Arkangel - Hope You Die By Overdose
Chronique
Arkangel Hope You Die By Overdose
Il existe deux catégories d’anges. La première, telle que la majorité d’entre nous les connaissons : des serviteurs de Dieu à l’âme aussi pure que leurs ailes sont immaculées. De braves messagers divins, esprits de bien à l’image de leur maître, envoyés sur Terre pour délivrer des messages d’espoir et servir en faveur des croyants. Ces derniers apparaissent parfois sous forme humaine, comme l’Abbé Pierre ou Mère Teresa. La deuxième caste d’anges est radicalement différente : ceux-ci ne sont plus des annonciateurs de joie et de paix, mais des bras armés vengeurs, apportant une justice sans pitié à l’encontre de tous les pauvres pêcheurs, aussi appelée châtiment divin ou juste rétribution. Dans le cas présent ils sont personnifiés par Arkangel, commando d’extermination ailé descendu ici-bas pour récolter à leur tour ce que les hérétiques ont semé… la souffrance.
Quatre ans après un Dead Man Walking considéré par beaucoup comme une pièce angulaire du hardcore metal européen, les Belges annoncent la couleur d’entrée : Hope You Die By Overdose. Difficile de faire plus explicite comme nom d’album, ils ne nous souhaitent pas tout le bonheur du monde. Bien au contraire, ils sont prêts à en découdre à coups de lames fraîchement aiguisées, pochette à l’appui, et tous les éléments de leur musique sont autant de rappels que la main de Dieu ne tremble pas quand vient le moment de frapper. Pourtant on pourrait croire que ces anges ne sont pas si mauvais qu’ils y paraissent à l’écoute de l'intro, présentant des guitares tristes mais tout de même chantantes, qui suggèrent plus les regrets des mauvaises actions passées et le repentir que la vindicte à venir. Mais il n’y a pas de place pour les regrets dans la mission purgative que s’est donnée Arkangel et il ne faut pas longtemps pour se rendre compte que cette introduction sonne en réalité comme les trompettes annonçant l’Apocalypse.
La piste suivante, la première véritable offensive « Annihilating Your Peace » pourrait servir de résumé pour la suite des réjouissances, tant sur le plan musical que conceptuel : l’auditeur est constamment violenté par des guitares penchant beaucoup plus vers le metal que le hardcore, à la fois dans les sonorités et la composition des riffs. D’ailleurs, le groupe avoue volontiers en interview « préférer partir en tournée avec un bon groupe de thrash ou de death metal ». Mais la balance est néanmoins équilibrée par les ralentissements de tempo propices aux parties plus lourdes et mosh parts qui dans le cas présent s’insèrent parfaitement dans les compositions car ne cassant pas le rythme plus que nécessaire, afin de remuer le couteau dans la plaie aussi longtemps que possible. Il suffit d’écouter « How We See The World » (sûrement mon titre préféré) pour se faire une idée de ce dont est capable la formation bruxelloise. Tout est coupant et sulfureux, la preuve ultime étant le chant de Baldur, ténor du hurlement abrasif qui déverse sa rancœur à s’en arracher la gorge. Je précise qu’ici ce n’est pas la figure de style usée et abusée pour dire qu’il chante puissamment, puisqu’en effet de puissance il n’est pas tant question. Plutôt de méchanceté et d’agressivité non feinte. Rarement l’occasion m’a été donnée d’entendre quelqu’un pousser aussi loin les capacités de ses cordes vocales, exception faite du grand K majuscule posant sur fond rouge hexagonal, celui de No Surrender plus particulièrement. On peut d’ailleurs entendre sa voix appelant à la Guerre Toujours sur « Warpath 777 ».
Peu de place est accordée à la mélodie, là n’est pas le propos du groupe, si ce n’est de légers passages sur « The Little People » ou « Who’s Time Has Come ». Cependant, je vous rappelle que l’œuvre est destinée à faire souffrir et ces infimes notes de répit cachent au fond une volonté de tourmenter non plus la chair mais l’esprit, comme sait si bien le faire Integrity quand il lâche son hardcore de brute pour nous offrir des riffs plus mélancoliques et torturés qui laissent des bleus à l’âme. Je ne peux m'empêcher de baisser tristement les yeux au sol en écoutant l'introduction et ses pics de guitares pinçant le cœur. En revanche Arkangel se différencie de son illustre aîné en ne proposant pas de « vrais » moments de bravoure heavy/guitar hero – on ne compte pas plus de deux solos – et mise tout sur l’agressivité une fois la vendetta lancée.
Afin de nous démontrer leur grosse colère divine, les Belges s’appuie sur un son qui leur est propre et identifiable depuis leur début de carrière, avec une production tranchante, assez claire pour laisser opérer les riffs de manière précise mais ne boudant pas sa part sombre pour développer l’atmosphère de promesse de mort qui parcourt le disque jusqu’à la dernière note. Le morceau titre en est l’illustration avec ses neuf minutes de riffs traînants et déprimants qui concluent l’album, nous laissant baigner dans notre propre flaque de sang, le souvenir douloureux de la boucherie que l’on vient de vivre en tête. Enfin, impossible de faire cette chronique sans parler des incontournables samples qui justifient le siège en cuir rouge des archanges au carré VIP du Holy Terror : texte biblique sur orchestrations effrayantes (cf. « How We See The World ») ou extrait glauque de From Hell (le début de « Warpath 777 ») ; un autre du film très trash Gummo, durant lequel on entend des enfants abandonnés à eux-mêmes s’insulter violemment sur le dernier titre – « Damn you rabbit you smell like fucking piss, you can kiss my ass! ».
Nous tenons là un opus exploitant donc à fond la bâtardise thrash metal + hardcore qui faisait fureur dans les années 90, popularisée par Integrity, Ringworm ou tout le crew belge du H8000. Il est tout à fait légitime de placer Arkangel sur le podium de cette catégorie pour les années 2000 malgré les critiques sur leur attitude et le fait qu'ils aient rompu leur straight edge – ce qui explique pourquoi je n'utilise pas l'étiquette edge metal pour cet album. Il faut bien comprendre que même au sein de cette scène hardcore métallisée Arkangel est une figure assez unique qui se démarque des autres groupes : riffs plus acérés et moins lourdauds, chant strident et non pas rauque, absence du côté mélo-dramatique... Un des rares reproches que l’on pourrait faire à l’encontre de Hope You Die By Overdose serait le manque de diversité entre les morceaux car la recette appliquée reste quasi inchangée d’une piste à l’autre, mais cela est dû à la volonté du groupe de proposer un disque extrême et jusqu’au-boutiste qui pourra provoquer le dégoût de certains. L'overdose.
| KPM 26 Septembre 2013 - 4215 lectures |
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