Le berceau d'immondices, c'est un peu comme les marronniers qu'on nous inflige aux infos à longueur d'années, du caractère purement commercial des fêtes d'halloween à la crise du marché du déguisement, en passant par le vol de citrouilles sur les terres du père Lachaise, lequel en a vraiment plein les bottes qu'on lui demande quelle tombe il a réservé au cimetière du même nom. L'arbre CRADLE OF FILTH, pas encore centenaire mais dont l'indéniable longévité fait qu'on a le sentiment qu'il est là depuis toujours, déploie tous les deux ans ses racines X-treme heavy/Black sympho de grande surface au grand dam des adeptes du death magick des vertes années (les productions pré – « From The Cradle To Enslave », pour résumer) : combien de vieux loups hurlant en cœur leur dégoût du grand guignol orchestré par Dani « Elfman » Filth et l'éternel second couteau Paul Allender ? De quoi former une meute au moins équivalente à celles des suiveurs aux dents longues, toujours prêts à mordre à l'appât d'albums d'envergure plus ou moins grande comme le mélèze
« Godspeed On The Devil's Thunder », les cèdres de
« Nymphetamine » ou les noyers noirs de
« Damnation And A Day ». Alors la nouvelle floraison des anglais, annoncée fort brutale par Dani la vendange, bonsaï nain ou séquoia géant ?
Partie I : L'enthousiasme du mort
Bonsaï nain ? Une expression que l'on attribuerait volontiers au leader quasi-quarantenaire du plus odorant des groupes anglais, bien trop flatteuse pour qualifier un album aussi ridicule que
"Thornography". Mais cette mauvaise récolte n'aura pas condamné l'espèce, sauvée in extremis la saison suivante par le rassurant
« Godspeed On The Devil's Thunder ». Une fois n'est pas coutume, le tronc commun est resté intact, accueillant même deux mauvaises graines en les personnes de James McIlroy (grattoir) et Ashley Jurgemeyer (poussoir) déchue d'Abigail Williams. Le groupe de nouveau sur les rails, chacun ayant pris ses marques, cette nouvelle cuvée se devait absolument d'aller de l'avant, de reconquérir les fans ou du moins de les convaincre qu'il pourrait bien exister d'autres cimes que
« Cruelty And The Beast ». Coup d'éclat ou pétard mouillé, toujours est-il que Dani et ses danettes ont vu les choses en grand avec ce « Darkly, Darkly, Venus Aversa », allant jusqu'à bouleverser l'ordre naturel. Ce nouvel album est sans conteste le plus compact et le plus direct des méfaits du combo, ouvrant sans préliminaires sur un « The Cult of Venus Aversa » qui prend à peine le temps de planter le décor avant de vous envoyer des bûches en pleine poire. Nostalgique des instrumentales ambiancées des anglais ? Il faudra définitivement vous en passer ici car dans ces 11 pièces, aucune ne vous laissera l'occasion de vous mettre au vert. Dani a mis de côté ses hurlements de yorkshire pour moduler sa voix de l'aigu au plus grave, poussant parfois la chansonnette (« Forgive Me Father (I Have Sinned) ») aux côtés de la démoniaque Ashley, plus que convaincante en maîtresse SM à l'apparat de latex lustré. Cette dernière fait également des merveilles avec ses claviers, distillant orchestrations grandiloquentes et atmosphères gothico-fétichistes ; elle traine d'ailleurs à ses pieds les esclaves Paul et James qui gémissent timidement avec leurs petites guitares... mais qui leur jetterait la pierre ? Il serait toutefois injuste d'occulter leur implication dans cette aventure, ne serait-ce que par la présence de petits solos qui agrémentent l'ensemble d'une bien belle manière. Par contre, derrière ses futs, Martin Skaroupka a pris soin d'orchestrer la cérémonie de sa poigne de fer et rétrograde le non-regretté Adrian Erlandsson au rang de légume de supermarché. Cet album repose en grande partie sur ses blasts et autres breaks redoutables qui redonnent à CRADLE OF FILTH ce côté extrême qu'il avait perdu depuis bien longtemps. Certaines inspirations vous rappelleront peut-être même quelques passages de
« Vempire », voir
« Midian » que je trouve très proche. Et c'est loin d'être un défaut en ce qui me concerne...
Partie II : Le revers du tennisman
Reste qu'en faisant feu de tout bois au mépris de toute progression dramatique, les anglais manquent de scier la branche sur laquelle ils sont perchés : passé un opener correct au demeurant mais à l'épaisseur toute relative (« The Cult Of Venus Aversa »), CRADLE OF FILTH délivre une série de titres où violence et rapidité d'exécution règnent certes en maître, mais que l'on peine à distinguer les uns les autres malgré l'acharnement un peu vain de miss Ellyllon à masquer le vide créatif de guitaristes en mode pilotage automatique et les insuffisances respiratoires d'un Dani parfois à bout de souffle. Le trop plein d'orchestrations parfois grotesques (« The Nun With The Astral Habit ») et l'extrême redondance des parties rythmiques fait donc craindre le pire et le semblant d'accalmie sur « The Persecution Song » est accueilli avec un certain soulagement, avant que le groupe ne retourne miraculeusement la situation à compter de l'excellente « Lilith Immaculate » ; bien plus inspirée que la première, la seconde partie de « Darkly, Darkly, Venus Aversa » profite assez curieusement d'un rééquilibrage des forces en présence avec des guitares qui font enfin le boulot, passages heavy typiquement britanniques à l'appui (« Forgive Me Father »), quitte à donner dans un thrash très violent évoquant le SODOM le plus sombre (« Harlot On A Pedestal », sorte de « Of Dark Blood And Fucking »-like, où Skaroupka fait montre d'une grande variété de jeu), « The Spawn Of Love And War » et son thème de claviers tout simple mais ô combien efficace restant le meilleur extrait d'un album où la stratégie de l'agression frontale ne porte pas tous ses fruits, ce premier full length chez Peaceville ne devant son salut qu'à la soudaine montée de sève des cinq derniers titres. Entres autres feuilles mortes, regrettons enfin un chant féminin franchement sous exploité (la greffe avait pourtant bien pris) et une thématique principale bien moins attrayante que celle de
« Godspeed On The Devil's Thunder ».
Alors mieux ou moins bien que leur précédent méfait, les avis sont partagés. Toutefois une chose est sûre, le spectre Thornographique est bel et bien écarté. Vous resterez peut-être moyennement réceptif à cette avalanche de décibels, à cette radicalisation de leur style, mais si vous vous êtes toujours un temps soit peu intéressé aux nouvelles pousses des anglais, vous devriez trouver dans ce « Darkly, Darkly, Venus Aversa » de quoi bouturer ce qu'il vous restait de passion pour ce groupe. En tous cas, il semblerait que CRADLE OF FILTH ait recouvré cette envie d'aller de l'avant et de faire parler de lui en bien. Et ça, ça mérite des encouragements.
« On se lève tous pour Daaaaaaaaani, Daaaaaaaaaani, Daaaaaaaaaaaaani ! »
Thomas Johansson : 6.5/10
Dead : 7.5/10
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo
Par Jean-Clint
Par Troll Traya
Par alexwilson
Par Sosthène