Lorsque le précédent album de
DODSFERD est sorti, fin 2013, il y a un génie visionnaire qui a écrit ces mots pour réagir au gros virage punk qui avait été entrepris :
« DODSFERD suit à nouveau son instinct, comme il l’a toujours fait et son parcours reste tout à fait logique, à défaut d’être plaisant. Et que les déçus restent dans le coin, c’est évident que le prochain opus sera encore différent. »
Ce génie visionnaire, c’est Sakrifiss. Et ça tombe bien parce que Sakrifiss, c’est moi !
Ce n’était cependant pas si difficile à imaginer car Wrath a prouvé à de nombreuses reprises qu’il aimait prendre à contre-pied. Le Grec avait ainsi sorti en 2009 un album de deux titres imbibé de mélodies dépressives et joué 50 fois moins vite qu’à son habitude.
Suicide and the Rest of Your Kind Will Follow et ses 37 minutes n’avaient pas nécessairement convaincu. Cela n’avait pas empêché le groupe de revenir encore plus enragé que d’habitude deux ans après avec
Spitting with Hatred the Insignificance of Life. Et il a remis le cap vers autre chose il y a deux ans en lâchant tous ses spectres punk, des fantômes qui l’avaient accompagné depuis ses débuts mais qu’il avait jusqu’à lors réussi à tenir en laisse. Cet album nommé
The Parasitic Survival of the Human Race était une explosion punk agrémentée d’une reprise des
MISFITS. Il en avait rendu beaucoup sceptiques sur la santé musicale de
DODSFERD. C'est l'heure qu'ils revoient leur jugement !
Qu’est-ce qui explique ces changements d’orientation si fréquents? Trois facteurs principaux. Le premier vient de la variété des influences de Wrath. Il est avant tout fan de black, mais il a aussi trainé dans la moisissure du punk et erré dans les méandres du heavy. Il a ces styles en lui, et il les libère toujours à des degrés différents, selon son hurleur. Le deuxième vient de son caractère. L’homme est à la fois spontané et anticonformiste à l’extrême. Il est victime de pulsions qu’il n’essaie même pas de contrôler. Il se laisse totalement guider par ses émotions et va ainsi avoir besoin un jour de réagir vivement, un autre jour de pleurnicher dans son coin, et un dernier jour d’essayer de prendre de la distance... comme il semble le faire sur le nouvel album, on en reparle plus tard. Le troisième facteur vient aussi de son obsession de ne pas aller là où on l’attend. Il n’a pas envie de faire ce qu’on lui demande. Toute sa haine et ses frustrations envers l’Homme en général l’obligent à ne pas faire la musique qu’on attend de lui, il se sent le besoin de faire des doigts d’honneur continus. Ne dit-il pas lui-même dans chaque livret que nous pouvons tous aller nous faire mettre ? Oui... si ça ne nous plaît pas, qu’on aille donc se faire mettre !
Mais ce qu’il est très important de comprendre pour saisir
DODSFERD c’est que les changements ne sont pas des trahisons de l’esprit du groupe. Nous ne somme pas comme avec un
KEEP OF KALESSIN ou un
FORGOTTEN TOMB qui est passé à autre chose et semble même renier son passé !
DODSFERD montre souvent de nouvelles facettes, mais son corps est le même. Black dévastateur, mollards punk, dépressif nostaligo-mélancolique... Ce ne sont que des manifestations différentes de la même souffrance, celle qui reste et ne semble jamais quitter Wrath... Et malgré les différences, il y a tout de même la « patte
DODSFERD », notamment grâce aux vocaux si reconnaissables. Ils hurlent, ils raclent, ils protestent, ils se débattent. Rares sont les chanteurs aussi expressifs dans ce style.
Et sur ce nouvel album,
Wastes of Life, Wrath ne se retient jamais. Il place toutes ses capacités vocales d’un titre à l’autre. « Sterile Death, Without Morning » est d’une richesse éprouvante de ce côté-là. Il y a tellement de variations que l’on retrouve même un chant clair sur le titre de clôture : « Graves of Your Creator ». Il ne me semble pas que ce soit Wrath qui chante, ou alors bravo à lui pour pouvoir passer à ce genre de chant aigu... Ce titre fera grincer les dents des puristes non seulement pour ce timbre, mais aussi parce que tout le morceau semble avoir été composé par
GERM ! DODSFERD qui s’installe dans le post black, nul ne l’aurait jamais cru !
La musique de ce titre est d’une extrême douceur. C’est bien le titre le plus éloigné du train fou auquel nous sommes plus coutumiers, mais les autres démontrent aussi que les Grecs ont mis beaucoup d’eau dans leur vin. Au lieu de réagir comme ils le faisaient avant par des coups de latte dans la tronche, des coups de cutter donnés au hasard ou des crachats épais mêlés de sang, ils montrent cette fois-ci leur sensibilité, leur déception, leur aversion face à notre société. Il y a du renoncement dans chaque morceau. Il y a encore des soubresauts et des parties galopantes, mais ce sont les ralentissements et la luminosité qui nous éblouissent le plus ici. Le propos est : « Humains inutiles, humains exécrables, vous avez tout gâché, nous avons tout gâché... Voyez donc le résultat de nos actes, voyez donc cet océan d’obsolescence que nous laissons sur notre passage... »
Du coup, de nombreux éléments créant une sensation de plénitude dégagée apparaissent. On va découvrir du violoncelle sur « Sterile Death, Without Morning », des soli démentiels à la limite du progressif sur « The Dead Have no Speech For »... La haine est moins présente. D’ailleurs n’est-elle pas futile puisque tout est joué. Résignation... Elle est même absente d’un autre titre : « To the Fall of Man », qui va garder un tempo lent tout le long de ses 12 minutes, tout simplement porté par les vocaux torturés et à bout de force de Wrath. Très bon moment de black dépressif ! On songe même à
SHINING à de nombreuses reprises ! Il y a le même talent pour nous mettre un pincement au cœur...
DODSFERD nous sort donc un album différent, agréable, capable d’entrelacer la hargne et la mélancolie. Un album qui prend son temps pour poser les décors, ce qui explique que les morceaux avoisinent tous les 10 minutes. Seul le premier en fait 4, longue introduction composée de gémissements et de pleurs pour déjà installer la tension au maximum...
Ces morceaux peuvent déstabiliser à la première écoute, mais dès la suivante, dès que l’on a compris ce que Wrath nous avait réservé, on en comprend à la fois la richesse et l’efficacité. Très bien menés ils font revenir
DODSFERD à son sommet. Le seul reproche qui me vienne à l’esprit étant l’ordre des pistes. Les deux dernières sont les plus sages, elles ont tendance à nous faire très légèrement décrocher. Le retour des secousses aurait été apprécié...
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