C'est qu'il était attendu de pied ferme ce premier album, le prolifique Dario Derna ayant placé la barre assez haute avec la tuerie
The Pits Of Tentacled Screams parue en 2013. Une demo gloomy, informe et délétère qui nous avait enseveli sous d'épaisses couches de boue noire et malodorante, dans lesquelles on se vautrait avec délice, masochistes que nous sommes. Et c'est via le très bon label Profound Lore Productions qu'est finalement sorti en ce début d'année
Obscurations (To Feast on the Seraphim) – écrit puis enregistré entre novembre 2014 et septembre 2015. L'artwork de ce dernier, une nouvelle fois l’œuvre de Chris Campbell, ne laissait présager que du bon et il ne restait plus qu'à faire tourner la galette afin de se défaire des nombreuses questions et craintes, la principale étant : est-ce que Ritual Chamber arriverait à être aussi convaincant que sur court format ?
La réponse est : « ça dépend de ce que vous en attendiez » ! Car si
The Pits Of Tentacled Screams reste une bonne présentation de ce que continue à jouer Ritual Chamber, Dario Derna a fortement accentué la part atmosphérique de sa musique sur ce premier longue-durée. Certes, l'amateur de blasts et tremolos « ivol » issus de l'école Incantation trouvera encore de quoi le satisfaire ici (les nombreux soubresauts survenant sans crier gare sur « The Eternal Eye » par exemple) mais l'essentiel n'est plus dans cette capacité du Ricain à offrir une belle viande à croquer sur un lit de cendres : terne, déglingué et triste,
Obscurations (To Feast on the Seraphim) fait davantage penser à des formations comme Evoken et Encoffination derrière ses riffs qui n'en ont que l'allure, véritables mouvements défaitistes nous emportant vers le morbide. Semblant toujours évoluer en ligne droite vers les bas-fonds malgré des changements de tempos variés (« A Parasitic Universe »), l'album déroule son amour pour le sordide avec outrance, d'une pochette on-ne-peut-plus adaptée (vous allez les voir ces monstres de douleur durant l'écoute !) à des textes surlignant leur occultisme jusqu'à devenir aussi intelligibles qu'une prière aux Grands Anciens de Lovecraft. Un death metal qui, plutôt que de coller à l'alambiqué à la mode, s'avère old-school sur la forme et mutant sur le fond, jusqu'à transmettre l'impression d'être face à une ruine aux murs noirs suintant une espèce d'humidité fade, le délabrement donnant une allure difforme à ce qu'on devine avoir été des pièces. Un lieu infernal. Maudit.
Dario Derna préfère donc se démarquer que suivre les modes (second motif d'inquiétude rapidement balayé au fil de l'écoute), ce qui, au vu de son background, n'a finalement rien d’étonnant. En effet, délivrant toujours des sonorités death putrides et marquées du sceau old-school, Ritual Chamber montre ici une facette encore plus sombre et déshumanisée. Certes, vous retrouvez ce growl caverneux et bestial faisant sa force, tout comme ces riffs acérés, les nombreuses variations de rythme et les atmosphères funèbres prenantes (sur « Into The Collective Coffin ») mais le tout surmonté ici d'une grosse couche de glace. Plus cryptique (je vous invite fortement à lire les textes), rampant et sec – par une production davantage puissante et équilibrée (mais très organique) ainsi que des riffs paraissant être joués par un Shoggoth –, ce premier album met du temps à être apprivoisé contrairement à la précédente œuvre du projet. Car si certains titres, comme « Beings Of Entropy » mais encore quelques passages low tempo ambiancés et/ou brise nuques (la lead sur « Toward A Malignant Bliss », par exemple) forment une continuité et emportent tout sur leur passage grâce à leur efficacité, d'autres viennent contrebalancer cet effet avec des riffs et un décorum à la fois blafards et informes (le fat « A Parasitic Universe » ou encore le nébuleux « As Dust And The Animal »). Les compositions sont, une nouvelle fois, assez longues ne passant pas sous la barre des 4:30 afin de bien prendre le temps tisser leurs toiles, mais celles-ci sont davantage sinueuses. Les cassures sont nombreuses, particulièrement sur le morceau de clôture, et au gré des écoutes une folie somme toute démoniaque se fait clairement sentir, à l'image de l'artwork. Ritual Chamber évolue donc avec un
Obscurations (To Feast on the Seraphim) moins accessible et percutant que son court format
The Pits Of Tentacled Screams, mais prenant toujours racine dans le passé tout en gardant son essence malsaine. D'ailleurs outre les références, encore actuelles, citées plus haut c'est surtout du côté du visuel et donc de Infester, que Dario D. (ex-membre dudit groupe) est allé puiser son inspiration pour la réalisation de ce premier longue-durée – impossible en effet de ne pas faire le parallèle tant les ressemblances sont frappantes ici.
« Le défaut de ses qualités » ? Issu d'une certaine tradition et pourtant bourré de sensations inédites,
Obscurations (To Feast on the Seraphim) prouve que les attentes laissées par
The Pits Of Tentacled Screams trois ans auparavant n'étaient pas que des vœux pieux. Si l'on aimerait qu'il fasse plus de concessions à son propos brouillé en offrant davantage de tartines de riffs où se décontracter, à la manière du tout aussi terne mais nettement plus jouissif dernier album de Lie In Ruins
Towards Divine Death par exemple, l'essai est sans conteste transformé, possédant un fort pouvoir d'envoûtement où les rêves de fantômes nous attendant en coin de ruelle deviennent une réalité palpable de notre faible condition d'être vivant.
Ayant sûrement vu quelque monstrueux drame,
Mainte agonie et maint ensevelissement,
Les murs – vous semble-t-il – vivent en ce moment
Des rampements de spectres et de frôlement d'âmes.
Par gulo gulo
Par AxGxB
Par Jean-Clint
Par Raziel
Par Sosthène
Par Keyser
Par Keyser
Par Lestat
Par Lestat
Par Sosthène
Par Sosthène
Par MoM
Par Jean-Clint
Par Sosthène
Par AxGxB
Par Deathrash
Par Sikoo