Thou et moi, c'est un peu une histoire similaire à celle du monstre du Docteur Frankenstein. Au départ du côté des villageois pouilleux qui ne voyaient en lui qu'une abomination absurde, j'ai fini par voir son humanité à lui, supérieure à bien d'autres mis dans cette catégorie. Impossible de ne pas tomber amoureux après la surprise qu'a été
Heathen ! J'attendais donc de pied ferme cette compilation réunissant des titres des Louisianais autrefois sortis lors de splits avec différentes formations (Mohoram Atta, Salome, Leech, Moloch...) ou en tant que EP (
Baton Rouge, You Have Much to Answer For et
Malfeasance / Retribution). Une expectative qui a été plus longue que prévue, cette version CD par Gilead Media ayant connu des retards conséquents lors du pressage. Après moult excuses du label (qui enverra à ceux ayant précommandé l'objet un tote bag et des badges du groupe en cadeau, autant dire que je lui ai pardonné bien vite), voici enfin
Ceremonies of Humiliation dans mes oreilles.
Et je suis loin d'être déçu ! Certes pourvu d'une pochette moins clinquante que celle « Minor Threat » habillant la version vinyle de Vitriol, Dead Tank et Bloated Veins, ce double-disque plein à craquer (plus de deux heures de musique !) a ce qu'il faut de plus-value pour rendre l'écoute encore plus agréable. Doté de cinq titres supplémentaires, il donne l'impression d'entendre deux albums oubliés de Thou construits de bout en bout (cf. le positionnement en conclusion de la première partie de la drone/doom « Baton Rouge, Louisiana »),
Ceremonies of Humiliation tenant parfaitement la comparaison avec les longues-durées des Ricains, tout en se situant un peu ailleurs.
Car on a ici ce que Thou a sorti de plus rageur, congestionné, frontal, abrasif... de plus sludge, en résumé. Dix-neuf titres où la bande à Bryan Funck met la misère, entre passages groovy répétés jusqu'à l'abrutissement le plus complet (« The Severed Genitals... » ou la Fistulienne « Out of the Mouth of a Fool » sont de beaux exemples) et hostilité qui ne lâche jamais sa proie, à la manière de ces cris glaireux, étouffés par la haine, parcourant l'ensemble. Si la formule nommant Thou comme une version « intelligente » du sludge est souvent utilisée, nul doute qu'elle sera mise à mal avec ces morceaux lobotomisants au possible !
Sauf que... Sauf que l'on retrouve ici ce qui fait le prix d'un album comme
Heathen. Thou, bien qu'à son plus explicitement malfaisant, reste cette bête parsemée d'onirisme et de discours plus profond que de coutume. Au-delà de titres clairement engagés (« Don't Vote », « Shorties with MP40s », « The Deafeatist's Lament ») et quelques dérapages où le tempo accélère et s'ébroue dans le black metal (« The Song of Illuminate Darkness »), il y a en filigrane cette chose autre que Thou ne doit qu'à lui-même, cette atmosphère de rêve empoisonné, tribale (le batteur Josh Nee fait des merveilles, notamment sur « Fleurs de Mal »), nocturne et moderne, entre industries désertées et nature désolée. Seulement, elle est vécue ici avec un peu plus de sang versé et de membres découpés que d'habitude.
Il est clair que sa durée totale et son attachement à détruire le cerveau de l'auditeur font de
Ceremonies of Humiliation une compilation à écouter un minimum préparé. Exigeante (parfois trop lors de quelques longueurs telles que sur « By Every Hand Betrayed » ou « The Eyes of the World are Upon You »), elle n'en reste pas moins une nouvelle preuve que Thou est beaucoup plus que ce que j'ai pu y voir au départ : un truc incompréhensible et à la mode. Oui, il y a certains jours où je suis un peu con et il y a certains jours où c'est tous les jours.
La pochette de la version vinyle
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