Un être vous rejoint et tout est repeuplé ? Fange avait des atouts bien à lui dès le départ (le convaincant
Poisse) mais il a clairement franchi un palier avec
Purge. Un fait que les concerts en compagnie de son nouveau hurleur – Matthias Jungbluth, dirigeant du label Throatruiner et crieur chez Calvaiire (il y a encore besoin de présentations le concernant, franchement ?) – laissaient présager, le souvenir marquant de leur prestation ensemble au regretté Yell Fest venant tout de suite à l'esprit. Un enragé de plus au line up, les Rennais paraissaient avoir tout ce qu'il faut pour dépasser d'une tête la scène dans laquelle ils s'inscrivaient, celle du sludge « sick sick sick ».
Un giron dont la bande s'éloigne avec
Purge, tout en tapant particulièrement juste dans ce qu'il peut chier de malade, façon « lancer de balle avec effet ». Si la première impression est celle d'avoir une nouvelle fois affaire avec un album estampillé Throatruiner de la tête aux pieds – un peu comme d'habitude avec les sorties du label –, les Français finissent par s'esquiver, rendant leurs influences marquées au feutre (Entombed et Celtic Frost vénérés derrière la couche de mazout, cf. les salves crusty-death metal et autres « UH » jouissifs) plus troubles au fur et à mesure des écoutes. Très vite, l'esprit s'embrouille, bifurque de Swans à Charger, ne se repose plus, suit les remous et accélérations-punitions : Fange impose son rythme, au départ un peu dur à avaler, à l'arrivée assommant comme une pioche et vicieux comme un couteau transformant notre estomac en lavabo qui se vide. Un vrai buffet froid, viscéral et sanglant comme sa pochette, mais également méthodique derrière son bordel apparent.
Ce qui fait que les défauts signalés dans
Poisse n'ont plus à être considérés comme tels, tant Fange a travaillé sa recette, constamment dans l'excès sans devenir pénible. Auparavant un peu trop passe-partout, il a trouvé une identité de choix dans ce chant strident et sauvage, totalement imprévisible et semblant faire partie intégrante de la bouillie ambiante. Une façon étranglée de hurler, masochiste, qui rappellera de bons souvenirs aux amateurs de ce que Starkweather pouvait avoir de plus emo et tough à la fois, tout en s'alignant sur une certaine scène française faite de vice et de terne (lisez les paroles, elles valent le détour). Il y a une insondable tristesse ici, finissant par résonner sur l'ensemble des passages, une tristesse d'homme qui ne se laisse pas aller, préférant péter un plomb de rage que d'aller chialer dans un coin.
J'ai bien fait de laisser traîner le moment d'écrire cette chronique,
Purge devenant de plus en plus prenant – et indispensable – avec le temps. Son méli-mélo de tripes s'avère de plus en plus complexe, le qualificatif de « grower » s'apposant sans soucis à ces trente-huit minutes. Loin de s'arrêter à une vénération des riffs typés « HM-2 », il donne à voir des pulsions de mort qui se battent entre elles, là, l'envie de détruire de guitares-abattoirs aussi punk que death metal, ici, l'atmosphère claustrophobique d'un corps trop petit pour contenir ses envies, un corps qu'on module, torture et transfigure dans une succession d'explosions. Un titre comme « De Guerre Lasse » donne peu de place au doute à ce sujet : languissant et venimeux, il abandonne un instant les changements de vitesse pour nous faire croupir avec lui, dans une négativité qui évoque les derniers essais de la regrettée formation Indian.
Après un début tonitruant, Fange laisse tout de même apparaître de légers signes de faiblesses, notamment lors d'un final un brin décevant dans ses dernières notes disant que « le spectacle est finie ». Car
Purge est plus qu'une mise en scène, offrant certes de quoi contenter les carnassiers, mais se situant au-delà du simple plaisir SM pour amateurs de gras. Au risque de faire rire les puristes, si jamais vous cherchez quelque part un disque qui vous donne les mêmes sueurs froides, le même dégoût partagé entre adultes consentants, la même folie qui fait se gratter la tête jusqu'au sang, que Toadliquor, allez-y, Fange, bien que différent – vous avez compris qu'on tient ici un groupe qui ne s'insère pas facilement dans un moule conçu avant lui, non ? –, me transmettant des sensations similaires. Oubliez les Grime et consorts, se tirant la bourre sur qui sera le plus crade, timbré ou bêtement le plus « plus » : sans donner le sentiment de jouer à un concours quelconque,
Purge rafle la mise !
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