Comment se reconstruire après avoir atteint des hauteurs personnelles (
Heathen), s'être morcelé en plein vol avec grâce (les collaborations avec The Body) jusqu'à chuter avec emphase, comme un retour aux origines (la compilation
Ceremonies of Humiliation) ? C'est un peu la question que fait me poser Thou sur cet EP.
Si vous pensez à l'histoire d'Icare en lisant cette introduction, ce n'est pas pour rien.
The House Primordial renoue avec le côté mythologique que pouvait avoir Thou, cette ambiance de légende vécue en première ligne, où la poésie d'élans atmosphériques vient contraster un sludge corrosif flirtant avec le black metal (oui, la voix de Bryan Funck définit toujours autant le mot « acide »). Rien n'a changé ici, le menace d'un sludge pesant se mêlant à une impression de flotter, les pieds devant soi, se retrouvant avec plaisir, tant il n'y a toujours pas de groupe comme celui des Louisianais. Une berceuse pour personne à l'aise avec le malaise, comme une comptine ancienne, « primordiale » en effet, dont on ne se lasse pas d'entendre les notes particulières.
Rien n'a changé ici et pourtant, le sentiment d'écouter un Thou lessivé, cherchant à se reconstruire après des événements où il s'est fait particulièrement violence ne s'enlève pas de ma tête. Pris seuls, des morceaux comme « Diaphonous Shift » ou « Psychic Dominance » prouvent que la bande n'a rien perdu de sa capacité à enfiévrer, emporter avec elle dans une cacophonie d'émotions. Mais sur le plan global,
The House Primordial se vit comme un découpage à recoller soi-même, là où j'apprécie justement le floutage des lignes, entre haut et bas, beauté et extrémisme, agressivité et réconfort, qu'un album comme
Heathen effectuait de belle manière. Cet EP, dans les moments les moins bienveillants avec lui, fait penser à un meuble à fabriquer pour être apprécié pleinement, un bricolage où les différents éléments drone, doom et post-rock ne prendront sens qu'une fois mis en place dans le cerveau de l'auditeur. Jouant sur des titres courts, aux enchaînements semblant parfois arbitraires (allant jusqu'à annuler les poussées toxiques développées précédemment), ce « cut n'paste », bien qu'agréable et loin d'ennuyer (en trente-huit minutes, cela aurait été un comble pour une formation comme celle-ci !), paraît trop frôler l'incohérence pour m'emporter comme j'en avais l'habitude.
Personnellement, malgré mon pseudo, je n'aime pas les œuvres en kit, préférant écouter des musiques au discours clair et profond, où se laisser embarquer. Ce qu'est capable de faire Thou mais ne fait que trop peu ici, me laissant penser que
The House Primordial est une entrée par la petite porte, un retour au bercail fatigué, avant de, je l'espère, casser la baraque avec un album à venir. En attendant, cet EP reste à écouter pour les fanatiques aimant tout connaître, allant jusqu'à compulser les histoires mineures dans la majeure.
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