Kanashimi / Happy Days - The Great Depression II
Chronique
Kanashimi / Happy Days The Great Depression II (Split-CD)
Nous sommes en 2014 et vous écoutez encore du dépressif ? Mais ma parole, vous êtes bloqués à une autre époque ou bien ? Encore, vous me diriez adorer le black sympho, je vous trouverais rétros et sympathiques, doux rêveurs n’ayant pas réussi à faire leur deuil. Mais du dépressif ! Enfin voyons, quand on est en 2014, on est censé avoir passé le pas et écouter du postblack ou des dérivés de WOLVES IN THE THRONE ROOM ! En 2014 on a fini sa dépression parce qu’on s’est suicidé depuis longtemps ! En 2014 on en est à l’étape post-mortem, plus spirituelle ! Le black metal qu’il convient de jouer en 2014 c’est « une désolation lumineuse à travers le récit d’une âme interdite de repos qui vient hanter les lieux où son corps avait l’habitude de prendre du bon mais surtout du mauvais temps »... Du postblack quoi ! Le bon point c’est qu’on imagine que la prochaine étape du BM sera enfin la renaissance. Bah si, après la mort et l’errement de l’âme il faudra bien qu’un jour on retrouve un corps tout neuf non ? Vous êtes athée et pensez qu’il n’y a rien après ? Vous êtes démoralisants...
Enfin de toutes façons, vous en êtes encore à écouter du dépressif, alors revenons à nos moutons noirs. D’abord soyez rassurés parce que vous n’êtes pas seuls. Je suis là. Ensuite dites-vous bien qu’il y a pire que nous. Il y a ceux qui jouent du dépressif ! En écouter, déjà c’est un exploit, mais alors là, ces groupes qui persistent à écrire des compositions je les applaudis des deux mains. Ils doivent se sentir de plus en plus seuls d’ailleurs vu le nombre de formations qui essaient de se reconvertir (« Allô ? Monsieur AUSTERE ? » / « Oui je fais un petit GERM mais vous pouvez me retrouver sur AUTUMN’S DAWN ! »). Et donc je tape des mains pour KANASHIMI et HAPPY DAYS ne serait-ce que pour leur acharnement. Comme beaucoup le savent déjà le premier est japonais et le second américain. Un split les réunissant n’est pas très étonnant car hormis le style pratiqué, ils ont aussi le point commun d’avoir vu le jour à la même période. Ils ont proposé une première sortie dépressive en 2007, année bénite pour le genre avec la sortie du deuxième album de MAKE A CHANGE… KILL YOURSELF mais aussi de trois albums de TRIST. Ils partagent aussi les mêmes critiques concernant la simplicité de leurs compositions et le manque total d’innovations. Et c’est vrai que chacun à sa manière réitère toujours le même schéma.
Personnellement, je n’en fais pas le reproche à KANASHIMI. Tout simplement parce que O. Misanthropy s’est trouvé un son personnel dès ses débuts, en intégrant et mettant en avant un piano. Oui je sais que dit comme ça on peut pouffer. Un piano dans du black dépressif c’est aussi original qu’une flûte dans un groupe folk ou un clavier dans un groupe de sympho, mais le piano de KANASHIMI tire totalement la couverture à lui, et pique la vedette à tout le reste, même aux vocaux fantomatiques hurlés depuis un autre monde. C’est simple à en crever, mais c’est efficace, autant que chez FEAR OF ETERNITY. On se sent enveloppé dans un cocon d’une nouvelle espèce, qui ne vous transforme pas en papillon mais en momie incapable de bouger. Si vous restez de marbre, c’est que vous n’avez pas de cœur, voyou ! En tous cas le Japonais est l’un des rares dépressifs à avoir une patte si personnelle qu’on le reconnaît immédiatement. Vous connaissez KANASHIMI ? Alors vous reconnaîtrez ses titres sans aucun doute. Impossible de perdre un blind-test avec lui. Les quatre nouveaux morceaux proposent bien entendu la même formule inlassablement. Une grosse crème de piano sur un rythme lent doomesque.
HAPPY DAYS est au contraire plus qu’un groupe. Il est le représentant d’un style, très utile pour proposer un exemple de ce qu’est le black dépressif. Avec leurs titres on est toujours en terrain connu : lent, triste, cris étouffés, hurlés... Eux, vous pourrez les confondre avec beaucoup d’autres formations. Essayez de les différencier d’I’M IN A COFFIN ou LOST INSIDE et vous aurez une lame de rasoir en cadeau. Ah si ! Les deux autres groupes ont presque jeté l’éponge et sont actuellement en cure de repos alors qu’HAPPY DAYS a encore ce mérite de persévérer. Et il nous assène donc de vrai black dépressif, avec tous les ingrédients officiels nécessaires. Il ne s’embarrasse d’aucun apport et même les vocaux qui avaient vu certaines évolutions sur Cause of Death sont redevenus comme il faut. Ces 5 nouveaux titres sont donc idéaux parce qu’ils correspondent exactement à ce qu’on attend du dépressif, mais aussi complètement inutiles puisqu’ils ont déjà été entendus à l’infini. Chapeau par contre à celui qui titre les morceaux, parce qu’il arrive encore à trouver des formules bien parlantes : « Guilty », « Life Goes On... », « Hallowed by Lunacy »... Il reste dans le même thème tout en renouvelant le vocabulaire. On repense aux vieux « Forever Asleep », « This Will Hurt », « Alone and Cold »... Cela deviant Presque un dictionnaire de la Negative Attitude !
The Great Depression II ne propose que des titres inédits des deux groupes. C’est suffisant pour satisfaire les fans. En tant que gros amateur de KANASHIMI je suis comblé par leur prestation, et j’imagine que certains le seront par celle des Américains. Enfin, pour les curieux qui se demandent ce qu’il y avait sur The Great Depression I, eh bien voilà : 2 titres de PSYCHONAUT 4, deux de HAPPY DAYS, 2 de DODSFERD. Mais c’était sorti sur un autre label, Funeral Industries.
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