Conqueror - War Cult Supremacy
Chronique
Conqueror War Cult Supremacy
Malgré toute la bonne volonté du monde, il y a malheureusement un paquet d’albums ayant marqué l’histoire de la scène underground que nous n’avons toujours pas eu le temps d’aborder sur Thrashocore. Revoir récemment Revenge et James Read sur scène m’a ainsi rappelé que War Cult Supremacy, album référence en matière de Black/Death bestial et primitif, n’avait toujours pas trouvé sa place parmi nos écrits. Un oubli que je souhaite corriger avec la chronique de cette discographie sortie sur le label californien Nuclear War Now! en 2011 et intitulée pour l’occasion War.Cult.Supremacy. Un clin d’œil subtil mais néanmoins évident à Revenge, l’autre groupe de James Read.
Conqueror est donc un groupe canadien formé justement par James Read (Blood Revolt, Kerasphorus, Revenge, ex-Axis Of Advance) et Ryan Förster (Blasphemy, Domini Inferi). Actif entre 1994 et 1997, le duo a sorti l’essentiel de ses productions à titre posthume à l’exception cependant de sa première démo intitulée Anti-Christ Superiority. Enregistré en décembre 1996, War Cult Supremacy n’est en effet sorti qu’en 1999 via Evil Omen Records, sous-division du célèbre label français Osmose Productions. Premier et unique album de Conqueror, celui-ci s’est très vite imposé comme l’un des disques les plus radical que le Metal extrême ait connu, que ce soit sur le plan musical, esthétique et idéologique. Il faut dire que le groupe cultive avec une certaine ambiguïté une image particulièrement sulfureuse, notamment à travers des visuels largement inspirés par l’Allemagne de la seconde guerre mondiale ainsi que des paroles prônant avec vigueur une certaine suprématie du "Je" sur le reste du monde ("The absolute laws of Nature replace the deficient laws of humanity", "Legions of higher men now prepare for war...", "Temples of the inferior are ablaze"...). Bref, une vision punitive et totalitaire qui confère d’emblé à Conqueror une certaine toute-puissance.
Et si les visuels choisis par Conqueror pour illustrer sa musique ne laissent aucun doute quant à ce qui se trouve gravé sur ces deux disques, rien ne nous avait pourtant préparé à une telle déferlante de haine et de violence. Qualifié par certains de pure abomination auditive et à l’inverse de génies visionnaires et élitistes par d’autres, les canadiens n’ont eu de cesse de repousser les limites de l’acceptable pour nous servir avec War Cult Supremacy l’un des albums les plus jusqu’au-boutiste jamais composé. Se servant de l’héritage laissé par des groupes tels que Beherit, Sarcofago et Blasphemy qui à la fin des années 80 avaient déjà su franchir avant leur temps les barrières d’un genre encore en pleine définition, Conqueror a suivit ce même chemin pour nous offrir à l’orée du vingt et unième siècle la quintessence de ce que l’on qualifie aujourd’hui (et avec des pincettes, certains étant très à cheval sur les genres) de Black bestial ou de Black/Death primitif.
Car en tout état de cause, War Cult Supremacy n’est pas un disque particulièrement facile d’accès. S’il m’est souvent arrivé de l’écrire pour évoquer notamment les productions de certains albums comme ceux de Portal, Antediluvian ou Diocletian, il s’agit ici de tout autre chose. Certes, la production étouffée n’aide pas particulièrement à la bonne compréhension mais ce sont surtout les riffs et les structures de chaque titre qui sont les principaux responsables de cette impression à la fois incroyable et douloureuse. Douloureuse car ne nous le cachons pas, il faut une sacrée dose de courage ou bien faire preuve de beaucoup de masochisme pour se laisser lacérer les oreilles et le cerveau de la sorte. Entre les assauts incessants et ininterrompus d’un James Read au bord de la rupture et les riffs chaotiques, dissonants pour ne pas dire cacophoniques et hallucinés d’un Ryan Förster en mode blitzkrieg (ces fameuses montées de manches si caractéristiques), nombreux sont ceux qui on dû rendre les armes dès les premières minutes de "Infinite Majesty". Cela sans parler de la voix haineuse et arrachée de James Reads qui, non content de nous fracasser la tête avec ses blasts bordéliques en rajoute une couche avec ses lignes de chant ultra radicales et agressives marquées de temps à autre par quelques cris aigus bien perçants. Comme si tout le reste n’était pas déjà suffisamment bruyant.
Et paradoxalement, ce sont ces mêmes raisons qui créées autour de War Cult Supremacy une espèce de fascination étrange et presque inexplicable. Car la violence et le chaos qui se dégagent de ces titres sans structures apparentes, aux riffs dissonants quasi inaudibles et aux blasts aliénants et parfois syncopés sont finalement ces mêmes éléments qui nous poussent à enchaîner les écoutes, les unes après les autres, en quête perpétuelle de cette violence/puissance inouïe et insoutenable. Ici, rien n’est facile, tout se mérite et il n’y a finalement que ces quelques breaks rappelant Archgoat (ainsi que cette excellent reprise de Slaughter un poil plus accessible) pour espérer souffler le temps de quelques secondes. Le reste n’est que démonstration de force, coups de boutoir subits dans la douleur, déferlement de haine et de rage sans aucune forme de pitié... Extrême de bout en bout.
Contrairement à l’édition originale de 1999, c’est sur le deuxième CD que ce trouvent les deux titres bonus figurant initialement sur la version d’Evil Omen Records, "Command For Triumph" et "Hammer Of Supremacy". Le premier est issu d’un split sorti en 1999 en compagnie des américains de Black Witchery. Le second figure sur une compilation intitulée World Domination Command I parue en 1997 sur Osmose Productions. Enregistrés quelques mois avant ("Hammer Of Supremacy" - août 1996) ou après ("Command For Triumph" - février 1997) War Cult Supremacy, la recette reste évidemment la même tout comme la production. Deux titres toujours aussi redoutables et efficaces qui viennent parfaitement compléter cette discographie tout comme cette chouette reprise des Brésiliens de Sarcofago ("Christ’s Death"). Enfin, on retrouve également la première démo des Canadiens sortie en 1996 (Anti-Christ Superiority). Aucun inédit en soit puisque tous ces titres figurent au tracklisting de War Cult Supremacy. Il n’y a que l’interprétation et la qualité sonore qui soit légèrement différente en faveur, à mon humble avis, de l’album.
Probablement en avance sur son temps, War Cult Supremacy a ouvert la voie à bien des groupes de Black/Death et continue sans surprise à être cité comme l’une des formations les plus extrêmes que la scène Metal ait enfanté. Peu après le split de Conqueror, James Read ira former Revenge avec qui il suivra peu ou prou le même chemin, continuant ainsi d’insuffler haine, violence et misanthropie sur qui voudra bien poser ses oreilles sur ces témoignages peut-être encore un peu plus chaotiques. Quoi qu’il en soit, War Cult Supremacy est et restera l’une des principales références en la matière au même titre qu’un Fallen Angel Of Doom ou un I.N.R.I.. Cette compilation qui regroupe la totalité des enregistrements de Conqueror devrait donc figurer sur vos étagères si vous avez de quelconques affinités avec ce genre de Black/Death bestial et primitif que rien n’arrête. Cult, oui, on peut le dire.
| AxGxB 30 Août 2015 - 2100 lectures |
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