Prolifiques, les petits gars de REVOCATION. A peine a-t-on pu bénéficier des largesses du groupe sur leur dernier EP en date (l’excellent
« Teratogenesis », en téléchargement libre via Scion A/V) qu’ils remettent le couvert, toujours chez Relapse, avec un quatrième essai longue distance. Vu l’effarant niveau technique de David Davidson & Co., on remisera gentiment les formules de circonstances type
album de la confirmation ou
quintessence d’un style parvenu à maturité ; puisqu’ils n’ont pas attendu de sortir leur quatrième full length pour épater la galerie (une affaire entendue dès « Existence Is Futile », 2009), pointons sans plus attendre le principal défaut d’une cuirasse plus étincelante encore que celle de Lancelot du Lac. Comme si Galaad allait et venait incognito en contrée hostile fringué en lépreux, l’emballage de la chose donne franchement dans le déplorable.
Vous me direz, les pochettes moches dans la grande histoire du metal, ça relève de la tradition. Si les aficionados s’en balancent pas mal d’enrichir leur musée des horreurs personnel, dommage pour les adeptes du délit de sale gueule. Ceux-ci passeront clairement à côté d’un très bon skeud de thrash death mélodique, dont le contenu s’avère légèrement supérieur à celui du déjà réjouissant
« Chaos Of Forms ». Pour ceux qui prendraient le train en marche, REVOCATION s’applique à dynamiter une base thrash-metal fortement référentielle à l’aide d’adjuvants rythmiques empruntés à la scène extrême, majoritairement death (double pédale à gogo, blasts, gueulantes d’écorchés vifs) ou black (quelques riffs bien vicelards, la trame sombre de certains passages). Ajoutez à cela l’attitude un rien joueuse d’un frontman passé par le Berklee College Of Music (rot n’ roll baby !) et vous aurez compris qu’on tient le petit frère rageux d’ANNIHILATOR. Rien à envier aux Canadiens sur le plan technique, pas de plans heavy brise-burnes pour faire fuir les détracteurs du genre : le groupe de thrash death parfait, en somme, capable de reproduire à l’identique des pans entier du répertoire des grands anciens. Que ce soit le SLAYER retord de « Diabolus In Musica » au démarrage de « The Hive », le grand METALLICA de « … And Justice For All » (« The Gift You Gave », qui ridiculise SYLOSIS au passage) où même MEGADETH, tous les plus grands y passent. Ainsi, ceux qui n’ont toujours pas digéré que Dave Mustaine s’essaie au banjo sur « The Blackest Crow » seront surpris par la leçon infligée sur la fulgurante « Invidious ». Une relecture furibarde des fondamentaux du Deth (on croirait retrouver Marty Friedman sur « Fracked ») suivie d’un instrumental de rêve (« Spastic », pour étancher sa soif de soli cristallins), avant une fin de programme efficace mais un rien déclinante. Où l’on touche enfin du doigt la seule limite à laquelle semble se heurter un quatuor en totale maîtrise. Aussi réussi soit-il, « Revocation » vaut surtout pour les nombreuses œillades au passé des maîtres thrashers.
Car si les Américains se défendent aussi très bien lorsqu’ils durcissent le ton, il faut bien reconnaître que les passages les plus sombres et torturés du disque ne sont pas les plus mémorables. Comme sur
« Chaos Of Forms », REVOCATION s’avère irrésistible sur deux ou trois titres (une « Numbing Agents » bien rock n’ roll, la doublette « Invidious »/ « Spastic ») précitée), puis de manière plus parcellaire (le break heavy/folk sur « Archfiend », que ne renierait pas Jeff Waters) sur la plupart des titres. Faute d’affirmer son identité, on se contente donc de couper une à une les têtes de l’hydre protéiforme en retournant chacune d’entre elle à son propriétaire. Si ça ne les empêchera pas de prétendre à une place d’honneur dans le bilan de fin d’année, la voie de l’excellence est toute tracée. Faute de révéler sa vraie nature, REVOCATION semble condamné à marcher dans l’ombre des géants. Vu les armes dont ils disposent, ce serait dommage qu'ils s'en contentent !
4 COMMENTAIRE(S)
05/10/2013 22:28
05/10/2013 15:50
@ Henrik : ouaip je pense, pour toi c'est comparable à Dew-Scented en terme d'impact (go!) et de division, soit la L2 du thrash. Mais pour moi ils ne boxent pas dans la même catégorie, ne serait-ce que sur le plan technique. Et le côté fouilli des compos n'est pas pour me déplaire!
04/10/2013 17:48
04/10/2013 16:12