[ A propos de cette chronique ] Sorrow avait, dès 2005, toutes les cartes en main pour séduire un auditeur acquis à la cause d'HATE FOREST, groupe qui a toujours divisé dans la scène Black Metal. Mystérieux, cachant au public l'identité de ses membres, HATE FOREST a toujours entretenu autour de lui une aura unique. Un groupe aussi monolithique, refusant la variété par sa fulgurance et sa rapidité, avait réussi à surprendre, avec le formidable
Battlefields sorti deux ans plus tôt. Plus lent que la majeure partie de sa discographie, plus posé, mais tout autant inspiré, le combo ukrainien avait perdu ses auditeurs dans la forêt d'un opus pesant, lourd, démontrant ses capacités de renouvellement par rapport au chef-d'œuvre qu'était
Purity.
Le chant du cygne des slaves revient à une approche rapide et redonne la part belle aux blasts beats impitoyables. Ce
Sorrow se situe donc dans la veine d'un
Purity ; une haine propre aux créations de Saenko s'exprime tout autant sur ce dernier album. Sa voix, gutturale comme jamais, toujours pleine de cette puissance inhumaine, déclame des paroles exaltant la beauté des paysages de l'Est, imagés à travers une pochette encore une fois magnifique. HATE FOREST officie bien dans le registre auquel il nous avait habitués et offre un Black Metal complètement épuré qui n'oublie pas d'être inspiré. Les riffs de ce
Sorrow sont bien dissonants et sentent l'inspiration, l'urgence. HATE FOREST rentre avec véhémence dans le lard de son auditeur en composant des morceaux froids, façonnés par une patte qui n'a d'égal que celle des précédents opus du groupe.
La production austère se marie impeccablement avec le contenu et le met idéalement en relief, à l'image de la basse qui renforce ce son en lui donnant davantage de profondeur. Le rythme est effréné, sans cesse accéléré par un blast beat martial, incessant, presque asservissant : Saenko ne rationne pas l'usage de ce pattern de batterie sur cet album, qui peut en souffrir un peu, car il n'est en effet pas question de compromis. La boîte à rythme joue donc un rôle de premier plan, à l'image de ce son de double pédale inchangeant et de cette caisse claire imperturbable, amenant une agression permanente prônée cet ultime album. Le tempo, quasiment invariable, renforce morceau après morceau la froideur et la haine que l'on ressent bien dans le groupe ukrainien. Certes, les plans de batterie se ressemblent trop, mais cette facette correspond à l'essence de ce groupe...
Sorrow est peut-être encore plus extrême que
Purity de ce point de vue là. Alors que l'album de 2002 proposait quelques « coupures » dans le rythme effréné de ses compositions, les seules coupures que
Sorrow nous propose, ce sont entre les morceaux, brutalement interrompus, comme en plein milieu de leur élan. HATE FOREST ne desserre donc jamais l'étau qu'il n'a de cesse de refermer sur les cages à miel de l'auditeur et maintient l'étouffement permanent dans lequel il le confine. Sa musique est plus glaciale que jamais. Les riffs sont bien denses,
Sorrow gagne certes en punch et en fulgurance mais perd un peu au niveau des ambiances, de l'introspection. Ce chant du cygne semble beaucoup plus spontané ; d'une durée assez courte, il livre des perles qui viennent se classer au panthéon du groupe de Saenko : « Fog », et sa structure admirable, ses riffs à la fois violents et hypnotisants, est l'apogée de l'album et arrache tout ce qui aurait pu rester d'humanité sur celui-ci, ou encore « Fullmoon » et son efficacité… mais il est encore une fois inutile de séparer les pistes les unes des autres, car
Sorrow ne comporte en réalité aucune erreur, si ce n'est son jusqu'au-boutisme… La démarche habituelle d'HATE FOREST est ici poussée à son paroxysme : ce dernier album du groupe est de fait à placer au rang de chef-d'œuvre d'intensité.
Après ce dernier opus très "brut", HATE FOREST cessera toute activité ponctuelle (compilations mis à part), comme s'il avait épuisé toute son inspiration et vidé ses dernières forces dans ce
Sorrow : c'est en effet l'impression que l'on a après l'écoute de ce bloc extrême de bout en bout. DRUDKH accaparera l'inspiration du sieur ukrainien et son nihilisme prendra un virage plus occulte et se verra plus explicitement associé au folklore de son pays, auquel l'homme est très attaché, avec BLOOD OF KINGU, considéré comme le successeur du combo atypique qu'était HATE FOREST. Avec un line-up similaire,
De Occulta Philosophia sortira deux ans après la fin du groupe.
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