son doigt pour voir dans quel sens le vent tourne, et c'est là la chose que je préfère dans ce groupe français culte. Croyez-moi, Misanthrope ce serait mis à faire de cet immonde « modern death » lancé par Gojira et dont l'intérêt musical est inversement proportionnel à la popularité (j'irais même jusqu'à dire inexistant), je ne me serais pas gêné pour leur mettre une note négative (Chris, on peut noter en dessous de 0 s'il te plaît ?) en leur renvoyant leurs digipacks dédicacés. Et bien évidemment, je ne me suis pas trop fait de soucis de ce côté-là, sachant toujours aussi pertinemment que Misanthrope fait plus que jamais du Misanthrope…
Difficile tâche que voilà pour ce
IrréméDIABLE de succéder au parfait
Metal Hurlant, qui marquait au même titre qu
Visionnaire l'aboutissement d'une période au sein du groupe. Tout comme il y a eu un « après
Visionnaire » et un « après Jean Baptiste Boitel », j'avais bien supposé qu'il y aurait un « après
Metal Hurlant», et je ne m'étais pas trompé. Oh certes, il est bien difficile de rapprocher chaque album de Misanthrope avec l'autre, tant ils sont différents, mais tout comme certaines personnes sont plus égales que d'autres (j'espère que vous avez révisé vos classiques), celui-ci est peut être moins différent que les autres qui le sont tous (vous me suivez encore ?).
La première chose qui frappe à l'écoute de cette nouvelle œuvre, c'est l'impression d'écouter un best of de l'époque post-
Visionnaire (malgré quelques similitudes avec leur troisième opus et même
1666... Theatre Bizarre), un peu comme si Misanthrope avait voulu tirer la quintessence de son style inimitable. C'est là une impression à double tranchant, car même si le niveau de qualité est très élevé,
IrréméDIABLE est peut être un peu moins surprenant que ses prédécesseurs, et possède une identité moins forte. N'allez pas croire pour autant qu'il n'en ait pas du tout, n'importe qui serait capable de le reconnaître dans la seconde, mais cet album est peut être le moins facilement identifiable de sa discographie (même si la production atypique apporte un peu de fraîcheur, j'y reviendrai plus tard).
La seconde chose qui frappe, c'est que
IrréméDIABLE est probablement l'album le plus varié, tout en étant le plus brutal du groupe. Certains titres parmi les plus brutaux qu'ait composé Misanthrope (« l'Infinie Violence des Abîmes » et « Ixion » principalement) côtoient plus de mid-tempos que jamais proposé jusqu'alors avec « Prodigalité », « Plaisirs Saphiques » ou le très rock « 1857 », et tous les morceaux (mid-tempos exceptés) comportent leur lot de passages vindicatifs. S'y ajoutent des moments plus classiques dans la veine de ce que Misanthrope a toujours proposé comme « Phénakistiscope », « Les Limbes », « Le dandy de Bohème » ou « Névrose », le génial « Le Passager Du Hasard » qui aurait pu figurer sur
Metal Hurlant ou le très varié « Le Maudit et son Spleen » avec son riff black metal, on obtient un excellent pot-pourri de ce que le groupe a fait jusqu'alors. Le revers de la médaille est que
IrréméDIABLE est aussi l'album le plus difficile d'accès de Misanthrope tant il est varié, mais reste plus facile à assimiler que le style du début de leur carrière. Attention donc, ce nouvel album de Misanthrope n'est sûrement pas celui par lequel il faut commencer à écouter le groupe ! Même si il est une admirable synthèse de tout ce qu'il a pu faire par le passé, des albums comme
Libertine Humilations ou le fabuleux
Misanthrope Immortel sont bien plus faciles d'accès.
Impossible de parler de ce nouvel opus sans évoquer sa production. Misanthrope a en effet délaissé ses studios d'enregistrement habituels pour le Davout, un des trois studios les mieux équipés de France (si l'on en croît la brochure). Si vous êtes habitué aux immondes productions sous stéroïdes façon Daniel Bergstrand, vous risquez d'être déçus. Pas d'artifices, de grosse caisse en avant, ni de guitares sursaturées ici, la production de ce
IrréméDIABLE se veut naturelle, et ça s'entend ! Le résultat est admirable : aéré, limpide au point que l'on pourrait reconnaître la marque de médiator d'Anthony, l'une des meilleures production qu'il m'ait été donné d'entendre tout simplement. Elle comporte néanmoins deux petits défauts : la caisse claire un peu avant peut en gêner certains (personnellement, je trouve que ça passe tout seul), idem pour les claviers un peu trop en avant à mon goût. Deux défauts vraiment mineurs pour une production quasi-parfaite.
