Ces dernières années sont apparus dans notre petit monde des musiques extrêmes des artistes délaissant la noirceur ou le contraste pour transmettre un autre sentiment : la folie naissant d’une lumière aveuglante. Je laisse aux généalogistes la tâche d’expliquer les débuts et nommer ce qui ne l’est pas encore et me contenterai de citer l’un de ses exemples flagrants avec le dernier essai de Liturgy,
Aesthethica, où l’impression d’écouter une musique « joyeuse » est vite supplantée par celle d’être sous le joug d’une blancheur totalitaire, la pureté devenant plus intense et conductrice que le malsain habituel.
Botanist s’inscrit dans le même… genre/style/mouvance/esthétique (appelez ça comme vous voulez) et s’impose comme un rejeton de parents ayant déjà réussi à retourner le Black Metal pour le rendre autrement dérangé. Par la forme, d’abord : sans doute sera-t-il haï de toute part quand le fiel déversé sur le
Cydonien cherchera à se répandre, car le one man band pousse un peu plus loin l’idiome du « black metal n’en étant pas » par l’accouplement peu conventionnel d’instruments. Otrebor, l’homme derrière le projet, utilise exclusivement une batterie et le hammered dulcimer, qu’il appuie d’une voix éteinte et criarde typiquement black metal – autant dire que ça étonne. Mais ce n’est pas seulement par ce biais qu’il étourdit : ses mélodies basées sur la répétition de thèmes rappelant l’écriture d’un Krallice réduit à son plus simple appareil ; le fait que ce disque est en réalité deux conduits par une préoccupation commune malgré de légères variations donnant à l’ensemble une progression dans la démence (
II: A Rose From The Dead usant de plages plus aérées aux sonorités royales comme on peut en trouver dans la dernière création du groupe d’Hunter Hunt Hendrix) ; l’accumulation de morceaux déjà foisonnants et joués à une vitesse proche du grind le moins propice au compromis ; des textes centrés sur l’étude des plantes… Botanist paraît incompréhensible, est incompréhensible et la tentation de déclarer qu’il tient d’un délire proche d’un Impaled Northern Moonforest se prenant au sérieux doit être grande pour celui qui n’est ni préparé, ni adepte de bizarreries (en même temps, il ne faut pas aller voir du côté de Tumult Records – label s’étant occupé de sorties de Weakling, Burmese ou Leviathan entre autres – pour escompter du classique).
Botanist ne ressemble qu’à lui-même et sa personnalité est si prononcée que le name-dropping s’avère difficile. Il fait penser un premier temps à du
Bloodiest joué par
Robinson, puis à rien de réel, l’évocation devenant hallucination, image d’ermite monomaniaque et expert d’un nouvel art floral intriguant, cruel. Le parti pris de ne ralentir le tempo qu’à de rares occasions oblige à la pause entre les deux parties pour les apprécier pleinement mais suffit à lui seul à transmettre cette surexcitation animant Otrebor, sa volonté d’attaquer de végétal devenu nuisance, de tromper par l’utilisation constante de l’échelle chromatique avec laquelle compose essentiellement le hammered dulcimer en suggérant une beauté proche de la transcendance bien qu’en vérité coupante de claironnements vitreux. Une musique fébrile, sans puissance autre que celle de l’interprétation, et visant constamment les nerfs, montrant que si ce double album pourra être considéré comme « expérimental », il est un aboutissement en soi (et cela, le botaniste semble l’avoir pris en compte, les premiers extraits de son œuvre à paraître cette année,
III: Doom In Bloom, présentant des parties atmosphériques se situant à l'opposée de ce qu'il jouait auparavant).
Malgré une légère inégalité entre
I: The Suicide Tree et
II: A Rose From the Dead, ce dernier étant plus équilibré et mémorisable que son prédécesseur (notamment dans un dernier tiers où le sadique devient majestueux), la totalité est à écouter car elle marque le début d’une entité qui, à terme, risque de faire du grabuge dans la scène metal par son caractère atypique ne pouvant qu’entrainer adoration ou détestation. Ceux qui essayeront trouveront ça étrange. Ceux qui continueront trouveront leur tête transformée en bonsaï, celui que Botanist prend soin de méticuleusement tailler, rempoter et éclairer, jusqu’à trouver la paix. Personnellement, je conseille de poursuivre.
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo
Par Jean-Clint
Par Troll Traya
Par alexwilson
Par Sosthène