Maïeutiste - Maïeutiste
Chronique
Maïeutiste Maïeutiste
« Ah ma bonne dame, le Black Metal, c'est plus ce que c'était » diront sûrement certains puristes ou autres quadragénaires traditionnels ayant jetés leur ado par la fenêtre en ayant grillé du Deafheaven dans son Mp3. Nul doute que le genre est – depuis quelques années déjà – en pleine renaissance artistique. On ne pratique plus le genre dans un esprit de pureté originelle mais, au contraire, dans une optique de plus en plus ouverte. Et que les plus réfractaires ne se braquent pas, c'est tout simplement dû au fait que ce qui était un petit microcosme dans les années quatre-vingt-dix gagne - à force de longévité – une sphère d'aficionados en constante expansion. On peut maintenant citer les groupes qui font leurs courses dans l'Emo, le Math-Rock, l'Electro comme des formations novatrices et plus simplement comme des traîtres impurs à l'idéalisme du Black Metal grésillant, antichrétien et nordique. De moins en moins underground, sans pour autant devenir populaire, le style s'étoffe et, si vous voulez mon avis, c'est tant mieux.
Mais si je vous parle de ça aujourd'hui, ce n'est pas pour taper dans la constatation d'une évolution d'un genre qui me tient à cœur. Non, je suis pas encore le 3615 Usul du Black Metal mais seulement, force est de constater que le groupe du jour m'a rappelé ces réflexions. Maïeutiste est une synthèse de ces deux « écoles » ou « conceptions » du genre, une sorte de pont équilibré entre ces visions toujours opposées mais rarement fusionnées. Une communication qui semble aussi bien musicale, que générationnelle ou encore thématique. Ou encore, si l'on veut simplifier le propos, une sorte de « Comment faire du neuf avec du vieux ? ». Et vice-versa d'ailleurs, si l'on prend la peine de remarquer les quelques inspirations modernes que le groupe se plaît à dissimuler ici ou là (« Reflect / Disappear » et son riff des plus Nightbringerien).
Dans cette querelle des anciens et des modernes version corpse-paint contre bermudas, Maïeutiste peut prétendre au titre prestigieux de « réconciliateur » puisque les influences présentes oscillent consciencieusement entre le Doom à l'ancienne (difficile de ne pas voir du Pentagram ou du Cathedral par instants), Black traditionnel sur les passages les plus rentre-dedans, ambiances occultes résolument jeunes pour le genre (« Purgatoire » se pare d'un sample que ne renierai clairement pas la scène orthodoxe estampillée 2005-2010), production puissante (et donc actuelle) mais paradoxalement organique au maximum (et donc à l'ancienne)... On pourrait continuer longtemps à énumérer ce qui fait de ce « Maïeutiste » un disque qui semble à mi-chemin, comme affilié à la fois au présent et au passé.
Mais curieusement, c'est ce melting-pot d'influences qui permet de propulser la formation au statut de « novatrice », car si elle prend des ingrédients simples pour concevoir sa recette, le résultat est pour le moins sophistiqué. On se retrouve alors devant un disque presque futuriste et avant-gardiste. Et c'est là que la fusion des styles réussit le pari de devenir quelque chose d'unique. Attention toutefois, « sophistiqué » ne voulant pas dire « alambiqué » ou « complexe d'accès ». On accroche plutôt facilement à ce premier album éponyme même si quelques détails effleureront les sensibilités de chacun : d'aucun seront refroidis par le durée conséquente de l’œuvre, d'autres par la présence de chants clairs ou de quelques accalmies atmosphériques. Nonobstant ces quelques choix qui pourront refroidir les moins insistants, l'album arrive toutefois à livrer sa substance au bout d'un nombre d'écoutes raisonnable (entre deux et cinq, à mon humble avis). Et si nous sommes conquis avec rapidité, cela ne veut pas dire que la chose est « facile ».
« Maïeutiste » fait preuve d'une finesse de composition qui sait disposer des passages adéquats au moment opportun. Ainsi, l'auditeur un poil refroidi par un Blast-Beats ravageur saura se retrouver sur le riff suivant, beaucoup plus apaisé. Une construction absolument imparable pour éviter de perdre le chaland – dont je fais partie, n'ayant jamais vraiment couru après le Black-Doom – en route. En résulte donc une cohérence à toute épreuve et une solidité dans le propos remarquable. Quelques petites choses me gênent donc, à titre totalement subjectif, comme le trop long solo de « Absolution » mais sauvé immédiatement par le break jazzy qui le suit. Encore une preuve de cette science décidément apte à captiver l'amateur non-éclairé. « Maïeutiste » ne sera pas mon album de l'année mais il a le mérite de pouvoir mettre tout le monde d'accord : ceux qui préfère l'expérimentation et ceux qui cherchent également à retrouver le groove remuant d'antan. Un disque très intéressant donc, pour qui j'ai éminemment plus de respect que d'amour mais qui saura sans aucun doute trouver son public et se faire apprécier à sa juste valeur.
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