Un nouvel album de Defeated Sanity, c'est désormais un évènement pour tout amateur de brutal death depuis que le combo allemand domine le genre. C'était en 2007 à la sortie de
Psalms Of The Moribund, le couronnement du nouveau roi.
Chapters Of Repugnance, bien que légèrement inférieur, confirmait la main-mise du groupe trois ans plus tard sur Willowtip Records. Trois ans, c'est à nouveau le temps qui sépare
Chapters Of Repugnance de ce nouveau chapitre tant attendu intitulé
Passages Into Deformity et toujours servi par le label américain. Soucieux du moindre détail, les Allemands ont à nouveau emballé la bête dans une pochette splendide signée Toshihiro Egawa et sur laquelle on retrouve la couleur verte désormais typique de la formation.
Typique aussi mais moins avantageux, Defeated Sanity a encore changé de chanteur. Quatre albums, quatre frontmen différents! Cette mauvaise habitude a conduit les Teutons à remplacer l'Américain A.J. Magana (qu'on compte toutefois parmi les guests sur "Martyrium" aux côtés de Brian Forgue, également présent sur "Verses Of Deformity", ainsi que de Frank Rini l'ex-Internal Bleeding sur "Verblendung") par leur compatriote Konstantin Lühring de Despondency et Resection. Et honnêtement, j'avais quelques doutes sur le bonhomme. Beaucoup même tant ses vocaux ultra gutturaux chez feu-Despondency incarnent tout ce que je n'aime pas dans le brutal death. Mais Konni les a vite chassés et fait ici sans problème jeu égal avec A.J. grâce à une prestation variée qui ne tombe presque jamais dans le yaourt caricatural. Très agréablement surpris j'ai été!
Pour le reste par contre, pas de surprise. Car je savais pertinemment que Defeated Sanity allait encore écraser toute la concurrence. Même si nous ne sommes qu'en février, on peut déjà en effet décerner le titre d'album brutal death de l'année à ce
Passages Into Deformity. Je n'avais d'ailleurs pas écouté de meilleur album de brutal death à l'américaine depuis...
Psalms Of The Moribund! Pas d'énorme évolution à attendre toutefois,
Passages Into Deformity poursuit la direction prise par
Chapters Of Repugnance, soit une musique moins technique et plus centrée sur le groove, plus old-school. Ce nouvel opus du quatuor accentue juste le côté slammy tout en affichant une technicité supérieure à la moyenne et en ré-injectant une dose plus importante de brutalité et de vitesse avec davantage de blast-beats et de gravity-blasts ou même de sections thrash. J'en aurais aimé encore davantage mais on ne fera pas la fine bouche. C'est là qu'intervient un Lille Gruber stratosphérique qui n'est pas prêt de se voir chiper son titre de meilleur batteur de brutal death qu'il détient depuis plusieurs années maintenant. Doté en plus d'une production remarquable car naturelle tout en restant puissante, le fils du regretté Wolfgang Teske est un des rares à sa place à se montrer inventif, ne se contentant pas de bourriner ou d'accentuer les slam parts. Et on ne ressent jamais cette désagréable impression trop fréquente dans ce style d'avoir affaire à une machine, on entend bien l'humain derrière. Il n'y a guère qu'avec les "semi-blasts" que j'ai toujours du mal mais qui font partie intégrante du genre. La démonstration la plus flagrante du talent de l'Allemand: ces breaks au groove jazzy frais où il fait preuve de feeling et de dextérité ("Naraka" à 4'10, "The Purging" à 3'10, "Martyrium" à 1'38 et 3'56...). La basse sautillante et aventureuse du talentueux Jacob Schmidt y est également très à son avantage. Un autre des nombreux points forts d'un Defeated Sanity impressionnant de maîtrise.
Le tableau ne serait pas complet sans le guitariste Christian Kühn (et Lille Gruber qui compose aussi, je n'ai pas les détails). Après tout, l'essence même du metal, ce sont les riffs et quand bien même le chanteur, le batteur et le bassiste assurent, si les guitares ne suivent pas derrière, ça ne sert pas à grand chose. Mais là aussi, le groupe se montre intraitable, bien aidé par une production exemplaire, la meilleure dont ait jamais bénéficié la formation. Pourtant, en soit, les riffs n'ont rien de vraiment génial. Il n'y a même quasiment aucune "mélodie", pourtant la base. Mais les riffs de Defeated Sanity dégagent tout de même quelque chose. Un groove ultra jouissif sur les nombreuses slam parts heavy as fuck hommages au NYDM des années 1990 ("Naraka" à 1'49, "The Purging" à 2'41 suivi d'un riff sombre inspiré, "Verses Of Deformity" à 0'14 et 1'17, "Perspectives" à 2'40, "Martyrium" à 1'54) ou autres passages bandants à mort comme sur "Verblendung" (un des meilleurs morceaux) à 3'32 où il est impossible de ne pas bouger la tête, sans oublier les breaks jazzys au groove plus alambiqué mais tout aussi fatal. Un côté chaotique et bouillant sur les parties les plus rapides/brutales (l'intro exutoire "Initiation" toutefois pas aussi énorme que "Introitus", l'expéditif "Frenzy"). Et même dans l'ensemble une vraie ambiance, pas seulement grâce aux samples qui clôturent certains titres ("Verblendung" et sa touche indus, "Lusting For Transcendence" dont le début me rappelle bizarrement Slipknot, impression chassée ensuite par des bruits de mastication, "The Purging" en allemand qui sert d'intro pour "Verses Of Deformity" qui traite du documentaire "Höllenleben" sur des abus sexuels ritualistes commis sur des enfants par leurs parents et leur entourage et qui se finit lui aussi par un sample angoissant avec quelques notes de piano). Voilà des parties de guitares quasi parfaites pour le genre avec toutefois quelques petits ratés comme sur "Frenzy", la piste la moins intéressante, ou les deux malheureux solos sur "Verses Of Deformity" et "Perspectives", trop brefs et déconstruits pour convaincre malgré la bonne rythmique thrashie sur celui de "Verses Of Deformity".
Des broutilles au regard de l'ensemble de
Passages Into Deformity, tuerie quasi totale d'un groupe au sommet de son art même si
Psalms Of The Moribund reste intouchable. Defeated Sanity a tout compris au brutal death et continue de faire partie des rares groupes à transcender le genre. Un pied de nez brutal aux Américains qui n'arrivent pas à reconquérir le trône d'un style qu'ils ont pourtant fondé et qui est longtemps resté leur apanage. Mais les Allemands sont beaux joueurs et les références aux scènes new-yorkaises (Suffocation, Internal Bleeding, Dehumanized), californiennes (Disgorge, Deeds Of Flesh) et texanes (Devourment) sont nombreuses sur ce
Passages Into Deformity à la saveur old-school hautement appréciable. Un conseil aux autres groupes de brutal death US: attendez l'année prochaine pour sortir quoi que ce soit sinon vous aurez tous l'air ridicule en comparaison!
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