Mais venons-en au faits, à savoir la qualité de cette nouvelle offrande. Misanthrope a-t-il une nouvelle fois sorti un album d'une trempe exceptionnelle ? La réponse est oui, pour peu que l'on soit fan de Misanthrope. Indéniablement,
IrréméDIABLE fait partie des meilleurs albums du groupe, ce qui revient à dire à peu de choses près que c'est un album de Misanthrope. Même niveau de composition ou presque (
Sadistic Sex Daemon restant pour moi un cran en deçà), de technique, même qualité de chant… seule la qualité sonore bien meilleure peut faire pencher la balance de l'objectivité en faveur de ce huitième opus. La seule véritable chose qui fait que l'on puisse apprécier ce Misanthrope plus qu'un autre, c'est que l'on est plus sensible au style qui y est développé. Et cette fois-ci, le groupe a joué la carte de la surenchère : plus long, plus varié, allant encore plus loin dans le concept que Misanthrope a toujours développé,
IrréméDIABLE encore plus que ses prédécesseurs divisera les masses.
Les fans de l'époque
Visionnaire ou
Immortel qui ont déjà décroché ne retrouveront par leur compte ici, et les gens qui n'aimaient déjà pas Misanthrope apprécieront encore moins ! Mais ceux qui comme-moi ont toujours apprécié le travail du groupe continueront de le faire sans être déçus, car Misanthrope gagne encore en maturité et se fait toujours plus original. Des titres comme « Le Passager du Hasard », « Plaisirs Saphiques », « 1857 » ou « Ixion » font à mon sens partie des meilleurs titres du groupe, même si ils n'atteignent pas la perfection de « La Rencontre Rêvée », « L’Écume Des Chouans » et « Les Empereurs du Néant ».
Reste le point qui me gêne dans cet album, à savoir le dernier réel titre (« LXXXIV l'Irrémédiable » n'étant qu'une outro déclamée à la manière de « l'Antéchrist » sur
Misanthro-Thérapie) qu'est « l'Oracle de la Déchéance ». On connaît l'amour de SAS pour le groupe Celtic Frost, et ce morceau racontant les dernières heures de la vie de Baudelaire le rappelle bien : tempo très lent, accords très graves, paroles posées… Probablement le morceau le plus surprenant de la discographie de Misanthrope. Je vais probablement me faire taper les doigts par Philippe le prochaine fois que je le verrai, mais n'appréciant guère
Monotheist, il faut bien avouer que je n'aime pas ce morceau non plus, et que je décroche à ce niveau là de l'album, après pourtant plus d'une heure d'excellence. Je n'y trouve pas ce que je recherche dans Misanthrope, à savoir un souffle original et un travail mélodique époustouflant. C'est dommage, mais pas assez pour pouvoir me gâcher l'écoute de ce
IrréméDIABLE, qui reste de très haute qualité.
Comment noter un pareil album ? Difficilement est la première réponse qui me vient à l'esprit. D'un côté on a là une œuvre extrêmement mature, originale, jouée et produite à la perfection, indubitablement faite pour contenter les fans du groupe, mais de l'autre côté elle est aussi moins surprenante que par le passé, tout en restant très difficile d'accès pour quiconque ne connaît pas Misanthrope. Personnellement, j'avoue préférer
Visionnaire et
Metal Hurlant à
IrréméDIABLE, ne serait-ce que pour leur côté technico-expérimental plus développé, ainsi que
Misanthrope Immortel pour un sens mélodique plus aigu et la cohésion admirable qu'a atteint cette œuvre… Si je suis ma logique, en mettant
Metal Hurlant et
Visonnaire sur un piédestal, ainsi qu'en mettant Immortel un cran en dessous, je devrais mettre 9/10 à
IrréméDIABLE. Or 8,5/10, ce n'est sûrement pas rendre hommage à la qualité époustouflante de cet album, mais je vais devoir m'en contenter (et puis ce sera ma « punition » à « l'Oracle de La Déchéance »). Le seul moyen ce serait de noter
Visionnaire au dessus de 10… dis Chris, on peut noter au dessus de 10 s'il te plaît ?
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