S’il y en a un qui mérite sa place au panthéon des plus féroces offensives grind, c’est bien celui là : de part son formidable intitulé, déjà, qui promet une réponse à la hauteur du préjudice subi par son principal initiateur, Dan Lilker. Lourdé d’ANTHRAX pour faire la place au neveu de Charlie Benante (Frank Bello) après une sombre histoire de loyer impayé, le bassiste n’a depuis eu de cesse de monter le curseur de l’extrémisme sur chacun de ses autres projets. NUCLEAR ASSAULT, puis S.O.D. (à qui l’on doit pour bonne part le regain de virilité de ses ex sur « Among The Living ») et enfin BRUTAL TRUTH, formé en 1990. Deux démos et EPs plus tard, la charge s’avère on ne peut plus lourde : early nineties oblige, « Extreme Conditions Demands Extreme Responses » conserve la force de frappe des sorties death metal de l’époque, conjuguée à la crasse punk à l’origine du mouvement. La date de sortie de cette dirty bomb coïncidant étrangement avec celle d’une autre pierre angulaire du genre, difficile d’échapper au tentant parallèle avec NAPALM DEATH.
« Utopia Banished » donc, avec qui « ECDER » ne partage pas seulement le même producteur (Colin Richardson, de retour aux manettes en 2013 avec … CARCASS !!!), mais pléthore d’ingrédients en faisant des indispensables. Le grain des guitares déjà, aussi abrasif que le jeu de fond de court du tennis espagnol. A l’instar de nos compatriotes Français (pardon, Suisses !) en rupture d’entraînement, les joueurs de baballe risquent fort d’exploser au bout de trois frappes –
la seule triplette « Birth Of Ignorance »/« Stench Of Prophet »/« Ill-Neglect » justifie la note ultime - tant le contenu de ce premier full length s’avère aussi foudroyant qu’efficace. Où l’on retrouve du riff aliénant par palettes entières, issu de de la même aciérie que celle de leurs confrères de Birmingham : mention
vol au dessus d’un coup de grisou pour celui de « Birth Of Ignorance », qui fait l’effet d’un rollercoaster façon mines du temple maudit, sans ce bon vieux Indiana pour éviter le grand plongeon ! Un bon bain chaud dans une cuve de lave en fusion, voilà pour le programme. Un passage en revue de tous les fondamentaux grind en vigueur à l’époque, voilà pour l’application d’une formule qui baignait alors fortement dans le death metal. A l'instar d' « Utopia Banished », on retrouve quelques solis égarés venant semer le trouble au dessus du grand barnum (« Anti-Homophobe », « Birth Of Ignorance »), des cris exaspérés de mégère foldingue à chaque déferlante de blasts (copyright Mitch Harris) et une rapidité d’exécution proprement hallucinante. Comme de bien entendu, les traditionnelles éjaculations précoces sont également de sortie (« Collateral Damage » et « Blockhead », 11 secondes cumulées), même si BRUTAL TRUTH aère déjà son grind furibard de quelques plages doom du plus bel effet (« Time », « Wilt »), le temps d’achever quelques mutilés au couteau dans le fond du cratère.
Si NAPALM DEATH s'apprête à opérer sa mue post death-industriel, les quelques samples bruitistes qui émaillent l’écoute de « ECDER » ne préfigurent pas pour autant la prise de tête
« Need To Control », livrée deux ans plus tard avec force antidépresseurs et camisole de force. Ce premier sang a beau pousser très loin les limites de l’entendement, l’ensemble reste suffisamment classique pour accrocher les casuals, privilégiant les shots d’adrénaline aux coups de bluff noisy dont BRUTAL TRUTH s’est depuis fait une spécialité. Dès lors, la mitrailleuse Scott Lewis arrose généreusement des compos brûlant toute la gomme au démarrage (la basse starter de Lilker sur « Stench Of Prophet », grosse œillade à Shane Embury), quitte à finir sur les jantes le temps d’un gimmick carcassien en diable (« Regression-Progression», qui singe « Ruptured In Purulence »). Si l’album n’est pas exempt des délires vocaux d’un Kevin Sharp passé par la case expérimentation sur animaux, celui-ci s’adonne au growl typiquement death plus qu’à l’accoutumée ; d’une manière générale, « ECDER » pousse déjà le grindcore dans ses derniers retranchements, tout en restant fidèle à ses codes. On n’échappera pas à quelques adjuvants samplesques toujours réjouissants –
Do you believe in god ? I believe in myself - ainsi qu'aux thématiques politiquement orientées (Good cops are dead cops!). C’est sans doute la clé du succès d’un opus se payant le luxe d’être à la fois le BRUTAL TRUTH le plus accessible, mais également le plus frontal.
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