On dit souvent que le cap du troisième album est décisif pour un groupe, celui-ci choisissant souvent d’évoluer pour le meilleur comme pour le pire, afin de voir notamment si son public historique le suit ou s’il est remplacé progressivement L’heure est en effet importante pour les bordelais qui arrivent déjà à ce stade avec leur nouvelle réalisation qui fait suite à un très bon premier opus
(« Unreal Existence ») mais aussi à un suivant plus décevant
(« Ascension »), qui était plombé par une production en plastique dont le rendu ruinait la qualité de son écriture globale. Après avoir vu partir son batteur historique Antoine Fourré c’est désormais l’ancien FLESHDOLL Michaël Martin qui a repris la place laissée vacante derrière les fûts, et en plus de cela l’autre gros mouvement au sein du quatuor est son départ du label nordiste Great Dane Records pour atterrir au sein des américains de Unique Leader. Si ce nom bénéficie toujours d’une renommée à l’international il faut bien avouer que son aura a sérieusement décliné depuis déjà quelques années, la faute à une orientation de plus en plus basée sur le Death Moderne et le Deathcore sans âme, conjuguée à un son aseptisé lissé à l’extrême d’où rien ne dépasse, mais d’où aucune chaleur ne ressort.
Si on sentait que le précédent album des girondins allait dans cette direction il faut malheureusement reconnaître qu’il n’a pas changé son fusil d’épaule, et que l’annonce de sa signature au sein de sa nouvelle maison n’a hélas rien arrangé. On pouvait redouter que l’ensemble sonne de plus en plus technique et clinique, ce qui est effectivement le cas et si la maîtrise de chacun de ses membres s’est encore améliorée, celle-ci s’est faite au détriment de l’accroche et de l’efficacité. En effet dès le titre d’ouverture (« Scorched Human Society ») on se retrouve embarqué dans du tabassage en règle sans finesse, conjugué à de la branlette de manche difficile d’accès (mais heureusement moins insipide que les inécoutables ARCHSPIRE, RINGS OF SATURN ou ALTERBEAST). Si les parties blastées et ultra-rapides sonnent comme la ribambelle de formations du catalogue des californiens heureusement les sudistes ont conservé leur aspect mélodique et jazzy, comme pour signifier qu’ils conservent malgré tout leur personnalité. Car au milieu des déferlantes sans âme les solos de Sylvain sont comme un répit et un plaisir auditif, tellement les notes sont jouées vite qu’on a du mal à en saisir toutes les subtilités. Du coup on ne peut qu’apprécier ces passages en lead qui seront nombreux tout au long du disque, et très souvent magnifiquement posés sur des parties plus lentes et aérées, qui permettent de respirer et font du bien aux oreilles.
D’ailleurs quand le quatuor décide de ralentir l’allure et d’offrir à la fois plus de lourdeur et de mélodie, le résultat est tout de suite plus convaincant comme avec l’agréable « Hayato » qui se montre plus direct et équilibré, laissant ainsi plus de place aux passages lents. Ceux-ci sont encore plus représentés sur le très bon « Backdraft » où la furie s’efface au profit d’ambiances plus posées et mid-tempo, vu que les blasts et autres déchaînements de violence s’entendent ici avec parcimonie. Plus orientée sur les débuts de la bande cette composition montre que ces créateurs n’ont pas totalement renié leur passé proche, et c’est tant mieux car ils s’en inspirent c’est de suite plus entraînant et efficace. On peut dire effectivement la même chose de « Molten Giant » au copieux tapis de double (présent à de nombreuses reprises) qui après un début massif et enlevé (et une fin qui le sera tout autant) va doucement ralentir pour faire résonner les accords de guitares particulièrement soignés. A la fois plus direct et moins fouilli, d’approche plus moderne sans pour autant éliminer totalement ses débuts, cette compo est une des plus réussies, et qui à l’instar des autres entendues auparavant ne s’éternise pas sur la durée, une habitude en fait. Le son des girondins est allé depuis toujours à l’essentiel, et là-encore plus qu’auparavant, vu qu’hormis le copieux dessert rien ne dépasse les cinq minutes au grand maximum, ce qui va être une bonne chose vu la suite qui s’annonce. Si jusqu’à présent le relatif équilibre garantissait un passage auditif assez facile, la suite va être plus compliquée, la faute à une inspiration moins présente (« Flamewalkers ») ou un manque de fil directeur (« Lavaburst »). Pour la première partie de cette doublette le souci vient d’une relative faiblesse d’écriture malgré une construction assez classique, et bien que sa durée soit très courte il manque le petit ingrédient magique pour rentrer totalement dans l’univers de celle-ci, quant à la seconde c’est un côté Progressif mal utilisé qui gâche le rendu. Pourtant techniquement il n’y a rien à dire tant le niveau est incroyablement haut, ça tabasse sec au milieu de breaks et cassures bienvenus, mais le tout est difficile à suivre sans fil conducteur auquel se raccrocher, et c’est franchement dommage. Et même quand l’ensemble a tendance à ralentir ça n’est pas forcément parfait non plus, car « The Shape Of New World » et ses huit (trop) longues minutes au compteur plombent le mélange pourtant intéressant entrevu tout du long, et qui là-encore sort toute la palette créative des gars, à la fois douce et furieuse comme tendre et sauvage.
Autant dire qu’arrivé au bout un drôle de sentiment domine, celui-ci d’un groupe qui s’est lâché comme jamais et qui a pris des risques, sans pour autant les maîtriser totalement. Si l’apport de son nouveau frappeur (qui réalise une prestation assez énorme) a permis à ses camarades de jeu d’aller plus loin dans la création comme dans l’explosivité, cela a eu aussi comme contrepartie d’être plus générique et de perdre une partie de son charme, même si le soliste s’est totalement lâché. Cependant celui-ci a montré (encore plus que précédemment) son importance dans l’attrait des metalleux de tous horizons vers sa formation, tant sa prestation légère et nuageuse est à saluer et permet de garder l’identité musicale de ses compères. Pour le reste difficile d’être si enthousiaste pour le chant et les rythmiques assez quelconques (bien loin de celles proposées à leurs débuts), d’autant plus que les deux sont noyées dans un mixage assez synthétique qui laisse la part belle à la batterie très en avant, et à l’ensemble trop hermétique.
En voulant gagner en puissance et en jouant plus sur les accélérations qu’auparavant les frenchies ont pris un risque qui ne laissera pas indifférent son public, certes il en gagnera outre-Atlantique via ce son et ces bpm typiquement calibrés pour là-bas, mais de l’autre ce qui faisait son charme s’est partiellement envolé au risque de voir les fans de la première heure suivre le mouvement. Attention il y’a certes des imperfections et des erreurs, mais ça reste malgré tout supérieur à la majorité de ce qui se fait actuellement dans le genre, même si vu leur talent et leur potentiel on peut faire la fine bouche. S’il y’a peu KRONOS était un des derniers combos de l’hexagone à avoir paraphé un contrat chez l’unique leader (il y’a eu depuis les coreux de THE WALKING DEAD ORCHESTRA) pour sortir le critiqué « Arisen New Era » (qui là-encore montrait une vraie perte d’identité), on ne peut que souhaiter un destin différent pour EXOCRINE. En effet ce transfert vers une écurie plus importante n’avait pas réussi aux vosgiens qui se s’étaient séparés définitivement quelques mois plus tard, laissant beaucoup de regrets et une sensation d’inachevé, tout ce qu’on ne voudrait pas retrouver avec les aquitains.
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